Délégation de pouvoirs en matière d’hygiène et de sécurité : quelles conditions de validité ?

Publié le 14/09/2009 à 00:00, modifié le 02/08/2017 à 09:47 dans Contrat de travail.

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En matière d’hygiène et de sécurité, vos obligations et vos responsabilités, notamment pénales, sont lourdes. Dès lors que la taille de votre entreprise ne vous permet plus de les assumer sans risques, n’hésitez pas à déléguer vos pouvoirs. Inventaire des règles à respecter pour une délégation de pouvoirs efficace.

Délégation de pouvoirs en matière d’hygiène et de sécurité : quelles conditions de validité ?

Le chef d’entreprise doit veiller personnellement au respect strict et constant, dans son entreprise, des règles édictées par le Code du travail. En pratique, il ne peut pourtant pas être présent partout.


Pour pallier cette difficulté, il peut transférer ses pouvoirs, et ainsi ses responsabilités, à un préposé doté d’une délégation de pouvoirs.


La délégation de pouvoirs est également utilisée en matière de gestion du personnel, et dans tous les domaines où la responsabilité pénale du chef d’entreprise peut être engagée.

A quoi sert la délégation de pouvoirs ?

La délégation de pouvoirs vous permet de confier à une personne compétente, en général un de vos proches collaborateurs, la mission de veiller personnellement et constamment à l’application des consignes de sécurité que vous avez édictées (dans des notes de service ou dans le règlement intérieur, par exemple).

Vous lui transférez ainsi vos pouvoirs, avec les moyens nécessaires pour remplir cette mission, mais aussi les responsabilités qui vont avec.

Dès lors, en cas d’infraction aux règles d’hygiène et de sécurité, cette délégation de pouvoirs vous évitera d’être mis en cause. On ne pourra pas vous reprocher de ne pas avoir pris les mesures d’hygiène ou de sécurité qui auraient permis d’éviter l’accident, puisque vous aviez délégué cette mission à un autre membre de l’entreprise, délégataire de vos pouvoirs.

En effet, une même infraction pénale ne peut pas être retenue à la fois contre vous et le titulaire de la délégation de pouvoirs.

Attention toutefois : pour que votre responsabilité ne soit pas mise en cause, la délégation de pouvoirs doit répondre à certaines règles.


Choisissez avec soin votre délégataire

Pour que la délégation de pouvoirs soit pertinente et efficace, vous devrez choisir une personne en qui vous avez confiance et qui possède certaines compétences. Il pourra s’agir, par exemple, d’un responsable de service, d’un chef de chantier, d’un conducteur de travaux, d’un responsable d’établissement ou d’atelier.

Préférez, dans la mesure du possible, une personne ayant une certaine ancienneté dans l’entreprise. Elle exercera ainsi sa mission en connaissance de cause, des lieux et des personnes. Elle aura la mémoire de ce qui s’est passé et de l’évolution des règles dans l’entreprise.

Par ailleurs, pour que la délégation soit valable, le délégataire doit réunir 3 conditions : autorité, compétence, moyens.

Ces 3 conditions sont cumulatives. En conséquence, lorsque l’une ou l’autre n’est pas remplie, la délégation de pouvoirs est nulle.

L’autorité.–Le délégataire doit avoir une autorité suffisante lui permettant d’accomplir sa mission. Il doit notamment disposer d’un pouvoir de commandement et d’une autorité hiérarchique afin de faire respecter les consignes relatives à l’hygiène, à la santé et à la sécurité.

De cette façon, le délégataire doit être en mesure de prendre des sanctions lorsqu’il constate un non-respect des règles de sécurité.

La compétence. –Elle est double : le délégataire doit posséder les connaissances techniques nécessaires à la réalisation de sa mission (adaptation des équipements de protection, connaissance des machines, etc.), mais aussi juridiques lui permettant une bonne compréhension des textes qu’il est chargé de faire respecter.

Vous devez vous assurer des compétences du délégataire, compte tenu notamment de son parcours professionnel ou en lui faisant suivre une formation appropriée.

Les moyens. Le délégataire doit disposer des moyens nécessaires pour exercer sa mission : budget, signature, pouvoir d’acheter du matériel, de l’outillage, des équipements de protection individuelle ou tout matériel qu’il estimerait nécessaire.

Ce budget peut être limité et vous pouvez conditionner les achats les plus importants à votre accord préalable.

Donnez-lui également les moyens de maintenir ses compétences en matière d’hygiène et sécurité au travail. Le délégataire devra veiller au suivi de ses connaissances dans ce domaine, pourra suivre les formations qu’il estime nécessaires ou s’abonner aux ouvrages et revues qui lui sont indispensables.

En cas d’absence de moyens, la délégation de pouvoirs est annulée et inefficace.


Mise en place de la délégation

Information du délégataire. – Lorsque vous déléguez vos pouvoirs, vous devez en informer très clairement le délégataire et lui faire connaître les responsabilités que la délégation fait naître, notamment en ce qui concerne les conséquences pénales.

Une acceptation formelle de sa part n’est pas obligatoire. Les juges s’attachent surtout à vérifier l’effectivité du transfert de pouvoirs. A l’inverse, vous ne pouvez pas imposer une délégation de pouvoirs à un salarié qui la refuse expressément.

Contenu de la délégation. – Si aucune forme ne s’impose en matière de délégation de pouvoirs, nous ne saurions que trop vous conseiller de la formaliser par écrit.

Elle doit être personnalisée et peut prendre, notamment, la forme d’un avenant au contrat de travail si la personne choisie fait déjà partie de l’entreprise, ou d’une clause insérée dans le contrat de travail en cas de recrutement.

Avant toute rédaction d’un écrit, prévoyez de vous entretenir avec le futur délégataire pour échanger vos points de vue sur cette délégation.

En tout état de cause, votre délégation de pouvoirs devra :

  • être précise (étendue et limites des pouvoirs, domaines et durée de la délégation, nom du délégataire) ;
  • indiquer les risques encourus par le délégataire sur les plans disciplinaire, civil et pénal, de manière à ce qu’il soit pleinement informé de son engagement ;
  • mentionner les raisons de cette délégation, les compétences et les moyens dont dispose le délégataire (puisqu’un tel acte n’est possible que si le délégataire qui reçoit les pouvoirs dispose de l’autorité, de la compétence et des moyens nécessaires pour assumer ses responsabilités).


Étendue et durée de la délégation. – Vous ne pouvez pas mettre en place une délégation générale ou illimitée dans le temps. Les juges annulent les délégations de pouvoirs transférant au délégataire un ensemble de missions dont l’étendue est trop importante, ou dont la durée ou la stabilité dans le temps est insuffisante ou, au contraire, trop longue.

Information des salariés. – Vous devez informer les salariés travaillant sous la responsabilité du délégataire. Rien n’est imposé quant à la façon de communiquer : vous pouvez tout aussi bien afficher une note de service, organiser une réunion, etc.

Important : la subdélégation de pouvoirs est admise. Le délégataire investi par le chef d’entreprise d’une mission précise dans un domaine particulier peut, à son tour, déléguer tout ou partie de ses attributions à une personne munie de l’autorité, des moyens et de la compétence nécessaires.

Cette formule peut être particulièrement utile en cas de travail en équipes, de nuit, le week-end, etc., c’est-à-dire dans toutes les situations de travail continu ne permettant pas au délégataire d’être présent à tout moment.



Pour plus de précisions sur la délégation de pouvoirs, les Editions Tissot vous proposent un extrait gratuit de leur ouvrage « Gérer le personnel ».


Article publié le 14 septembre 2009