Documents de fin de contrat : leur remise peut s’analyser en un licenciement injustifié

Publié le 28/11/2023 à 16:00, modifié le 29/11/2023 à 15:00 dans Rupture du contrat de travail.

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Bien qu’indispensable, la remise des documents de fin de contrat est une formalité qui ne doit pas être accomplie par anticipation ou lorsqu’aucune procédure de rupture n’a été engagée au préalable. Auquel cas, cette délivrance pourra produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Illustration avec une affaire récente marquée par la non homologation d’une convention de rupture conventionnelle.

Remise des documents de fin de contrat : un timing précis à respecter

L’expiration d’un contrat de travail vous astreint, en toutes circonstances, à délivrer au salarié concerné ses documents de fin de contrat, à savoir :

  • son certificat de travail ;

  • son attestation Pôle emploi ;

  • son solde de tout compte.

Pour mémoire, ces documents présentent, en principe, un caractère quérable et non portable. C’est-à-dire que vous n’êtes pas dans l’obligation de les transmettre directement au salarié. Vous devez simplement les tenir à sa disposition et lui permettre de venir les retirer.

Dès lors, cette formalité actant le départ effectif du salarié, elle doit être mise en œuvre à compter de la fin du contrat de travail, préavis inclus (accompli ou non).

Faites donc preuve de vigilance sur le timing de votre démarche. En effet, la jurisprudence considère qu’une délivrance anticipée peut s’analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Cela signifie que, dans le cadre d’une rupture conventionnelle, cette mise à disposition ne peut pas être envisagée si votre demande d’homologation est en cours d’instruction ou que celle-ci a été rejetée.

Rappel

Pour produire ses effets, une convention de rupture conventionnelle doit être homologuée par l’inspection du travail. L’autorité administrative dispose, à cette fin, d’un délai d’instruction de 15 jours ouvrables. Son silence gardé au-delà vaut décision implicite d’homologation.

Dans une récente décision, la Cour de cassation a naturellement indiqué que cette conséquence était transposable à l’hypothèse où la demande d’homologation n’avait pas été transmise à l’inspection du travail.

Rupture conventionnelle non homologuée : la remise des documents de fin de contrat peut acter la rupture du contrat de travail

Dans l’affaire présentée à la Cour de cassation, un employeur et un salarié avaient conclu une convention de rupture conventionnelle le 26 janvier 2016. Sa prise d’effet était alors fixée au 3 mars 2016.

Seulement, ladite convention n’a jamais été transmise à l’inspection du travail pour homologation.

Le 3 mars 2016, l’employeur remet tout de même au salarié ses documents de fin de contrat.

Ce dernier saisit le juge prud’homal. Estimant que sa relation de travail avait perduré jusqu’au 30 septembre 2016, il sollicite un rappel de salaire pour une période allant de cette date au 4 mars 2016.

Il obtient gain de cause à hauteur d’appel. Arguant du fait que la convention de rupture n’avait pas été homologuée, les juges du fond considèrent que la relation de travail avait pu se poursuivre au-delà du 3 mars 2016.

L’employeur forme alors un pourvoi en cassation.

Selon lui, la rupture du contrat de travail :

  • était intervenue le 3 mars 2016, date à laquelle il avait remis au salarié ses documents de fin de contrat ;

  • produisait, de ce fait, les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

A son sens, la cour d’appel aurait dû rechercher si cette remise des documents de fin de contrat avait effectivement eu lieu à cette date.

La Cour de cassation accueille favorablement l’argument de l’employeur et casse la décision d’appel.

L’affaire est renvoyée. Les juges du fond devront déterminer si l’employeur avait bel et bien délivré les documents de fin de contrat au salarié le 3 mars 2016 et si, en conséquence, la rupture était intervenue à cette date.

Pour vous accompagner dans l’établissement des documents de fin de contrat, les Editions Tissot vous proposent leur documentation « Tissot Social Entreprise ACTIV ».

Cour de cassation, chambre sociale, 15 novembre 2023, n° 22-17.048 (en se déterminant ainsi, sans rechercher si l'employeur avait remis les documents de fin de contrat au salarié le 3 mars 2016 et si la rupture du contrat de travail n'était pas survenue à cette date en conséquence, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision)

Portraits Tissot 046 2023 Gilles Piel 2

Axel Wantz

Juriste en droit social et rédacteur au sein des Editions Tissot