Harcèlement moral : sous quel délai un salarié peut-il l’invoquer ?

Publié le 04/11/2019 à 07:58, modifié le 18/11/2019 à 09:57 dans Sécurité et santé au travail.

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Le harcèlement moral est de plus en plus dénoncé par les salariés. Mais, vous vous demandez quel est le délai de prescription en la matière ? Des faits remontants à une dizaine, voire une vingtaine d’années peuvent-ils vous être reprochés ? Sachez tout d’abord que le délai de prescription diffère selon que le tribunal saisi par le salarié est le conseil de prud’hommes ou le tribunal correctionnel.

Un de mes salariés a saisi la justice car il estime être moralement harcelé par son supérieur hiérarchique depuis de nombreuses années. Dans son argumentaire, il parle de faits qui remontent à une vingtaine d’années. Mais quel est le délai de prescription en la matière ? Peut-on me reprocher des faits si anciens ?

Harcèlement moral : des agissements répétés

Rappelons tout d’abord que le harcèlement moral se caractérise par des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail d’un salarié, susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel (Code du travail, art. L. 1152-1).

De ce fait, un acte isolé ne permet pas de caractériser le harcèlement moral. Ce qui n’est pas le cas du harcèlement sexuel. Pour autant, un fait unique mais répété peut caractériser une situation de harcèlement moral.

Harcèlement moral : le délai de prescription

Si l’un de vos salariés s’estime victime de harcèlement moral, deux possibilités s’offrent à lui : il peut saisir le conseil de prud’hommes ou la justice pénale. Toutefois, il doit le faire dans un certain délai suivant la survenance des faits. En effet, la prescription des faits est de 5 ans devant le juge prud’homal (prescription civile) et de 6 ans devant le tribunal correctionnel (en matière pénale).

Le délai de prescription débute en principe à compter du jour où les faits (ou l’infraction) ont été commis.

Toutefois, comme nous l’avons précisé, le harcèlement moral se caractérise par des agissements répétés qui peuvent s’étaler sur une longue période. Dans un tel cas, l’infraction s’étale donc dans le temps et n’a pas lieu à un instant donné. Dès lors, la question suivante se pose quant au délai de prescription : sous quel délai un salarié peut-il saisir la justice pour des faits de harcèlement moral ?

La Cour de cassation a récemment répondu à cette interrogation et a précisé le point de départ du délai de prescription lorsqu’un salarié est victime de harcèlement moral.

Arrêt de la Cour de cassation, chambre criminelle, 19 juin 2019, n° 18-85.725

Selon elle, la prescription ne commence à courir, pour chaque acte de harcèlement incriminé, qu’à partir du dernier.

Autrement dit, pour vérifier que le délai de prescription n’est pas expiré, le juge se place à la date du dernier fait invoqué par le salarié.

Cela signifie que le salarié peut invoquer des faits qui sont beaucoup plus anciens, dès lors que le dernier commis et reproché se situe dans le délai de prescription. Ainsi, si les faits se sont déroulés sur une période de 10 ou encore de 15 ans, dès lors que le dernier fait reproché s’est produit depuis moins de 6 ans, alors le salarié peut les invoquer en matière pénale.

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Cour de cassation, chambre criminelle, 19 juin 2019, n° 18-85.725 (la prescription ne commence à courir, pour chaque acte de harcèlement incriminé, qu'à partir du dernier)