Ancienneté : elle peut justifier une différence de traitement

Publié le 24/07/2023 à 12:09 dans Rémunération.

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A travail égal, salaire égal… Toutefois des éléments objectifs et pertinents peuvent justifier une différence de traitement. L’ancienneté est l’un de ces critères qui peut justifier une différence de salaire. Mais attention, si vous versez une prime d’ancienneté…

Egalité de traitement : principe

Pour un même travail ou un travail de valeur égale, vous êtes tenu d’assurer l’égalité de rémunération entre tous les salariés.

Sont considérés comme ayant une valeur égale les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable :

  • de connaissances professionnelles (titre, diplôme, pratique professionnelle) ;

  • de capacités découlant de l’expérience acquise ;

  • de responsabilités ;

  • et de charge physique ou nerveuse (Code du travail, art. L. 3221-4 ).

Egalité de traitement : la prise en compte de l’ancienneté

Le principe « à travail égal, salaire égal » n’interdit pas les différences de rémunération si elles reposent sur des éléments objectifs et pertinents matériellement vérifiables et étrangers à toute discrimination au travail.

Ainsi, l'ancienneté des salariés est un critère objectif qui peut justifier une différence de rémunération. Mais à une condition, que celle-ci ne soit pas déjà prise en compte avec le versement d’une prime d’ancienneté.

En effet, si vous versez une telle prime, vous tenez déjà compte de l’ancienneté du salarié. En cas de litige, vous ne pourrez pas justifier qu’un salarié perçoit un salaire de base supérieur en raison de son ancienneté si vous lui versez également une telle prime.

La Cour de cassation vient de rappeler qu’il résultait du principe d’égalité de traitement que l’ancienneté pouvait justifier une différence de traitement si elle n’était pas prise en compte par une prime distincte du salaire de base.

Dans cette affaire jugée le 5 juillet 2023, une salariée, habilleuse, demandait un rappel de salaire au titre de l’égalité de traitement.

Son employeur avait fait bénéficier à des salariées ayant le statut de « première habilleuse » une rémunération brute de base, supérieure à celle des habilleuses. Il n'existait aucune distinction de tâches et de responsabilités entre les « premières habilleuses » et les habilleuses. Les « premières habilleuses » avaient seulement plus d’ancienneté. Ces dernières bénéficiaient également d’une prime d’ancienneté.

Pour justifier l’écart du salaire de base, l’employeur avançait que cette prime ne prenait que partiellement en compte l’ancienneté des salariées. Elle stagnait à un palier de 5 % du salaire de base à partir de 10 ans d’ancienneté. La cour d’appel rejette la demande de la salariée. Elle reconnaît que l’ancienneté justifie la différence de rémunération de base, la prime d’ancienneté ne prenant que partiellement en compte la durée d’ancienneté des salariées.

La Cour de cassation n’est pas de cet avis. Dès lors qu’il est constaté que l’ancienneté est déjà prise en compte par le versement d’une prime distincte du salaire de base, la différence de traitement n’est pas justifiée. L’affaire sera rejugée.

Cour de cassation, chambre sociale, 5 juillet 2023, n° 22-17.250 (l'ancienneté des salariés peut justifier une différence de traitement lorsqu'elle n'est pas prise en compte par une prime d'ancienneté distincte du salaire de base)

Isabelle Vénuat

Juriste en droit social et rédactrice au sein des Editions Tissot