Conventions collectives : faut-il prendre en compte la durée du travail pour calculer les minima conventionnels ?

Publié le 02/10/2017 à 07:40 dans Conventions collectives.

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Le sujet des minima conventionnels fait l’objet de litiges récurrents devant les prud’hommes. Preuve que leur mise en pratique ne va pas de soi, surtout quand la grille de salaires négociée au niveau de la branche ne correspond pas à la durée du travail pratiquée par le salarié en entreprise...

Conventions collectives : articuler le minimum conventionnel avec le SMIC

Le salaire minimum conventionnel est un « classique » que prévoient de nombreuses conventions collectives. Pour déterminer la rémunération plancher que vous devez verser à vos salariés, vous devez comparer le montant du SMIC avec celui du salaire minimum conventionnel. En pratique, pour chaque salarié, vous devez déterminer le taux minimum correspondant à la classification du salarié concerné dans l'échelle des rémunérations de la convention collective.

Une fois cette opération réalisée :

  • vous versez le minimum conventionnel si celui-ci est supérieur au montant du SMIC ;
  • dans le cas contraire, vous versez le minimum conventionnel augmenté d’un complément de salaire permettant d'atteindre le montant du SMIC.
Notez-le
S’agissant de montants planchers, vous avez naturellement la possibilité de rémunérer le salarié au-dessus du minimum conventionnel qui lui est applicable.

Parmi les principales difficultés que peut soulever l’application des minima conventionnels, se pose la question de l’articulation des minima avec la durée du travail. Pouvez-vous opérer une proratisation en fonction de la durée du travail effectuée par vos salariés ? Telle était la question qui se posait dans deux affaires récentes.

Conventions collectives : appliquer le minimum conventionnel en tenant compte de la durée du travail dans l’entreprise

Dans une première affaire, plusieurs salariés relevant de la convention collective des industries chimiques avaient saisi les prud’hommes pour demander des rappels de salaires au titre des minima conventionnels. Ces salariés estimaient que l’employeur n’avait pas respecté l’évolution de la valeur du point prévue par leur convention collective.

Cette valeur s’appliquait à un salarié effectuant 38 heures hebdomadaires. Or, dans cette affaire, un accord d'entreprise avait ramené la durée hebdomadaire du travail de 38 à 35 heures hebdomadaires avec maintien des rémunérations. Dans ces conditions, les salariés pouvaient ils prétendre à cette valeur dans sa totalité?

Oui, ont répondu les premiers juges, pour qui le salarié qui a perçu une rémunération totale (minimum de base plus le complément de salaire) inférieure au minima fixé par le barème des partenaires sociaux a droit à un rappel de salaire.

Mais ce n’est pas du tout l’avis de la Cour de cassation. Elle rappelle que les minima conventionnels sont définis par rapport à une durée de travail précise. Or ici, la durée du travail dans l'entreprise était inférieure à celle-ci. Par conséquent, l’appréciation du respect du montant des minima conventionnels devait être effectuée par rapport à la durée du travail pratiquée dans l'entreprise. Une proratisation du minimum conventionnel s’imposait donc.

Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, 7 septembre 2017, n° 15-26.722

Conventions collectives : proratiser les compléments de salaire conventionnels

La deuxième affaire concerne la convention collective des cabinets d’avocats. Une salariée réclamait, suite à son licenciement, un rappel de salaire. Plus précisément, elle demandait des sommes au titre du complément de salaire prévu par l’avenant n° 65 du 26 janvier 2001. Ce complément mensuel, accordé au salarié ayant obtenu certains diplômes, est équivalent, selon le diplôme, à 6, 10 ou 14 fois la valeur du point conventionnel. Or, la salariée étant à temps partiel, l’employeur avait proratisé le complément de salaire en fonction de sa durée de travail, ce que l’intéressée contestait.

Ici aussi, les premiers juges avaient donné raison à la salariée. Ils estimaient que ce complément de salaire a la nature du salaire de base auquel il s’ajoute. La somme totale ainsi obtenue demeure la contrepartie de la durée du travail exécutée, et ne doit donner lieu à aucune proratisation. Les juges relevaient également que les textes conventionnels, parfaitement clairs sur les modalités de calcul, ne contenaient aucune restriction en ce sens.

L’affaire est arrivée devant la Cour de cassation, qui n’a pas tenu le même raisonnement. Elle rappelle d’abord que, d’après le Code du travail, la rémunération du salarié à temps partiel est proportionnelle à celle du salarié qui, à qualification égale, occupe à temps complet un emploi équivalent dans l’entreprise. Puis, elle souligne que les dispositions conventionnelles ne comportent pas de mention contraire au principe de proportionnalité posé par le Code du travail pour les salariés à temps partiel. Par conséquent, l’employeur était parfaitement en droit de proratiser le complément de salaire conventionnel en fonction du temps de travail de la salariée.

Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, 7 septembre 2017, n° 16-19.528

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Cour de cassation, chambre sociale, 7 septembre 2017, n° 15-26.722 (l’appréciation du respect du montant des minima conventionnels doit être effectuée par rapport à la durée du travail pratiquée dans l'entreprise)
Cour de cassation, chambre sociale, 7 septembre 2017, n° 16-19.528 (en l'absence de mention contraire, le complément de rémunération prévu par une convention collective doit être proratisé pour les salariés à temps partiel en fonction de leur temps de travail)