Forfait jours : faut-il forcément appliquer la rémunération minimale prévue par la convention collective ?

Publié le 01/10/2018 à 07:45 dans Conventions collectives.

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S'appuyer sur un texte conventionnel est indispensable pour recourir au forfait jours. Ce texte définit les catégories de salariés concernés, et peut retenir à cet égard divers critères de sélection. Exemple récent avec une convention collective conditionnant le forfait jours à une rémunération minimale.

Recourir au forfait jours en respectant les conditions posées par sa convention collective

Parmi les mécanismes qui vous permettent d'opérer un décompte particulier de la durée du travail de vos salariés, la convention de forfait est en bonne place. Qu'elle soit en heures ou en jours, cette convention fixe une durée du travail différente de la durée légale ou conventionnelle, sur la base d'un forfait établi sur la semaine, le mois ou l'année.

Pour certaines catégories de salariés (ex : ceux qui disposent d’une autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps), le forfait jours permet ainsi de prévoir une durée du travail exprimée en jours sur l’année. Le salarié doit donner son accord et signer une convention individuelle de forfait.

Le salarié en forfait jours doit travailler un certain nombre de jours dans l'année : en principe, 218 jours au maximum, sachant qu'un accord collectif d'entreprise ou d'établissement (ou, à défaut, une convention collective ou un accord de branche) peut fixer un nombre de jours de travail inférieur à 218.

Pour vous, l'intérêt est que le salarié n'est pas soumis au respect des durées maximales quotidienne et hebdomadaire de travail. En revanche, vous devez continuer de lui appliquer les règles relatives aux repos quotidien et hebdomadaire, ainsi qu'aux congés payés.

Important
Il vous faut également respecter des mesures propres à garantir la santé et la sécurité de ce salarié sous peine de voir la convention de forfait remise en cause.

Un accord collectif est indispensable pour pouvoir recourir au forfait jours. En pratique, à défaut d'accord collectif sur ce thème dans votre entreprise, vous devez vous référer à votre convention ou votre accord de branche. Celui-ci fixe les conditions de recours au forfait jours, et notamment les catégories de salariés susceptibles de signer ce type de convention.

Conventions collectives : le recours au forfait jours peut être subordonné à une condition de rémunération minimale

Un salarié avait été engagé en qualité de directeur, niveau I, 1er échelon, coefficient 510, selon une convention de forfait fixant la durée annuelle de travail à 218 jours. Suite à son licenciement, le salarié avait saisi les prud'hommes pour obtenir le paiement de diverses sommes, estimant que l'employeur n'avait pas respecté les « minima sociaux ».

La convention collective applicable était la convention collective du personnel salarié des cabinets d’avocats. L'article 6 de son avenant n° 57 du 25 juin 1999 relatif au temps de travail prévoit que : « Les cadres de niveau I, coefficients 510 et 560 jouissent d'un degré élevé d'autonomie du fait de leur fonction ou de leurs responsabilités (…..). Ne sont concernés que les cadres dont la rémunération globale brute est supérieure d'au moins 50 % au salaire minimum conventionnel du coefficient ».

Le contrat de travail de l'intéressé stipulait bien qu’il était un cadre autonome rémunéré au forfait jours, forfait impliquant, au sens de la convention collective applicable, une rémunération mensuelle minimale. Or, l'employeur n'avait pas respecté cette rémunération minimale conventionnelle. Pour les juges du fond, le fait que l'employeur n'ait pas respecté cette rémunération plancher ne permettait pas de retenir que les stipulations de la convention collective ne s'appliquaient pas au salarié. L'employeur aurait donc dû verser au salarié une rémunération conforme aux minima prévus par la convention collective.

Mais la Cour de cassation, saisie à son tour de l'affaire, ne l'a pas entendu ainsi. Pour elle, il résulte du texte conventionnel que seuls les cadres de niveau I, coefficients 510 et 560, dont la rémunération globale brute est supérieure d'au moins 50 % au salaire minimum conventionnel du coefficient, sont susceptibles de conclure une convention de forfait en jours.

Par conséquent, si les salariés qui ne bénéficient pas d'un tel niveau de rémunération ne peuvent être valablement soumis à une convention de forfait en jours, la rédaction de l’article ne fait pas non plus obligation à l'employeur d'assurer à ces cadres un tel niveau de rémunération.


Cour de cassation, chambre sociale, 28 juin 2018, n° 16-28.344 (le salarié soumis à un forfait jours dont la rémunération n’atteint pas le salaire minimum prévu par la convention collective ne peut pas obtenir de rattrapage de salaire si son forfait jours n’est pas valable)