Arrêt de travail : vous pouvez le contrôler

Publié le 18/12/2012 à 00:00, modifié le 11/07/2017 à 18:19 dans Congé, absence et maladie BTP.

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Si vous désirez vérifier le bien-fondé de l’arrêt de travail de l’un de vos salariés, sachez que vous en avez le droit. Il vous faut pour cela recourir à la contre-visite médicale. Découvrez son mode d’emploi.

A quoi sert la contre-visite médicale ?

La contre-visite médicale consiste à vérifier que l’arrêt de travail prescrit au salarié correspond bien à une incapacité temporaire totale de travailler et qu’il n’a pas été accordé trop facilement.

La contre-visite est traditionnellement mise en œuvre par la caisse d’assurance maladie, mais rien ne vous empêche, en tant qu’employeur, de recourir à ce mécanisme.

Le droit à faire pratiquer la contre-visite médicale « patronale » est en effet la contrepartie de l’obligation, en vigueur dans le secteur du BTP, de maintenir le salaire (indemnités complémentaires) en cas de maladie.

La mise en œuvre de la contre-visite n’est pas liée à un motif particulier. Vous pouvez donc y recourir dès que vous avez un doute, quelle qu’en soit la raison, dès lors que l’absence couvre une durée supérieure ou égale à 3 jours consécutifs.

Vous pouvez ainsi demander que soient vérifiés :

  • le bien-fondé de l’arrêt maladie ;
  • la durée de l’arrêt maladie ;
  • le respect des heures de sorties auxquelles le salarié est soumis.

Choisir le médecin

Vous pouvez mandater le médecin de votre choix : un praticien libéral indépendant ou un professionnel attaché à une entreprise spécialisée en la matière. Certaines organisations patronales ont négocié des tarifs de groupe dont vous pouvez bénéficier si vous êtes adhérent.

Les coûts d’une contre-visite sont très variables, ils tournent généralement autour d’une centaine d’euros en moyenne. N’hésitez pas à faire jouer la concurrence !

Le salarié contrôlé ne peut pas exiger la présence, lors de la contre-visite, de son médecin traitant ou d’un médecin-expert.

Une fois votre choix effectué, vous communiquerez au médecin les coordonnées de votre salarié ainsi que les horaires de sortie autorisés par le médecin traitant.

Le médecin a le choix de convoquer ou de prendre rendez-vous avec le salarié ; il peut également se présenter sans communication préalable (notamment s’il souhaite vérifier le respect des heures de sortie autorisées).

Il doit, dans tous les cas, faire valoir sa qualité de docteur en médecine et de mandataire de l’employeur.

Les obstacles à la contre-visite

Ils sont principalement de deux ordres : le salarié refuse de se soumettre à l’examen du médecin ou il est absent lors de la visite.

Refus du salarié. Le refus du salarié constitue un manquement à son obligation. Il perd donc automatiquement le bénéfice de ses indemnités complémentaires.

Absence du salarié. Elle peut avoir les mêmes conséquences : si le salarié est absent de son domicile lorsque le médecin se présente pour la contre-visite, l’employeur peut suspendre le versement des indemnités complémentaires.

Notez-le
Pensez à communiquer au préalable au médecin les horaires de sortie autorisés indiqués sur l’arrêt maladie. Le salarié ne peut pas se voir reprocher d’être absent pendant ces périodes !

Par ailleurs, si l’absence est justifiée pour des raisons médicales (par une visite chez le médecin par exemple), vous ne pourrez pas suspendre les indemnités. Toutefois, c’est au salarié de prouver la justification de son absence.

Enfin, il possible que votre salarié ait été autorisé par la CPAM à séjourner dans un autre lieu que son domicile (convalescence chez un proche notamment). Il doit alors vous en informer et vous communiquer l’adresse, afin que vous puissiez éventuellement procéder à une contre-visite. S’il s’absente dans ces conditions sans vous en avoir informé, vous pouvez suspendre le versement de ses indemnités.

Notez-le
L’absence du salarié de son domicile lors de la contre-visite ne peut pas constituer une cause de licenciement.

Conséquences pour le salarié. Lorsque la contre-visite n’a pas pu avoir lieu, que ce soit à cause d’un refus ou d’une absence, vous devez pouvoir en apporter la preuve. Celle-ci se fait généralement par le compte-rendu écrit que le médecin vous fournit.

Dans cette situation, et comme nous l’avons déjà dit, le salarié perd le bénéfice de ses indemnités complémentaires de salaire. A compter de cette date, vous n’êtes plus tenu d’assurer le maintien de salaire.

Conséquences de la contre-visite

Les résultats de la contre-visite vous sont transmis par le médecin ou l’organisme de contrôle auquel vous avez fait appel.

