Difficulté d’interprétation d’une convention collective : 3 étapes à respecter
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Dans certains cas, la bonne compréhension des dispositions de la convention collective peut être délicate, ce qui aboutit parfois à des litiges. A l'occasion d'une affaire jugée dans un contexte de transfert d'entreprise, la Cour de cassation rappelle la marche à suivre en cas de difficulté d'interprétation d'un texte conventionnel.
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Essayer gratuitement pendant 30 joursJe me connecteUn désaccord sur les dispositions de la convention collective suite à un transfert d'entreprise
Une salariée travaillait depuis 1988 pour un établissement spécialisé au sein duquel elle occupait, depuis 2014, un emploi d'éducatrice coordinatrice.
L'année suivante, son contrat de travail avait été transféré à une association, soumise à la convention collective des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées. La salariée avait alors été reclassée dans l'emploi d'animateur de première catégorie, coefficient 679, de la nouvelle convention collective.
Revendiquant le bénéfice du coefficient 762, la salariée avait saisi les prud'hommes.
Les premiers juges avaient donné gain de cause à la salariée, en appliquant les dispositions de la nouvelle convention collective qui prévoit qu'au bout de 28 ans d'ancienneté, le coefficient applicable est de 762.
L'employeur était en désaccord avec le raisonnement des juges. Pour lui, le nouveau coefficient de l'intéressée devait être déterminé en fonction du salaire perçu jusqu'à l'application de la nouvelle convention collective, et non en fonction de son ancienneté dans l’emploi initial.
Conventions collectives : pour la bonne compréhension du texte, une méthode en 3 étapes
Saisie à son tour, la Cour de cassation s'est ralliée au raisonnement de l'employeur.
La Cour rappelle d'abord les dispositions applicables. La convention collective des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées (art. 38) prévoit que « l'embauchage à chacun des emplois définis en annexes à la présente convention est prononcé, en principe, sur la base du salaire de début.
Quand il résultera d'une mesure d'avancement, il sera tenu compte obligatoirement de la majoration d'ancienneté acquise par le salarié.
Le classement dans le nouvel emploi sera alors prononcé à la majoration d'ancienneté correspondant au salaire égal ou, à défaut, immédiatement supérieur à celui dont l'intéressé bénéficiait dans son précédent emploi. En outre, lorsque cet avancement ne lui procurera pas une augmentation supérieure à celle résultant de l'avancement normal dans l'ancien emploi, l'intéressé conservera dans son nouvel échelon de majoration d'ancienneté, l'ancienneté qu'il avait acquise dans l'échelon de son ancien emploi, à concurrence de la durée moyenne exigée ».
La Cour de cassation rappelle ensuite qu'une convention collective, si elle manque de clarté, doit être interprétée :
- d'abord comme la loi, c'est-à-dire d'abord en respectant la lettre du texte ;
- ensuite en tenant compte d'un éventuel texte législatif ayant le même objet ;
- et en dernier recours, en utilisant la méthode téléologique consistant à rechercher l'objectif social du texte.
Or la Cour souligne que le Code du travail prévoit que le reclassement du salarié dont le contrat de travail a été transféré doit se faire à la majoration d'ancienneté correspondant au salaire égal ou, à défaut, immédiatement supérieur à celui dont l'intéressé bénéficiait dans son précédent emploi.
Dans cette affaire, les juges du fond auraient donc dû déterminer le coefficient applicable à la salariée sur le salaire perçu et non sur son ancienneté.
L'affaire devra donc être rejugée.
Cour de cassation, chambre sociale, 8 juin 2022, n° 20-20.100 (une convention collective, si elle manque de clarté, doit être interprétée comme la loi, c'est-à-dire d'abord en respectant la lettre du texte, ensuite en tenant compte d'un éventuel texte législatif ayant le même objet et, en dernier recours, en utilisant la méthode téléologique consistant à rechercher l'objectif social du texte)
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