Barème Macron : la Cour de cassation confirme que la situation concrète des salariés ne permet pas de l’écarter
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Si certaines cours d’appel continuent d’écarter l’application du barème Macron, la Cour de cassation vient de réaffirmer sa position très clairement : la situation concrète d’un salarié ne doit être appréciée que pour déterminer le montant de l'indemnité due entre les montants minimaux et maximaux, pas pour s’écarter du barème.
Une Cour de cassation inflexible sur le sujet du barème Macron
Le barème Macron est une grille utilisée pour déterminer les indemnités versées à un salarié lorsqu’un licenciement est jugé sans cause réelle et sérieuse et qu’il n’est pas réintégré. Ce barème comprend des planchers et des plafonds obligatoires en fonction de l’ancienneté du salarié et de l’effectif de l'entreprise, que les juges sont obligés d’appliquer.
Il existe néanmoins quelques exceptions à son application qui vous sont détaillées dans la documentation « Tissot Social Entreprise ACTIV ».
Dès le départ, l’application de ce barème a fait débat auprès des tribunaux. Des conseils de prud’hommes, suivis de cours d’appel, ont en effet refusé de le mettre en œuvre jugeant le montant plafonné attribué aux salariés trop faible. Le débat a porté sur l’application du droit européen et plus particulièrement la convention n° 158 de l’Organisation internationale du travail (OIT) et la charte sociale européenne, lesquelles prévoient que les juges nationaux doivent pouvoir ordonner le versement d’une indemnité adéquate ou toute autre réparation appropriée en cas de licenciement injustifié.
Depuis mai 2022 la Cour de cassation s’est prononcée à plusieurs reprises sur le sujet et sa position n’a jamais varié : il faut appliquer le barème Macron. Pour la Haute juridiction, le Code du travail permet raisonnablement l'indemnisation de la perte injustifiée de l'emploi ainsi que le versement d'une indemnité adéquate ou une réparation considérée comme appropriée.
Malgré tout, certaines cours d’appel continuent toutefois de résister, à l’image de la cour d’appel de Grenoble en juin dernier (voir notre article « Barème Macron : encore écarté par une cour d’appel »).
Bon à savoir
le comité européen des droits sociaux (CEDS) a également publié plusieurs décisions sur le fait que le barème Macron est contraire au droit européen mais celles-ci sont sans caractère contraignant en droit français (voir notre article « Barème Macron : le Comité européen des droits sociaux rend une nouvelle décision ! »).
Dernier épisode en date : une décision de la Cour de cassation du 6 septembre qui confirme qu’il n’est pas possible d’aller au-delà du barème Macron.
Fixer une indemnité entre le montant minimum et maximum du barème Macron
Dans cette affaire, la cour d’appel de Chambéry avait condamné l’employeur à une indemnité égale au double de l’indemnité légale maximale (19 500 euros au lieu de 9762 euros). Elle estimait que l'indemnité prévue par le barème était d'un montant trop réduit et ne permettait pas, compte tenu de la situation concrète et particulière de la salariée, une indemnisation adéquate et appropriée du préjudice subi, compatible avec les exigences de l'article de la convention n° 158 de l'OIT. La salariée en question était sans diplôme, âgée de 58 ans à la date de la rupture et de santé fragile. De plus, n'ayant retrouvé qu'un travail à temps partiel, elle justifiait d'une perte supérieure à 30 800 euros sur deux années.
Mais la Cour de cassation rappelle que le situation concrète de la salariée ne doit être appréciée que pour déterminer le montant de l'indemnité due entre les montants minimaux et maximaux, pas pour s’écarter du barème. Elle a d’ailleurs choisi de fixer la somme due à la salariée au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse au montant maximum de 9762 euros (soit 6 mois de salaire alors que le barème pouvait varier entre 3 et 6 mois de salaire).
Dernière minute : Une nouvelle décision de la Cour de cassation du 20 septembre 2023 va encore une fois dans le même sens (Cass. soc., 20 septembre 2023, n° 22-12.751).
Cour de cassation, chambre sociale, 6 septembre 2023, n° 22-10.973 (la situation concrète d’un salarié doit être prise en compte seulement pour déterminer le montant de l'indemnité due entre les montants minimaux et maximaux du barème)
Juriste en droit social et rédactrice au sein des Editions Tissot
Diplômée du master 2 DPRT de la faculté de droit de Montpellier et experte en droit social, je suis spécialisée dans la rédaction juridique. Au sein des Editions Tissot, je participe à l'animation …
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