Forfaits jours : vos obligations en matière de protection de la santé impliquent parfois d'aller au-delà de votre convention collective !

Publié le 12/07/2021 à 07:09 dans Conventions collectives.

Temps de lecture : 4 min

Contenu ancien

Il se peut que les informations contenues dans cet article et les liens ne soient plus à jour.

Tout employeur de salariés en forfait jours sait qu'il doit respecter scrupuleusement les dispositions conventionnelles relatives à la protection de la santé des salariés. Mais parfois, ce n'est pas suffisant. Devant les tribunaux, les juges mettent régulièrement hors jeu les dispositions de certaines conventions collectives, estimant qu'elles ne vont pas assez loin en la matière.

Conventions collectives : un suivi effectif et régulier du temps de travail des salariés en forfait jours

Un salarié, directeur de restaurant sous convention de forfait jours, avait saisi les prud'hommes. Il réclamait notamment la nullité de son forfait jours.

Au cœur du litige, se trouvait la question du respect de durées raisonnables de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires. Le salarié estimait en effet que l'employeur n'avait pas rempli ses obligations en la matière.

Notez-le
La protection de la sécurité et de la santé des salariés en forfait jours est un impératif pour tout employeur, qui doit notamment s'assurer :
- que la charge de travail du salarié est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail ;
- de la bonne articulation entre l'activité professionnelle du salarié et sa vie personnelle.

En pratique, c'est la convention collective ou l'accord collectif applicable qui organise les modalités de ce contrôle. Les juges sont intransigeants : ils exigent un suivi effectif et régulier du temps de travail, qui doit permettre à l'employeur de remédier, en temps utile, à une durée de travail qui ne serait pas raisonnable.

Conventions collectives : un litige mettant en scène le forfait jours dans la restauration rapide

Dans cette affaire, c'était la convention collective de la restauration rapide (art. 33.5.2) qui s'appliquait. Celle-ci prévoit un certain nombre de dispositions concernant le suivi de la charge de travail du salarié, dont notamment les points suivants :

le cadre autonome établit pour chaque mois un document précisant à titre prévisionnel les jours de travail à réaliser et les jours de repos en les qualifiant de repos hebdomadaire, congés payés, jours fériés chômés ou jours de repos liés au forfait ;

  • il doit communiquer à la fin de chaque mois à sa hiérarchie le planning de travail qu'il a suivi au titre du mois considéré (...) ;
  • il est organisé avec la hiérarchie un point semestriel, laquelle veille, lors de ce suivi, aux éventuelles surcharges de travail et au respect des durées maximales de travail, des amplitudes journalières et hebdomadaires et des durées minimales de repos ;
  • un document annuel de contrôle faisant apparaître le nombre de jours travaillés et le nombre de jours de repos est établi ;
  • un entretien annuel est organisé entre le cadre autonome et son supérieur hiérarchique.

Conventions collectives : dans la restauration rapide, des dispositions insuffisantes à assurer la protection de la santé des forfaits jours

Contre toute attente, cela s'est avéré insuffisant pour les juges d'appel, dont la décision est validée par la Cour de cassation. Les juges soulignent qu'il résulte des dispositions conventionnelles :

  • d'une part, que la durée du travail des cadres jouissant d'une grande indépendance dans l'organisation et l'exercice de leur mission est incontrôlable et ne peut valablement se décompter que par journées de travail ;
  • d'autre part, que l'accomplissement de leur mission par ces cadres doit s'inscrire dans une maîtrise des temps pour laquelle l'entreprise et le cadre concerné ont un rôle à jouer par un effort conjoint d'organisation.

Pour les juges, de telles dispositions ne permettent pas à l'employeur de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable. Elles ne sont donc pas de nature à garantir que l'amplitude et la charge de travail restent raisonnables et à assurer une bonne répartition, dans le temps, du travail du salarié.

Par conséquent, le forfait jours conclu en application de cette convention collective était nul.


Cour de cassation, chambre sociale, 16 juin 2021, n° 19-20.582 (les dispositions conventionnelles concernant le forfait jours, qui ne permettent pas à l'employeur de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable, et qui de fait ne sont pas de nature à garantir que l'amplitude et la charge de travail restent raisonnables et à assurer une bonne répartition, dans le temps, du travail du salarié, sont nulles)