Discipline : une lettre de reproches constitue-t-elle un avertissement empêchant le licenciement ?

Publié le 24/05/2021 à 07:32 dans Sanction et discipline.

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En matière disciplinaire, il est une règle impérative à connaître : « une faute = une sanction ». En effet, vous ne pouvez en aucun cas sanctionner deux fois les mêmes faits. Un courrier de reproches envoyé à votre salarié peut-il constituer une sanction vous empêchant par la suite de le licencier ?

L’un de mes salariés ne correspond pas du tout aux attentes du poste qu’il occupe et je souhaite donc mettre un terme à son contrat de travail. Je lui ai récemment écrit un courrier afin de lui détailler ce qui ne convient pas et de lui expliquer que si cela continue, je serais contraint de le licencier. Mais puis-je le licencier sans risque ? Le courrier que je lui ai remis peut-il être assimilé à une sanction disciplinaire, alors même que cela n’était pas du tout mon intention lorsque je l’ai envoyé ?

Comme évoqué, vous ne pouvez prononcer qu’une seule sanction pour les mêmes faits fautifs. Ainsi, pour la même faute, vous ne pouvez pas prononcer un blâme suivi d’un licenciement. Vous devez choisir une seule sanction.

Discipline : qu’en est-il de la lettre de reproches adressée à un salarié avant un licenciement ?

Une lettre de reproche peut-elle constituer un avertissement vous empêchant ensuite de licencier votre salarié ? La Cour de cassation s’est déjà prononcée sur un tel courrier.

Dans l’affaire soumise à son appréciation, une salariée contestait le licenciement pour insuffisance professionnelle. Elle avait déjà reçu de son employeur un courrier de reproches dans lequel celui-ci lui reprochait une insuffisance professionnelle, un comportement indélicat et un abus de confiance. Il l’invitait par la même occasion à changer radicalement de comportement faute de quoi une procédure de licenciement serait initiée. Selon elle, il ne pouvait alors pas la licencier car la lettre de reproches constituait une sanction disciplinaire et les mêmes faits ne pouvaient alors pas faire l’objet d’une seconde sanction, à savoir le licenciement intervenu.

L’employeur, quant à lui, considérait que le courrier envoyé à la salariée n’était que le compte-rendu d’un entretien au cours duquel il avait fait état à sa salariée de divers reproches et lui avait demandé de rectifier son comportement sous peine de sanction à venir.

Discipline : la lettre de reproches constituait-t-elle une sanction disciplinaire selon la Cour de cassation ?

OUI, la Cour considère qu’un tel courrier de l’employeur, lequel formule des reproches précis à la salariée, l'invite instamment à changer radicalement et sans délai de comportement sous peine de licenciement disciplinaire, constitue un avertissement.

Ainsi, les faits, déjà sanctionnés par cette lettre constituant un avertissement, ne pouvaient plus justifier un licenciement ultérieur, même pour insuffisance professionnelle. Le licenciement est donc, dès lors, dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Ainsi, lorsque vous envoyez un courrier à votre salarié, soyez extrêmement vigilant dans sa rédaction. Mesurez les propos qui y sont tenus afin qu’ils ne puissent pas s’apparenter à une sanction disciplinaire. Pour qu’il ne soit pas considéré comme une sanction disciplinaire, le courrier ne doit pas caractériser votre volonté de sanctionner les faits. Dans le cas contraire, votre pouvoir disciplinaire sera considéré comme étant épuisé et aucune sanction disciplinaire, fondée sur le même motif, ne pourra être appliquée.

Les Editions Tissot vous proposent un modèle de lettre pour un 1er avertissement que vous pouvez retrouver également dans la nouvelle documentation « Tissot Social Entreprise ACTIV ».

Lettre d'avertissement

Cour de cassation, chambre sociale, 6 novembre 2019, n° 18-20.268 (formuler dans une lettre des reproches précis au salarié et l'invitant à changer radicalement et sans délai son comportement sous peine de licenciement disciplinaire constitue un avertissement. Les faits ainsi sanctionnés ne peuvent plus justifier un licenciement ultérieur, même pour insuffisance professionnelle)