Ai-je le droit de licencier un salarié incarcéré pour des faits intervenus en dehors du temps et du lieu de travail ?
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L’incarcération du salarié ne constitue pas en soi un motif de licenciement…
Un salarié peut être poursuivi et incarcéré pour avoir commis des faits pénalement répréhensibles dans le cadre de sa vie personnelle.
Rappel
Chaque individu bénéficie de la présomption d’innocence et ne peut être jugé coupable qu’à l’issue d’un jugement définitif.
Cette privation de liberté, actant son absence provisoire de l’entreprise, impacte nécessairement votre relation de travail et doit être portée à votre connaissance. Elle engendre dans un tout premier temps une suspension de son contrat de travail. A ce titre, le versement de sa rémunération doit cesser même si, en revanche, les obligations de discrétion et de loyauté doivent perdurer.
Ce faisant, pouvez-vous décider de franchir une nouvelle étape en licenciant ce dernier sur la base de ce seul motif ?
Non, un placement en détention ne justifie pas à lui seul un licenciement.
En revanche, une telle mesure peut se retrouver justifiée au regard des conséquences emportées par cette incarcération.
Notez le
L’incarcération ne constitue pas un cas de force majeure susceptible de rompre le contrat de travail.
… sauf si son absence entraîne un trouble caractérisé au bon fonctionnement de l’entreprise
Par principe, vous ne pouvez pas fonder un licenciement sur un motif tiré de la vie personnelle du salarié.
Néanmoins, la Cour de cassation admet, de manière dérogatoire, qu’un motif de cette nature puisse justifier un licenciement non disciplinaire. Pour cela, vous devez démontrer que le comportement ou la situation du salarié crée un trouble caractérisé au bon fonctionnement de votre entreprise.
Dans l’hypothèse d’un placement en détention, ce trouble peut être constitué dans la mesure où :
- son absence perturbe sérieusement la bonne marche de l’entreprise et vous oblige à pourvoir à son remplacement définitif (surtout si la durée de l’incarcération est importante) ;
- le motif de son emprisonnement impacte la réputation de l’entreprise.
… ou s’il ne justifie pas son absence
Rappelons une nouvelle fois que le salarié incarcéré est tenu de vous aviser de sa situation, et ce, afin de justifier son absence.
A défaut, un licenciement pour faute grave peut être envisagé dès lors que :
- ce dernier ne démontre pas qu’il était dans l’impossibilité de vous prévenir ;
- cette absence injustifiée a désorganisé l’entreprise.
Pour engager une procédure de licenciement, vous devrez, au préalable, mettre en demeure votre salarié de justifier son absence.
Bon à savoir
Le dispositif de la présomption de démission semblerait mobilisable dans cette hypothèse.
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Juriste en droit social et rédacteur au sein des Editions Tissot
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