Conventions collectives : les différences de traitement entre catégories professionnelles sont présumées justifiées jusqu'à preuve du contraire !

Publié le 10/09/2018 à 07:30 dans Conventions collectives.

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Certains accords ou conventions collectives établissent des différences de traitement entre les catégories professionnelles. Des différences qui sont présumées justifiées, jusqu'à preuve du contraire...

Conventions collectives : les différences de traitement d’origine conventionnelle sont présumées justifiées

Comme tout employeur, vous connaissez le principe « à travail égal, salaire égal », qui vous oblige à payer le même salaire à vos salariés placés dans une situation identique.

S’il existe des différences de traitement, vous devez pouvoir justifier qu'elles reposent sur des raisons objectives. En cas de litige, le juge en contrôle la réalité et la pertinence.

Il arrive que ce soit la convention collective qui réserve certains avantages (ex : congés payés supplémentaires, préavis plus ou moins long) à une seule catégorie professionnelle (cadre, technicien, agent de maîtrise, ouvrier).

Depuis des arrêts de janvier 2015, la Cour de cassation estime que de telles différences de traitement entre catégories professionnelles sont « présumées justifiées » (voir notre article « Avantages catégoriels : sont-ils justifiés ? »).

Il en va de même pour les différences de traitement conventionnelles introduites au sein d'une même catégorie professionnelle, entre des salariés exerçant des fonctions distinctes : ces différences sont également présumées justifiées.

Concrètement, dans ces deux cas, cela signifie qu'il revient au salarié (ou au syndicat) qui invoque une inégalité de traitement de démontrer que ces différences de traitement sont étrangères à toute considération de nature professionnelle. Une preuve pas toujours facile à rapporter, comme le montre une affaire jugée récemment.

Conventions collectives : prouver que la différence de traitement est étrangère à toute considération professionnelle

Afin de définir les modalités de l'octroi du statut de journaliste à des ouvriers du livre, une entreprise avait conclu un accord avec plusieurs syndicats.

Les salariés en question avaient alors signé un avenant contractuel, visant à harmoniser leur niveau de rémunération avec celui des journalistes. Cet avenant prévoyait un salaire de base et un complément de salaire variable, l'addition des deux représentant leur rémunération en vigueur au moment de sa signature. Un tel mécanisme de recomposition de salaire était également décidé au profit de 3 salariés rejoignant le secrétariat de rédaction, à la différence près que pour ces derniers, l'avenant contractuel prévoyait que le complément de salaire payé en sus du salaire de base serait fixe.

Par la suite, plusieurs salariés ont saisi la juridiction prud'homale pour contester la validité de la clause contractuelle. Ils faisaient valoir que l'accord signé avec les syndicats prévoyait un mécanisme de recomposition de salaire identique destiné à harmoniser le niveau de rémunération des ouvriers du livre avec celui des journalistes. Dans ces conditions, la différence de traitement instaurée au bénéfice de 3 salariés était étrangère à toute considération de nature professionnelle.

Mais les juges du fond n'ont pas suivi leur argumentaire. Ils considèrent que cette différence de traitement reposait sur des raisons objectives dans la mesure où les trois salariés en cause appartenaient à une catégorie professionnelle distincte.

La Cour de cassation enfonce le clou. Elle rappelle que les différences de traitement entre catégories professionnelles opérées par voie de conventions collectives ou d'accords collectifs, négociés et signés par des organisations syndicales représentatives, sont présumées justifiées. Par conséquent, il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu'elles sont étrangères à toute considération de nature professionnelle. Dans cette affaire, il revenait donc aux salariés de démontrer que la différence de traitement alléguée était étrangère à toute considération de nature professionnelle, la simple constatation du traitement différent de trois salariés ne constituant pas cette démonstration.


Cour de cassation, chambre sociale, 28 juin 2018, n° 16-21.225 (les différences de traitement entre catégories professionnelles opérées par voie de conventions collectives ou d'accords collectifs sont présumées justifiées de sorte qu'il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu'elles sont étrangères à toute considération de nature professionnelle)