Instaurer la modulation du temps de travail : entre souplesse et contraintes

Publié le 19/03/2007 à 00:00, modifié le 11/07/2017 à 18:20 dans Temps de travail.

Temps de lecture : 6 min

Contenu ancien

Il se peut que les informations contenues dans cet article et les liens ne soient plus à jour.

La modulation du temps de travail permet d’ajuster au mieux le volume horaire des salariés à celui de l’activité de l’entreprise. Si ce mécanisme, qui ne peut être mis en place que par accord collectif, apporte une certaine souplesse, la gestion annuelle des horaires peut être lourde. Focus sur ce mécanisme à double tranchant.

Votre activité tend à être de plus en plus variable sur l’année et vous avez du mal à mettre en adéquation votre carnet de commandes fluctuant et les horaires de travail de vos salariés. Ils accumulent les heures supplémentaires ? Il vous est parfois arrivé d’avoir recours au chômage partiel ?

La modulation du temps de travail peut vous apporter la souplesse dont vous avez besoin. Mais sa mise en place peut être longue et complexe.


Ajuster les horaires de travail à l’activité

La modulation permet de faire varier l’horaire hebdomadaire ou mensuel de travail des salariés en fonction de l’activité de l’entreprise. Vous pouvez ainsi éviter les heures supplémentaires en cas d’activité intense ou le chômage partiel lors d’une baisse d’activité.

La modulation vous permet de fixer l’horaire de travail hebdomadaire en dessous ou au-dessus des 35 heures (de 0 heure à 48 heures), mais sans jamais dépasser la durée légale annuelle de 1.607 heures.

Attention : vous ne pouvez pas, en tout état de cause, faire travailler les salariés plus de 10 heures par jour et 48 heures par semaine (ou 44 heures sur 12 semaines consécutives).

A noter : l’accord de modulation peut prévoir un plafond inférieur à 1.607 heures.


La modulation doit être négociée

Les représentants du personnel (comité d’entreprise et comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou, à défaut, délégués du personnel) doivent être consultés préalablement, pour avis, sur votre projet de modulation.

Il est possible que votre convention collective ou qu’un accord de branche étendu prévoie la mise en œuvre de la modulation.

Si ce n’est pas le cas, vous devrez négocier l’accord avec les délégués syndicaux.

Une fois l’accord conclu, il est communiqué pour information aux salariés et à l’inspection du travail. Il est ensuite affiché dans l’entreprise.


Quel contenu pour l’accord de modulation ?

Certains éléments sont obligatoires :

  • le champ d’application de l’accord : services et salariés concernés (il est possible d’appliquer la modulation aux contrats précaires) ;
  • les éléments économiques et sociaux motivant la mise en place de la modulation ;
  • le calendrier et les modalités de la mise en œuvre de la modulation, par service concerné ; il s’agit ici d’anticiper la fluctuation de l’activité de l’entreprise ;
  • le programme indicatif de la répartition du temps de travail pour chacun des services ou ateliers concernés, ainsi que les règles permettant d’établir ce programme ;
  • les modalités du recours au chômage partiel pour les heures hors modulation ;
  • la durée maximale du travail sur une semaine ;
  • l’incidence de l’absence et de la rupture du contrat de travail sur la rémunération des salariés et leurs droits à repos compensateurs.


Comment payer les salaires ?

Vous pouvez choisir entre deux systèmes :
  • soit payer les heures réellement effectuées : un tel système facilite la gestion des paies, notamment au regard des absences, mais il est indéniablement défavorable au salarié, dont le salaire variera avec les horaires de la modulation ;
  • soit lisser la rémunération sur l’année : le salarié perçoit un salaire identique chaque mois, mais la gestion des absences devient plus compliquée.

Le lissage n’étant pas automatique, il doit être prévu dans l’accord de modulation.

Lorsqu’elle est lissée, la rémunération est basée sur l’horaire hebdomadaire moyen de la modulation.


Qu’en est-il des heures supplémentaires ?

Dans le cadre de la modulation, les heures supplémentaires sont celles effectuées :
  • au-delà du plafond hebdomadaire de modulation, elles sont payables en fin de mois ;
  • au-delà de 1.607 heures par an (déduction faite des heures supplémentaires déjà payées en cours d’année).

Le contingent légal d’heures supplémentaires « libres », c’est-à-dire pour lesquelles vous n’êtes pas obligé d’obtenir une autorisation de l’inspecteur du travail, est de :
  • 220 heures/an, si l’horaire de modulation varie entre 31 et 39 heures par semaine ou s’il ne comporte pas plus de 70 heures/an au-delà de 35 heures hebdomadaires ;
  • 130 heures/an en cas de modulation de plus forte amplitude.

Les heures supplémentaires sont soumises aux bonifications, majorations et repos compensateurs légaux ou conventionnels.

Attention : les conventions et accords de branche peuvent prévoir un contingent inférieur d’heures supplémentaires.


La difficile gestion des absences

Lorsque la rémunération est lissée, l’absence du salarié peut poser des difficultés. Il se peut en effet que le salaire versé ne corresponde pas aux heures réellement travaillées.

Cette question se pose :
  • à la fin du mois pour calculer le salaire mensuel ;
  • à la fin de l’année (ou en fin de période de modulation si elle ne correspond pas à l’année civile) pour régulariser le salaire en fonction de la durée annuelle de travail du salarié ;
  • ou lors de la rupture du contrat en cours d’année.

La réponse à apporter varie selon la nature de l’absence.

Nature de l’absence A la fin du mois A la fin de l’année
Absences non rémunérées pour convenances personnelles
Déduction mensuelle des heures non effectuées, sur la base du nombre d’heures de travail prévu par l’horaire de modulation du mois considéré.
Régularisation en fin d’année si la déduction mensuelle n’a pas été faite, en tenant compte du nombre d’heures annuellement effectuées.
Absences pour raisons médicales
Indemnisation du salarié sur la base de l’horaire moyen fixé par l’accord, peu importe que l’absence du salarié corresponde à une période de haute ou de basse activité. Régularisation en fin d’année : calcul du nombre d’heures effectuées et déduction des jours d’absence sur la base :
  • du nombre d’heures réellement travaillées par les autres salariés pour les périodes de haute activité ;
  • de l’horaire moyen fixé par l’accord ou du nombre d’heures réellement travaillées par les autres salariés pour les périodes de basse activité.
Congés payés
si le salarié a travaillé pendant toute la période de référence, les congés sont rémunérés sur la base de l’horaire moyen fixé par l’accord de modulation.
si le salarié n’a pas travaillé pendant toute la période de référence (n’a pas acquis tous ses droits à congé), une régularisation est opérée en fin de période au regard des heures de travail réellement effectuées.
Embauche en cours d’année
Régularisation en fin d’année au regard des heures réellement effectuées :
  • nombre d’heures supérieures au salaire versé : versement au salarié d’un rappel de salaire correspondant ;
  • rémunération supérieure aux heures réellement effectuées : remboursement des sommes trop perçues par le salarié.

Possibilité de prévoir que le salarié sera rémunéré en fonction des heures réellement effectuées, jusqu’à la prochaine période de modulation.
Départ en cours d’année
Régularisation en fin de contrat au regard des heures réellement effectuées :
  • nombre d’heures supérieures au salaire versé : versement au salarié d’un rappel de salaire correspondant ;
  • rémunération supérieure aux heures réellement effectuées : remboursement des sommes trop perçues par le salarié.

Attention : en cas de départ résultant d’un licenciement économique, le salarié conserve le trop-perçu.