Démission : un salarié embauché chez un autre employeur est-il démissionnaire ?

Publié le 19/06/2019 à 07:56, modifié le 21/06/2019 à 16:42 dans Rupture du contrat de travail BTP.

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La démission apparait souvent comme le mode de rupture du contrat de travail le plus « simple » à gérer pour les entreprises. Il faut toutefois bien s’attarder sur la volonté et le consentement du salarié pour ne pas risquer de devoir payer d’importantes indemnités !

Démission : elle ne peut être caractérisée que par une volonté claire et non équivoque

La démission est définie par la jurisprudence comme une manifestation claire et non équivoque du salarié de rompre son contrat de travail : elle ne se présume pas.

Elle n’est soumise à aucun formalisme, sauf lorsque des dispositions conventionnelles ou le contrat de travail en prévoit les modalités. Cela se traduit le plus souvent par la remise d’une lettre de démission. Pour des questions de preuve, il est d’ailleurs conseillé de demander au salarié un écrit.

Important
Les conventions collectives nationales des ouvriers et des cadres du Bâtiment et des Travaux Publics ne prévoient aucune formalité s’agissant de la démission. En revanche, pour les ETAM, la démission doit obligatoirement être donnée par écrit (CCN ETAM, art. 8-1).

Toutefois, après une analyse scrupuleuse des circonstances de la rupture, les juges déduisent parfois la volonté claire et non équivoque du comportement du salarié ou peuvent admettre une démission exprimée verbalement.

Le consentement du salarié doit être libre et éclairé et ne doit en aucun cas avoir été vicié. La démission ne pourra être retenue si le salarié a fait l’objet de violences morales de la part de son employeur ou si sa volonté de démissionner était altérée par son état psychologique. Cela peut être le cas du salarié qui agit sous le coup de la colère ou qui annonce verbalement sa démission suite à une altercation avec son supérieur hiérarchique.

Lorsque le contrat est rompu alors que la volonté claire et non équivoque de démissionner n’est pas caractérisée, cette rupture s’analysera comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Démission : l’embauche au sein d’une autre société ne suffit pas toujours !

La Cour de cassation considère en principe que l’engagement au service d’un autre employeur caractérise la volonté claire et non équivoque de démissionner. Cela a par exemple été reconnu pour un salarié qui ne reprend pas le travail après un arrêt maladie et conclut un contrat de travail chez un autre employeur, ou encore pour un salarié qui refuse son reclassement sur un site voisin et se fait embaucher dans une autre société sans en informer son ancien employeur.

Toutefois, si le départ du salarié est causé par le comportement de l’employeur, la démission ne sera pas validée par les juges.

Dans une récente affaire soumise à la Cour de cassation, une société avait cessé de rémunérer son salarié plombier qui a donc cherché du travail auprès d’un autre employeur : elle a estimé que cette nouvelle embauche s’analysait comme une démission. La Cour de cassation a considéré que le fait que le salarié a cherché un autre emploi lorsque son employeur a cessé de lui verser son salaire en raison de la perte du chantier sur lequel il était affecté, ne caractérisait pas une volonté claire et non équivoque de démissionner. Le comportement de l’employeur était à l’origine du départ du salarié : la démission ne peut donc être reconnue.

Vous vous posez des questions sur les formalités qui vous incombent en cas de démission d’un salarié ? Les Editions Tissot vous conseillent leur documentation « Social Bâtiment ».


Cour de cassation, chambre sociale, 9 mai 2019, n° 18-12.545 (pas de volonté claire de démissionner s’agissant d’un salarié qui cherche un autre emploi une fois que son employeur cesse de le payer)

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Camille Kriegel

Juriste droit social en cabinet d'expertise comptable

Master 2 Droit social interne, européen et international - Université de Strasbourg