Changement de domicile : le salarié peut-il l’imposer pour la prise en compte des indemnités de grand déplacement ?

Publié le 18/04/2014 à 08:02, modifié le 11/07/2017 à 18:25 dans Contrat de travail BTP.

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Contrairement au petit déplacement, la situation de grand déplacement et les indemnités inhérentes s’apprécient au regard du domicile du salarié. Le changement de résidence lorsqu’il est significatif peut donc avoir des conséquences importantes pour l’entreprise. Quels sont ces conséquences et quelles solutions peuvent être envisagées ?

Indemnités de grand déplacement : les conséquences du changement de domicile

Habituellement, le changement de domicile du salarié ne génère pas de difficultés tant que celui-ci reste à proximité du lieu de l’établissement dont il dépend. Il arrive, toutefois, que le salarié, pour raisons personnelles, choisisse de s’éloigner du lieu d’implantation de l’entreprise. Il convient donc d’étudier les conséquences de ce changement.

Est réputé en grand déplacement l’ouvrier qui travaille dans un chantier dont l’éloignement lui interdit de regagner chaque soir son lieu de résidence. Chaque entreprise définit ainsi, en tenant compte de son obligation de sécurité, la distance/le temps de trajet au-delà desquels le salarié n’est plus en mesure de rentrer chez lui le soir. Le changement de domicile doit-il être pris en compte aux fins d’apprécier si le salarié est ou non en situation de grand déplacement ?

La convention collective des ouvriers du Bâtiment (article VIII-21) et celle des ouvriers des Travaux Publics (article 8–10) sont rédigées différemment puisque :

  • la CCN Bâtiment tient compte du dernier lieu de résidence ;
  • la CCN TP fait clairement référence au seul lieu de résidence déclaré lors de l’embauche.
Notez-le
Dans une entreprise TP, le salarié est considéré en grand déplacement dès lors que le déplacement domicile-chantier est supérieur à 100 km. L’un de ses ouvriers modifie son lieu de résidence qui se trouve désormais à 120 km du chantier au lieu de 50 km. L’employeur pourra lui opposer l’application de la situation de grand déplacement uniquement au regard du domicile déclaré lors de l’embauche et ainsi lui verser les seules indemnités de petit déplacement.

S’agissant des voyages périodiques, dès lors que le salarié se trouve en situation de grand déplacement, les CCN des ouvriers du Bâtiment et des TP apprécient ce droit au regard du dernier lieu de domiciliation excluant ainsi toute référence au lieu déclaré lors de l’embauche.

A l’inverse des grands déplacements, les ouvriers qui se déplacent sur les chantiers peu éloignés de chez eux peuvent prétendre à une indemnité de petit déplacement. Pour tout savoir sur cette indemnité (montant, conditions pour en bénéficier, etc.), les Editions Tissot vous conseillent leur documentation « Rémunération et paie BTP ». Vous pouvez également télécharger notre tableau de synthèse sur les différentes situations qui peuvent se rencontrer :

Temps de trajet : les situations les plus courantes (pdf | 3 p. | 23 Ko)

Les solutions possibles

La liberté d’élire son domicile est protégée par la Convention Européenne des Droits de l’Homme et l’interdiction d’élire son domicile à un endroit autre que celui déclaré lors de l’embauchage n’est pas en soi justifiée par les intérêts de l’entreprise.

Ce sont par contre les conséquences pécuniaires liées à ce changement de domicile qui doivent être analysées afin de déterminer s’il y a ou non modification du contrat de travail. En effet, le consentement donné par l’employeur lors de la signature du contrat a été conditionné par la connaissance de la distance entre le domicile du salarié et le bassin d’activité de l’entreprise.

La Cour de cassation refuse à l’employeur la possibilité d’imposer d’autorité le calcul des indemnités de déplacement au regard du lieu déclaré à l’embauche (Cass. soc., 9 avr. 1987, n° 84–43669). Par contre, elle a par le passé déjà considéré que la modification portée par le salarié à la situation de son domicile peut justifier un licenciement. C’est aux juges du fond d’apprécier si la modification est ou non substantielle et justifie un licenciement.