Abandon de poste : les règles d’indemnisation pourraient se durcir
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Lorsqu’un salarié ne vient plus travailler et ne justifie pas son absence, vous ne pouvez pas considérer qu’il s’agit d’une démission mais d’un abandon de poste. Les conséquences sont totalement différentes en termes de procédure comme d’indemnisation. Le ministre du Travail vient toutefois d’annoncer que les conditions d’indemnisation du salarié en abandon de poste pourraient évoluer. Un amendement va être discuté dans le cadre du projet de loi sur le fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi.
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Essayer gratuitement pendant 30 joursJe me connecteL’abandon de poste : qu’est-ce que c’est ?
On parle d’abandon de poste lorsqu’un salarié ne vient plus travailler sans justifier son absence.
Vous ne pouvez alors pas considérer que le salarié a démissionné, la démission ne se présumant pas.
Une telle situation vous impose de recueillir le maximum d’informations sur la situation (le salarié a-t-il rencontré un problème au travail ? Y a-t-il eu une altercation avec ses collègues ? A-t-il reçu un coup de fil urgent ou prévenu quelqu’un qu’il devait s’absenter ?).
Essayez également de prendre contact avec le salarié et de tenter de connaître le motif de son absence. Il est peut-être dans l’impossibilité de vous joindre pour des raisons médicales.
Rappel
Les salariés ont l’obligation de vous informer dans les plus brefs délais de toute absence mais ils disposent en principe de 48 heures pour vous remettre un justificatif d’absence.
Nous vous donnons plus d’explications sur la marche à suivre dans une telle situation et vous proposons des modèles utiles (comme un courrier de demande de justification d’absence) dans notre documentation « Gérer le personnel ACTIV ».
En l’absence de nouvelles et après relances, vous pouvez envisager une sanction disciplinaire allant jusqu’au licenciement pour faute grave. Le salarié n’aura alors pas le droit à une indemnité de licenciement ni à une indemnité compensatrice de préavis.
Important
Si l’abandon de poste se prolonge dans le temps, il est préférable de ne pas laisser trainer la situation des mois. Une prescription de 2 mois s’appliquant aux faits fautifs, il est conseillé d’agir avant la fin de ces 2 mois (même si lorsque les faits fautifs se poursuivent – en l’occurrence si le salarié continue à être absent - le délai de 2 mois ne s’impose pas).
L’abandon de poste et le droit au chômage
Le licenciement suite à un abandon de poste est considéré comme une privation involontaire d’emploi même si c’est le salarié qui est a pris la décision de ne plus venir travailler. Peu importe qu’il s’agisse d’un licenciement pour faute simple ou faute grave.
Le salarié peut donc bénéficier des allocations chômage.
A l’inverse la démission est considérée comme une privation volontaire d'emploi et prive le salarié de son droit au chômage (sauf démission légitime comme par exemple en cas de suivi de conjoint).
Dans le cadre de l’examen du projet de loi sur l’Assurance chômage un amendement a été discuté pour changer la donne en ajoutant à l’article L. 5422-1 du Code du travail que « le licenciement prononcé en raison d’une absence prolongée du salarié, non autorisée par l’employeur et non justifiée par un motif légitime ne constitue en aucun cas une privation d’emploi involontaire ».
Le ministère du Travail, Olivier Dussopt a alors souligné que le fait qu’un salarié qui procède à un abandon de poste ait accès à des conditions d’indemnisation plus favorables qu’un salarié qui démissionne est « une faille ». Et qu’il était favorable à ce que ces conditions soient alignées tout en veillant « à ce que les salariés qui abandonnent leur poste pour des raisons de sécurité ne soient pas pénalisés ».
L'amendement a été retiré pour le sécuriser et une nouvelle version va être examinée par l'Assemblée nationale. Il est cette fois prévu de créer une présomption de démission lorsque le salarié qui a volontairement abandonné son poste ne reprend pas le travail après y avoir été mis en demeure par lettre recommandée ou remise en main propre contre décharge. Le salarié peut contester la rupture de son contrat fondée sur cette présomption en saisissant le conseil de prud'hommes. Le bureau de jugement statue dans un délai d'un mois. Un décret devrait être publié pour fixer les différentes modalités d'exécution. Cette disposition ne s’appliquerait notamment pas aux salariés qui quittent leur poste pour des raisons de santé ou sécurité.
Notez qu'en assimilant l’abandon de poste à la démission la question du préavis va se poser notamment la possibilité pour l’employeur de demander des dommages et intérêts au salarié pour sa non-exécution.
Le projet de loi est en cours de discussion. A suivre !
Bon à savoir
Ce n’est pas la première fois que cette question est évoquée. En 2019 déjà une députée a posé une question écrite à l’Assemblée nationale pour demander s’il était possible d’envisager, dans le cadre de la réforme de l'Assurance chômage, de modifier les droits à indemnisation chômage des salariés abandonnant leur poste, invoquant une rupture d’égalité avec les salariés démissionnaires. L’Assemblée nationale a alors expliqué qu’il n’a pas été jugé opportun de modifier la réglementation sur ce point au motif que les situations poussant un salarié à faire un abandon de poste peuvent être très diverses et qu'il serait délicat d'assimiler systématiquement l’abandon de poste à une privation volontaire d'emploi (voir notre article « Abandon de poste : des effets différents de la démission »).
Discussions autour du projet de loi portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi, déposé le 7 septembre 2022 à l’Assemblée nationale
Amendement n° 392, déposé le vendredi 30 septembre 2022
Juriste en droit social et rédactrice au sein des Editions Tissot
Diplômée du master 2 DPRT de la faculté de droit de Montpellier et experte en droit social, je suis spécialisée dans la rédaction juridique. Au sein des Editions Tissot, je participe à l'animation …
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