Conventions collectives : le non-respect du temps partiel modulé conduit-il forcément à une requalification en temps complet ?

Publié le 04/02/2019 à 07:48 dans Conventions collectives.

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Un accord ou une convention collective peut autoriser l'employeur à aménager le temps partiel sur tout ou partie de l’année. A ce sujet, une nouvelle affaire, relative à l'ancien dispositif du temps partiel modulé, s'est récemment retrouvée devant les tribunaux.

Conventions collectives : des dispositifs pour aménager le temps partiel sur l'année

Dans certains secteurs d'activité, les entreprises peuvent connaître des variations d'activité importantes selon la période de l'année. Pour permettre aux employeurs de mieux s'organiser en fonction des variations à la hausse ou à la baisse de cette activité, il est possible d'aménager le temps partiel sur l'année, à condition qu'un accord collectif le prévoie.

Notez-le
L'accord collectif en question doit être un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, un accord de branche.

Parmi les mentions obligatoires, l’accord collectif doit indiquer :

  • la période de référence sur laquelle s’applique l’aménagement du temps de travail (un an ou, si l'accord de branche l’autorise, 3 ans) ;
  • les conditions et délais de prévenance des changements de durée ou d’horaire de travail ;
  • les conditions de prise en compte des absences, ainsi que des arrivées et départs en cours de période ;
  • les modalités de communication et de modification de la répartition de la durée et des horaires de travail.

L'employeur ne peut pas se contenter de se référer à l'accord collectif. Il doit aussi obtenir l'accord exprès du salarié pour lui appliquer l'accord collectif aménageant le travail à temps partiel sur tout ou partie de l’année.

Le dispositif du travail à temps partiel aménagé sur tout ou partie de l’année a remplacé en 2008 un précédent dispositif, le travail à temps partiel modulé. Pour autant, les accords collectifs sur ce thème conclus avant le 21 août 2008 continuent de s’appliquer. Ils continuent également d'alimenter les litiges devant les tribunaux, comme le montre une affaire jugée récemment.

Que se passe-t-il si l'employeur ne respecte pas les dispositions de la convention collective sur le temps partiel modulé ?

Un salarié de la convention collective des entreprises de la distribution directe qui se trouvait sous l'ancien dispositif du temps partiel modulé, a saisi les juges pour demander la requalification de son contrat de travail en contrat à temps complet.

Il reprochait à l'employeur de ne pas avoir respecté certaines modalités fixées à la fois par la convention collective et l'accord d’entreprise :

  • d'une part, la limite de variation de la durée du travail au tiers de la durée prévue au contrat de travail ;
  • d'autre part, les modalités et les délais de modification de ses horaires de travail.

Pour le salarié, la méconnaissance par l'employeur de ces obligations relatives à la mise en œuvre du temps partiel modulé faisait présumer que son contrat de travail est à temps complet.

Mais les juges du fond, suivis dans leur raisonnement par la Cour de cassation, ont rejeté la demande du salarié. Ils rappellent que, certes, en cas de non-respect des modalités de communication du programme indicatif de la répartition de la durée du travail au salarié et des conditions et délais dans lesquels les horaires de travail lui sont notifiés par écrit, le contrat est présumé à temps complet. Il incombe alors à l'employeur de démontrer que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et n'avait pas à se tenir constamment à sa disposition.

Or, ici :

  • l'organisation du travail prévoyait une durée mensuelle moyenne de travail de référence, avec fixation d'un commun accord des jours de disponibilité des salariés dans la semaine ;
  • les feuilles de route remises aux distributeurs et normalement signées par eux, qui ne mentionnaient qu'un volume horaire réparti librement par les intéressés à l'intérieur des jours de disponibilité, précisaient la durée contractuelle hebdomadaire de travail, ce qui permettait aux salariés de contrôler le volume de travail convenu ;
  • enfin, l'employeur établissait que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à sa disposition.

Au vu de tous ces éléments, les juges ont estimé que malgré la méconnaissance de certaines dispositions conventionnelles, le contrat de travail de l'intéressé ne devait pas être requalifié en contrat à temps complet.

Parce que le recours au travail à temps partiel peut être contraignant (mise en place, contrat de travail, statut des salariés, etc.), nous vous conseillons notre documentation « Tissot Social Entreprise » qui contient tout un dossier sur ce thème.


Cour de cassation, chambre sociale, 9 janvier 2019, n° 16-18.177 (le non-respect de la limite du tiers de la durée du travail fixée par la convention collective et l'accord d'entreprise est insuffisant en soi pour justifier la requalification du contrat à temps partiel modulé en contrat à temps complet, dès lors qu'il n'était pas démontré que la durée du travail du salarié avait été portée à un niveau égal ou supérieur à la durée légale hebdomadaire ou à la durée fixée conventionnellement)