Forfait jours : mise en œuvre effective du suivi de la charge de travail prévu par l’accord collectif

Publié le 11/10/2024 à 11:43 dans Temps de travail.

Temps de lecture : 4 min

Un accord collectif qui détermine les modalités de l’évaluation et du suivi régulier de la charge de travail du salarié ne suffit pas pour garantir la validité d’une convention de forfait en jours. En effet, il faut également assurer la mise en œuvre de ces dispositions conventionnelles.

Forfait jours : un accord collectif qui garantit la protection de la santé et de la sécurité du salarié

Les forfaits jours sont mis en place par accord d’entreprise ou, à défaut, par accord de branche (convention collective).

Cet accord collectif détermine notamment :

  • les catégories de salariés susceptibles de conclure une convention individuelle de forfait ;
  • la période de référence du forfait (année civile ou autre période de 12 mois) ;
  • les conditions de prise en compte, pour la rémunération, des absences, les départs et les arrivées en cours de période.

Il doit également assurer la préservation de la santé et la sécurité des salariés en forfait jours. Pour cela, l’accord collectif doit préciser :

  • les modalités de l’évaluation et du suivi régulier de la charge de travail assurés par l’employeur ;
  • les modalités de communication périodique sur la charge de travail, l’articulation entre l’activité professionnelle et la vie personnelle, la rémunération et l’organisation du temps de travail ;
  • les modalités de l’exercice du droit à la déconnexion. 

Bon à savoir

Les conventions individuelles de forfait en jours conclues sur le fondement d’un accord collectif défaillant ne sont pas systématiquement nulles. Mais, il vous revient de sécuriser le dispositif en mettant en place un suivi effectif et régulier de la charge de travail (Code du travail, art. L. 3121-65).

Forfait jours : mise en œuvre effective de l’accord collectif

Un accord collectif qui précise bien les modalités de l’évaluation et du suivi régulier de la charge de travail, ainsi que celles sur la communication périodique sur la charge de travail n’est toutefois pas suffisant. 

En effet, ces dispositions conventionnelles ne permettent pas, à elles seules, de garantir que vos conventions individuelles de forfait jours ne soient pas annulées.

Prenons l’exemple de l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 2 octobre 2024. La salariée était soumise à une convention de forfait en jours en application de la convention collective de commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire. Elle demandait notamment le paiement d’heures supplémentaires. Mais sa demande est rejetée par la cour d’appel notamment parce qu’elle a échoué à démontrer que son temps de travail excédait les prescriptions de son forfait jours.

L’affaire arrive devant la Cour de cassation.

Première information à retenir de cette décision :  les nouvelles dispositions de la convention collective nationale de commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire assurent la garantie du respect de la durée raisonnable de travail ainsi que des repos journaliers et hebdomadaires. 

Rappel

Les dispositions sur le forfait jours de cette convention avaient été modifiées par un avenant du 17 septembre 2015 suite à un arrêt rendu par la Cour de cassation le 4 février 2015. En effet, elle avait jugé que les dispositions de la convention collective n’étaient pas de nature à garantir que l'amplitude et la charge de travail restent raisonnables et, donc, à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié. Conséquence : les conventions de forfait jours établies en application de ces dispositions conventionnelles étaient nulles. 

Concernant le rejet de la demande de paiement des heures supplémentaires, la Cour de cassation reproche à la cour d’appel de ne pas avoir recherché si l’employeur avait bien mis en œuvre les dispositions de la convention collective.

En effet, il ne suffit pas d’avoir un accord collectif qui répond aux obligations imposées par le Code du travail pour être garanti de la validité de ses conventions de forfaits jours. Il faut également appliquer les dispositions de l’accord collectif. A défaut, les conventions de forfait seront nulles.  

Vous souhaitez en savoir plus sur la mise en place, le suivi et l’application des forfait jours ? Nous vous proposons notre documentation « Gérer le personnel ACTIV ».

Cour de cassation, chambre social, 2 octobre 2024, n° 22-16.519 (un accord collectif qui assure la garantie du respect de la durée raisonnable de travail ainsi que des repos journaliers et hebdomadaires d'un salarié soumis à une convention de forfait en jours n’est pas suffisant pour garantir la validité de cette convention)

Isabelle Vénuat

Juriste en droit social et rédactrice au sein des Editions Tissot