L’insubordination peut-elle justifier le licenciement ?
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Qu’est-ce que l’insubordination ?
Votre salarié est tenu d’effectuer les tâches et missions relevant de ses compétences et attributions. Il est tenu de se soumettre à vos directives. A défaut, vous pouvez prendre à son encontre une mesure disciplinaire, laquelle peut aller jusqu’au licenciement, afin de faire cesser le trouble.
Or, de la relation contractuelle qui vous unit à votre salarié, découle un lien de subordination. Vos salariés sont donc tenus d’accomplir les tâches et missions que vous leur confiez. En tant qu’employeur, vous possédez le pouvoir de direction auquel est soumis tout salarié.
Relève de l’insubordination, le fait de refuser d’être soumis à l’autorité de quelqu’un, dans votre cas, votre salarié refuse de se soumettre à votre autorité ou à celle de son supérieur hiérarchique.
La Cour de cassation considère que l’insubordination peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement et peut même, selon les circonstances qui l’entourent, constituer une faute grave.
Ainsi, les hauts juges ont déjà retenu la faute grave à l’encontre d’un salarié qui faisait obstruction à toutes les demandes de son employeur (Cour de cassation, chambre sociale, 11 octobre 2000, n° 98-41.183).
Pour pouvoir prononcer un licenciement pour faute grave, le refus de votre salarié doit être réitéré.
Lors de l’évaluation du degré de la faute, vous devez donc, comme pour tout licenciement, juger la situation dans son ensemble : quelle est l’importance du refus ? Dans quelles circonstances est-il intervenu (conflit avec le supérieur, situation familiale compliquée, etc.) ? Quelle est l’ancienneté du salarié et quel est son passif disciplinaire ? Est-il coutumier du fait ? Est-ce la première fois que cela arrive ? ... Prenez le temps d’échanger avec votre salarié, peut-être que son refus découle de sa peur de ne pas y arriver ou d’un sentiment d’urgence. En effet, il n’y a pas toujours, dans le comportement de votre salarié, une réelle volonté de s’opposer à son supérieur hiérarchique ou au pouvoir de direction.
Toutefois, retenez que toutes les situations de désobéissance ne constituent pas nécessairement une insubordination pouvant légitimer une éviction définitive de votre salarié. En effet, un salarié qui refuse d’effectuer une tâche ou une mission qui ne relève pas de ses compétences et attributions ne peut être sanctionné pour insubordination.
A partir de quand l’insubordination est-elle caractérisée ? Le fait de vous dire non justifie-t-il le licenciement ?
Tout refus d’accomplir une tâche ou toute désobéissance peuvent-ils caractériser une insubordination pouvant justifier un licenciement ?
Les tâches et les missions que vous demandez à votre salarié d’accomplir doivent relever, comme évoqué, de ses compétences et attributions.
Cela signifie qu’il peut refuser d’effectuer toute mission qui ne relève pas de celles-ci. Dans un tel cas, vous ne pouvez en aucun cas rompre son contrat de travail en le licenciant pour insubordination.
Face à un tel comportement, avant de prendre votre décision, posez-vous impérativement la question qui suit : la tâche demandée à mon salarié relève-t-elle de ses compétences et attributions ?
Pour répondre à cette question, reprenez le contrat de travail de votre salarié, sa fiche de poste et la convention collective applicable à la relation contractuelle qui vous unit.
Selon la réponse, la solution à apporter ne sera pas la même :
- la mission confiée relève des compétences et attributions du salarié : le refus caractérisé et volontaire de votre salarié relève de l’insubordination. Vous pouvez alors sanctionner son comportement et aller jusqu’à prononcer un licenciement ;
- la tâche demandée dépasse le champ des compétences et attributions de l’intéressé : aucune faute ne peut alors être reprochée à votre salarié, et ce, même si l’intéressé acceptait auparavant d’accomplir cette mission. Si vous le licenciez quand même, une telle rupture du contrat de travail est considérée par les juges comme étant dépourvue de cause réelle et sérieuse (Cour de cassation, chambre sociale, 4 avril 2001, n° 98-45.934).
Bien entendu, votre salarié peut également valablement refuser d’accomplir une tâche, sans qu’aucune faute ne puisse lui être reprochée, dans les circonstances suivantes :
- la tâche à accomplir nécessite d’enfreindre la loi ;
- la mission confiée nécessite d’utiliser du matériel défectueux ;
- les conditions de travail sont dangereuses. Face à un danger grave et imminent, votre salarié est en droit d’exercer son droit de retrait ;
- la tâche à accomplir peut mettre en danger la sécurité d’autrui ;
- pour des raisons de santé lorsque le médecin du travail a émis un avis d’aptitude avec réserves.
Insubordination : illustrations
Justifient un licenciement pour cause réelle et sérieuse (faute légère ou simple), les faits suivants : le refus de votre salarié d’effectuer un travail inhabituel de courte durée qui ne remet pas en cause sa qualification.
Ont, par ailleurs, été jugés comme relevant de la faute grave, les faits suivants :
- le fait de faire systématiquement obstruction aux demandes de l’employeur ;
- le fait de refuser, de manière réitérée, d’exécuter une tâche qui relève tout à fait des fonctions et de la qualification ;
- le comportement désinvolte lequel est accompagné d’un refus du pouvoir de direction de l’employeur.
Les faits que vous reprochez à votre salarié relève de l’insubordination ? Vous pouvez donc initier à son encontre une mesure de licenciement.
Bien entendu, veillez à respecter scrupuleusement la procédure adéquate de licenciement ou de sanction (car si ce refus constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement, vous pouvez opter pour une sanction moins drastique telle qu’une mise à pied disciplinaire). En tous cas, consultez votre convention collective afin de vérifier les dispositions relatives au licenciement.
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