Différents cas de figure peuvent se présenter :

  • l’arrêt de travail est médicalement justifié ;
  • l’arrêt de travail est médicalement justifié mais le médecin préconise une reprise anticipée ;
  • l’arrêt de travail n’est pas médicalement justifié ;
  • le salarié est absent en dehors des heures de sortie autorisées ;
  • l’adresse fournie par le salarié est erronée ou incomplète ;
  • le salarié a refusé de se soumettre au contrôle.

Dans le premier cas, vous devrez continuer à verser les indemnités complémentaires.

Dans les cinq derniers cas, vous êtes en droit de suspendre ce versement à partir de la demi-journée qui suit la contre-visite médicale.

Vous devez informer votre salarié au plus tôt des suites de la contre-visite médicale. Pour cela, utilisez notre modèle :

Suites de la contre-visite médicale : lettre de l’employeur au salarié (doc | 2 p. | 40 Ko)

De son côté, le salarié contrôlé doit suivre la décision du médecin contrôleur, notamment lorsque ce dernier préconise une reprise anticipée du travail. S’il décide de revenir à la date prescrite par son médecin traitant, il ne commet pas de faute mais perd le bénéfice des indemnités complémentaires.

Contestation du salarié. Votre salarié peut tout à fait contester les résultats de la contre-visite. Il doit pour cela demander à passer une autre contre-visite ou saisir le juge des référés pour qu’il désigne un médecin-expert chargé d’effectuer une expertise judiciaire.

Si le médecin-expert considère l’arrêt de travail justifié, contrairement au médecin contrôleur, vous devrez continuer à verser les indemnités complémentaires.

Le salarié ne revient pas dans l’entreprise

Il est possible que le salarié ne reprenne pas son poste dans l’entreprise et ce, malgré une contre-visite ayant conclu à un arrêt injustifié.

Prolongation de l’arrêt de travail. Si, à la suite d’une contre-visite médicale, le médecin traitant prolonge l’arrêt de travail initial du salarié, celui-ci retrouve le droit de percevoir ses indemnités complémentaires.

Notez-le
Cette règle s’applique même si le médecin contrôleur a conclu que toute prolongation de l’arrêt maladie devait être exclue.

Si vous contestez cette prolongation, il vous faut alors procéder à une nouvelle contre-visite.

Inaptitude temporaire. Le salarié peut solliciter l’avis du médecin du travail sur son état de santé et ses capacités à reprendre son travail. Si le médecin du travail rend un avis d’inaptitude temporaire, qui prolonge donc l’arrêt de travail du salarié, vous ne pourrez pas demander une nouvelle contre-visite.

Pour contester cette situation, vous devrez saisir l’inspecteur du travail. En dehors de ce recours, le salarié pourra légitimement refuser la contre-visite.

Information de la CPAM

Lorsque le médecin contrôleur conclut :

  • soit à l’absence de justification de l’arrêt maladie ;
  • soit à l’impossibilité de procéder à l’examen du salarié,

il doit transmettre son rapport au service du contrôle médical de la CPAM, par écrit et dans les 48 heures.

La caisse peut alors décider :

  • de procéder à un nouvel examen du salarié (automatique si le rapport du médecin concluait à l’impossibilité de contrôler le salarié) ;
  • ou de suspendre directement le versement des indemnités journalières, sans autre examen. Le salarié dispose alors d’un délai de 10 jours francs à compter de la notification de la décision de suspension des indemnités journalières, pour demander un examen de sa situation par le service du contrôle médical. Celui-ci a 4 jours francs à compter de la réception de la saisine de l’assuré pour se prononcer sur cette demande.

Si un nouvel arrêt de travail est prescrit dans un délai de 10 jours francs à compter de à cette suspension, la reprise du versement des IJ sera soumise à l’approbation du contrôle médical, dans un délai de 4 jours francs à compter de la date de réception de l’avis d’arrêt de travail.

Sources :
Code du travail, L. 1226–1 (indemnisation complémentaire de l’arrêt maladie), D. 1226–3 (délai de carence avant indemnisation de l’employeur)
CSS, art. L. 315–1 (information de la CPAM)
CSS, art. D 315–4 (délais de saisine du salarié et de réponse du service de contrôle médical)
CSS L. 323–7 et D. 323–4 (délai entre la décision de suspension des IJ et un nouvel arrêt de travail)
Loi n° 2009–1646 du 24 décembre 2009 de financement de la Sécurité sociale pour 2010, art. 90
Cass. soc., 17 décembre 1986, no 84–43458 (refus du salarié)
Cass. soc., 15 octobre 1987, no 85–40555 (suppression du maintien de salaire)
Convention collective nationale des ouvriers du Bâtiment (moins de 10 salariés) : art. 6.12
Convention collective nationale des ouvriers du Bâtiment (plus de 10 salariés) : art. 6.13
Convention collective nationale des ouvriers des Travaux Publics : art. 6.2 (conditions d’ancienneté à remplir pour être indemnisé en cas d’arrêt de travail)