L'employeur peut-il réduire une prime prévue par la convention collective si le salarié ne prévient pas suffisamment tôt de son absence ?
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Conventions collectives : une prime de performance individuelle versée sous conditions
Un salarié, travaillant au sein d'une entreprise de sécurité en tant qu'agent d'exploitation de sûreté aéroportuaire, avait saisi les prud'hommes.
Parmi ses demandes, le salarié sollicitait un rappel de salaire au titre d'une prime de performance individuelle (PPI), prévue par la convention collective applicable. Il s'agissait de la convention collective des entreprises de prévention et de sécurité, qui indique (art. 3-06 de l'annexe VIII) :
« Il est versé une prime individuelle de performance représentant en moyenne 1 demi-mois de salaire brut de base par an pour un salarié de performance satisfaisante et présent 1 année complète. Son attribution est effectuée selon les critères obligatoirement définis par chaque entreprise avant le début de chaque année. Ces critères peuvent notamment être : assiduité, ponctualité, résultats aux tests internes à l'entreprise, résultats aux tests des services officiels, relationnel client-passagers, attitude au poste et présentation de la tenue (...).
Compte tenu de la variété des situations, des contextes, des contraintes et donc des paramètres d'appréciation, les modalités et conditions plus précises d'attribution de cette prime devront être fixées au sein de chaque entreprise et, le cas échéant, pour chaque site aéroportuaire ».
Conventions collectives : une prime minorée lorsque le salarié ne prévient pas en avance de son absence ?
Dans cette affaire, le salarié s'était vu privé d'une partie de sa PPI sur une journée. Concrètement, suite à une absence le 12 décembre, l'employeur avait opéré sur la prime des retenues en appliquant les critères définis au sein de l'entreprise. Il s'agissait, d'une part, d'une retenue de 30 % au titre d'une absence injustifiée, et d'autre part, de 10 % en raison du fait que le salarié n'avait pas prévenu de son absence.
Cependant, pour le salarié, il ne s'agissait pas d'une absence, mais d'un retard. Le 12 décembre, il aurait en effet dû prendre son service à 4 heures 05. Or, le salarié faisait valoir qu'en raison d'une confusion dans sa lecture des plannings, il n'avait pris son poste qu'à 5 heures 25, pour travailler jusqu' à 12 heures 25. Pour le salarié, il s'agissait donc d'un simple retard, ne justifiant pas la retenue opérée par l'employeur sur sa prime.
Par conséquent, le salarié estimait qu'il s'agissait là d'une sanction pécuniaire prohibée.
Conventions collectives : un des critères d'attribution de la prime peut être un délai de prévenance minimal du salarié en cas d'absence
Les juges du fond avaient rejeté la demande du salarié. Ils avaient estimé que le fait de prévoir que l'un des critères d'attribution de la prime à hauteur de 10 % correspond à un délai de prévenance du salarié suffisamment tôt avant son absence ne constitue pas une sanction pécuniaire prohibée. De surcroît, les juges avaient souligné que c'est la réalisation de l'ensemble des critères validés qui permet d'acquérir 100 % de la prime PPI.
Enfin, les juges avaient relevé que, alors que le salarié prétendait avoir seulement été en retard le 18 décembre, il apparaissait en réalité qu'il n'avait pas effectué, comme il l'aurait dû, les missions qui lui revenaient ce jour-là.
Pour les juges, il s’agissait donc bien d'une absence injustifiée sur une planification pour un client déterminé, une telle absence pouvant entraîner une retenue sur prime selon les critères fixés par l'employeur.
La Cour de cassation a suivi les juges du fond. Elle constate qu'il ressort des critères d'attribution de la prime de performance individuelle que « les agents qui auront systématiquement prévenu de leur absence et ce au moins une heure avant leur prise de service acquerront 10 % de la PPI ».
Pour la Cour, le fait de prévoir que l'un des critères d'attribution de la prime à hauteur de 10 % correspond à un délai de prévenance du salarié suffisamment tôt avant son absence, ne constitue pas une sanction pécuniaire prohibée.
Cour de cassation, chambre sociale, 12 novembre 2020, n° 18-18.841 (le fait de prévoir que l'un des critères d'attribution d’une prime conventionnelle à hauteur de 10 % correspond à un délai de prévenance du salarié suffisamment tôt avant son absence, ne constitue pas une sanction pécuniaire prohibée au sens de l'article L. 1331-2 du Code du travail)
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