Application volontaire d’une convention collective : jusqu’où l’employeur est-il engagé ?

Publié le 06/06/2016 à 07:56, modifié le 11/07/2017 à 18:28 dans Conventions collectives.

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Il arrive qu’un employeur décide d’appliquer volontairement (en tout ou partie), une convention collective dont il ne relève pas de par l’activité principale de son entreprise. Quelles sont les conséquences d’une telle application volontaire ?

Application volontaire d’une convention collective : pourquoi, comment ?

Tout employeur lié par une convention collective doit l’appliquer à ses salariés. Tel est le cas pour les entreprises entrant dans le champ d’application territorial et professionnel d’une convention collective étendue. Pour ces entreprises, la convention collective étendue s’applique obligatoirement.

Mais parfois, notamment parce qu’aucun texte obligatoire ne s’applique, un employeur peut choisir d’appliquer volontairement une convention collective afin d’éviter que ses salariés ne soient privés d’un statut collectif protecteur. Il est même possible d’appliquer une convention collective dont le champ d’application ne couvre pas l’entreprise.

Encore faut-il que l’employeur exprime sa volonté claire et non équivoque d’appliquer la convention collective. Cette application peut porter soit sur la totalité du texte, soit sur une partie de ses dispositions. Par ailleurs, l’employeur peut décider de n’appliquer le texte qu’à certaines catégories de salariés.

Attention, cette application volontaire a, selon les cas, la valeur d’un usage ou d’un engagement unilatéral, dont le salarié peut se prévaloir. Concrètement, le salarié va pouvoir revendiquer l’application d’une convention collective lorsque :

  • son bulletin de paie mentionne cette convention ; l’employeur peut toutefois s’y opposer, à condition d’être en mesure de prouver que cette mention procède d’une erreur manifeste ;
  • sa lettre d’embauche fait un renvoi exprès et sans réserve à cette convention collective.

Application volontaire d’une convention collective : les avenants hors jeu

Pour l’employeur, appliquer volontairement une convention collective ne signifie pas forcément s’engager dans l’inconnu. En effet, cette application volontaire ne vaut que pour la version du texte sur laquelle l’employeur s’engage, et non pas pour ses éventuelles modifications ultérieures.

Concrètement, pour s’engager à appliquer les éventuels avenants à venir, l’employeur doit exprimer une volonté claire et non équivoque en ce sens.

Une affaire récente illustre à nouveau ce principe.

Un salarié a saisi le conseil de prud’hommes d’une demande de rappel de salaires après avoir été licencié pour faute grave. Il demandait à ce que les indemnités que lui devait son employeur soient calculées sur les minima conventionnels et non sur le salaire versé. Cette demande a été refusée par les juges qui se sont fondés sur le salaire versé.

La Cour de cassation a approuvé cette décision : si l’employeur fait une application volontaire d’une convention collective, en l’absence de précisions, seule cette convention collective a vocation à s’appliquer. Par conséquent, le salarié ne peut pas se prévaloir des avenants ultérieurs à cette convention qui déterminent les salaires minimaux.


Marie Coste

Cour de cassation, chambre sociale, 11 mai 2016, n° 15–10925 (l’application volontaire par l’employeur d’une convention collective n’implique pas obligatoirement son engagement à appliquer les avenants ultérieurs)