Comment se protéger des campagnes de débauchages déloyales
Temps de lecture : 5 min
Une campagne de débauchage venant d’une société concurrente peut fragiliser votre entreprise. Le ministère de l’Intérieur sensibilise les entreprises françaises aux méthodes déloyales que peuvent déployer certaines entreprises étrangères pour recruter vos salariés afin de développer leur activité, voire fragiliser ou éliminer la concurrence.
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Débauchage : attention aux actes de concurrence déloyale
L'embauche de salariés d'une entreprise concurrente ne caractérise pas en soi un comportement fautif. Mais elle le devient si cette opération intervient dans des conditions qui a pour conséquence une désorganisation de l’entreprise.
Ainsi, une démarche de débauchage du personnel d’une entreprise concurrente qui a pour effet d'entraîner sa désorganisation est un acte de concurrence déloyale. Peu importe que ces salariés soient ou non soumis à une clause de non-concurrence.
Attention, si le départ du salarié perturbe juste le fonctionnement de l’entreprise, cela est insuffisant pour qualifier le débauchage d’acte de concurrence déloyale.
Notez le
Le nombre de salariés débauchés n’est pas un critère déterminant. En effet, le départ d’un salarié peut désorganiser une entreprise.
Sachez qu’en cas de rupture abusive du contrat de travail, l’ancien salarié et son nouvel employeur peuvent voir leur responsabilité engagée de manière individuelle et aussi solidaire (Code du travail, art. L. 1237-3 ).
Pour engager leurs responsabilités et demander réparation, il faut qu’il y ait un lien de causalité entre les manœuvres déloyales et le préjudice subi (désorganisation de l’entreprise).
Débauchage : préconisations de la DGSI
Dans son dernier numéro de « Flash ingérence », la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) met en garde les sociétés françaises sur le recours aux débauchages de salariés par des acteurs étrangers.
En effet, elle identifie régulièrement des entreprises françaises qui, après avoir subi des débauchages par des sociétés concurrentes étrangères, rencontrent de graves difficultés économiques.
Afin d’éviter de tels désagréments, la DGSI présente les différents moyens déployés par des sociétés étrangères pour débaucher du personnel et dont le but est :
de développer une nouvelle activité ;
d’acquérir des compétences technologiques ;
voire de fragiliser un concurrent.
Pour étayer son discours, la DGSI cite trois situations vécues par des sociétés françaises.
Dans son premier exemple, la société étrangère est intervenue par l’intermédiaire d’un cabinet de recrutement après avoir tenté, pendant deux années, de débaucher des salariés d’une entreprise française concurrente. Le cabinet de recrutement avait contacté la moitié des salariés (e-mail, téléphone, réseaux sociaux). Les salariés qui avaient accepté un entretien se voyaient proposer une hausse de salaire de plus de 20 %, ainsi qu’une prime de cooptation.
En l’absence de clause de non-concurrence, plusieurs salariés sont partis, ce qui a entraîné un arrêt temporaire de plusieurs lignes de production et de grosses pertes financières.
Dans son deuxième exemple, la société française avait refusé deux offres d’achat d’une société concurrente, deux salariés, n’ayant pas signé de clause de non-concurrence étaient partis travailler pour cette société tout en ayant conservé leurs matériels informatiques. De plus, ils avaient informé leurs clients de leur changement d'entreprise. Par la suite, cette entreprise étrangère a débauché un salarié, expert technique, soumis à une clause de non-concurrence de 6 mois. Mais cette durée n’a pas été un obstacle au départ du salarié. L’entreprise avait également tenté de débaucher 5 autres salariés en raison de leurs compétences techniques.
Dans son troisième et dernier exemple, la DGSI relate l’expérience vécue par des sociétés françaises de pointe, spécialisées dans un secteur stratégique. Une start-up étrangère s’est installée près de leurs sites et a contacté les salariés de ces sociétés françaises. Elle leur proposait des hausses de plus de 30 % de leur rémunération et des opportunités de mobilités internationales. Une dizaine de salariés ont répondu à l’appel de cette start-up qui souhaitait internaliser une partie de sa production qui dépendait de ces sociétés françaises.
Pour anticiper ces actes de débauchage, la DGSI fait plusieurs préconisations aux sociétés françaises.
Dans vos relations avec les salariés, il faut être vigilant dans la rédaction du contrat de travail notamment sur la clause de non-concurrence qui doit prévoir une durée suffisante afin de limiter les conséquences des démarches déloyales.
Et pour protéger vos données, secrets de fabrication, voire la perte de clients, prévoyez une clause de discrétion également dénommée clause de confidentialité.
Lorsqu’un salarié quitte l’entreprise, assurez-vous que celui-ci vous a restitué tout son matériel informatique et qu’il ne conserve aucun document stratégique. Pensez également à couper tous ses accès informatiques.
Afin de sécuriser vos relations avec vos clients et les cabinets de recrutement avec lesquels vous travailler, la DGSI souligne l’importance d’une autre clause, celle de la non-sollicitation du personnel.
La DGSI préconise également :
de conduire de façon régulière une cartographie de vos concurrents ;
d’anticiper les situations à risques comme les tensions en interne entre les salariés, avec les supérieurs hiérarchiques, etc.
Si vous avez connaissance d’une opération de débauchage déloyale, il est important d’agir rapidement notamment en sollicitant votre service juridique pour qu’il effectue les démarches juridiques afin de mettre un terme à cette action, voire de saisir les instances judiciaires, de déposer plainte auprès des services de police ou gendarmerie ou auprès du procureur de la République.
Ministère de l’intérieur, Flash DGSI#98, Ingérence économique, les débauchages, vecteurs de déstabilisations pour les entreprises, décembre 2023
Juriste en droit social et rédactrice au sein des Editions Tissot
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