Licenciement d’un salarié protégé : procédure sous haute surveillance

Publié le 17/09/2007 à 00:00, modifié le 11/07/2017 à 18:20 dans Licenciement.

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Quel que soit son motif (économique ou personnel), le licenciement d’un salarié protégé répond à une procédure stricte visant à empêcher toute discrimination. Savez-vous exactement qui est concerné ? Connaissez-vous la procédure à suivre ? Un dossier à connaître sur le bout des doigts pour éviter des sanctions lourdes…
Qui sont les salariés protégés ?

Les catégories de salariés bénéficiant de la protection particulière en cas de licenciement sont les suivantes :

Salariés protégés Durée de la protection
Délégués du personnel, membres du comité d’entreprise (CE), du CHSCT, représentants syndicaux au CE
– Durée du mandat
– 6 mois à partir du dépôt de candidature aux élections
– 6 mois après expiration du mandat (cas particulier pour les représentants syndicaux : avoir été désigné depuis 2 ans)
Délégués syndicaux
– Durée du mandat
– Dès connaissance par l’employeur de la désignation
– 12 mois après cessation des fonctions (sous réserve d’avoir été désigné depuis 1 an)
Salariés ayant demandé l’organisation d’élections professionnelles
6 mois à compter de la demande
Conseillers prud’homaux
– Durée du mandat
– 3 mois à compter de la publication des candidatures *
– 6 mois après l’expiration du mandat
Conseillers du salarié (chargés d’assister d’autres salariés licenciés dans les entreprises n’ayant pas de représentants du personnel)
Durée d’inscription sur la liste départementale des conseillers
Salariés mandatés par les syndicats pour négocier un accord d’entreprise ou un accord sur la réduction du temps de travail
Durée du mandat
Représentants des salariés en cas de procédure collective
Durée du mandat
Administrateurs des caisses de Sécurité sociale
Durée du mandat

* Cette durée sera de 6 mois à compter des prochaines élections prud’homales, c’est-à-dire en 2008.

La procédure s’applique également en cas de mise à la retraite ou de refus d’une modification du contrat de travail.
Convoquer le salarié à un entretien préalable

Que le licenciement envisagé soit d’ordre économique ou personnel, vous devez dans un premier temps convoquer le salarié à un entretien préalable.

La convocation doit respecter le même formalisme que pour le licenciement d’un salarié classique (préciser clairement qu’un licenciement est envisagé et que le salarié peut se faire assister, délai de 5 jours entre la convocation et l’entretien, etc.).

L’entretien se déroule ensuite comme pour n’importe quel autre salarié.


Consulter le comité d’entreprise

Lorsqu’il existe, le comité d’entreprise doit être consulté sur tout projet de licenciement :
  • d’un délégué du personnel ;
  • d’un membre du CE ou du CHSCT ;
  • d’un représentant syndical au CE ;
  • d’un candidat aux fonctions de représentant élu du personnel ou de représentant syndical au CE ;
  • d’un délégué du personnel ou membre du CE institué conventionnellement ;
  • d’un représentant des salariés dans une procédure collective ;
  • d’un ancien représentant élu.

En revanche, il n’a pas à être consulté pour les autres catégories de salariés protégés (se reporter au tableau ci-dessus).

L’avis du CE est recueilli dans le cadre d’une réunion ordinaire ou extraordinaire. Vous devez convoquer les membres et leur faire parvenir l’ordre du jour de la réunion 3 jours avant celle-ci. Attention, un délai de convocation plus long peut être prévu par votre convention collective ou le règlement intérieur de l’entreprise.

Le salarié protégé doit participer à la réunion, vous devez donc également le convoquer (son absence, malgré votre convocation, n’entraînera pas la nullité de la procédure).

A l’issue de la réunion, l’avis du CE est consigné dans le procès-verbal qui doit être transmis à l’inspecteur du travail en même temps que la demande d’autorisation de licenciement. Cet avis n’est que consultatif. Ainsi, même un avis défavorable n’a pas de conséquence directe sur le reste de la procédure.


Demander une autorisation à l’inspecteur du travail

Vous devez demander à l’inspecteur du travail, par lettre recommandée avec accusé de réception, l’autorisation de licencier le salarié protégé.

Délai. Cette demande doit être faite dans les 15 jours suivant la délibération du CE. En l’absence de CE ou si sa consultation n’est pas obligatoire, aucun délai minimal n’est prévu par la loi.

Contenu. La demande doit préciser le(s) mandat(s) dont le salarié est titulaire et les motifs du licenciement envisagé. Vous devrez y joindre le procès-verbal de la réunion du CE.

Enquête. L’inspecteur du travail doit ensuite procéder à une enquête contradictoire, au cours de laquelle le salarié peut se faire assister, le cas échéant, d’un représentant de son syndicat.

L’inspecteur vérifie la régularité de la procédure et la réalité du motif de licenciement. En cas de licenciement pour faute, les faits doivent être d’une gravité suffisante pour justifier le licenciement. Il doit aussi s’assurer que le licenciement n’est pas lié au mandat du salarié et qu’il n’est pas de nature à porter atteinte à la représentation des salariés dans l’entreprise.

Réponse de l’inspecteur. Il dispose d’un délai de 15 jours, à compter de la réception de votre demande, pour prendre une décision. Il peut prolonger ce délai pour les besoins de l’enquête. En tout état de cause, l’absence de réponse dans un délai de 2 mois équivaut à un refus.

Sa décision vous est notifiée, ainsi qu’au salarié et à son organisation syndicale lorsqu’il s’agit d’un délégué syndical ou d’un représentant syndical.

En cas de réponse positive de l’inspecteur, n’oubliez pas la dernière étape de la procédure : notifier le licenciement au salarié.

Attention :
  • en cas de licenciement pour motif disciplinaire, vous n’avez que 1 mois pour envoyer la notification au salarié ;
  • en cas de licenciement pour motif économique, n’oubliez pas d’informer la direction départementale du Travail dans les 8 jours de l’envoi de la lettre de licenciement.
En l’absence de comité d’entreprise, l’inspecteur du travail est saisi directement pour autoriser le licenciement.
Attention aux cas particuliers !

Mise à pied conservatoire. Si le salarié a commis une faute d’une telle gravité que sa présence dans l’entreprise n’est plus possible et que vous avez décidé de le placer en mise à pied conservatoire, vous devez faire parvenir la demande d’autorisation à l’inspecteur du travail dans les 48 heures de la consultation du CE (en l’absence de CE, la demande doit être envoyée dans les 8 jours suivant la mise à pied).

Le délai dans lequel l’inspecteur doit vous répondre est par ailleurs réduit à 8 jours.

Convention de reclassement personnalisé. En cas de licenciement économique, au moment de l’entretien préalable, vous devez proposer au salarié de bénéficier d’une convention de reclassement personnalisé (CRP) (ou d’un congé de reclassement si votre entreprise compte plus de 1.000 salariés).

Salarié en contrat à durée déterminée (CDD). Si vous envisagez de rompre le CDD d’un salarié protégé avant son terme en raison d’une faute grave, la procédure à suivre est la même que pour un salarié en CDI.

En revanche, si tout se passe normalement, n’oubliez pas que vous êtes tenu de saisir l’inspecteur du travail 1 mois avant l’échéance du contrat, afin que celui-ci puisse constater que le salarié n’a pas fait l’objet d’une mesure discriminatoire (en cas de non-proposition d’un CDI par exemple).


Les recours possibles

Si vous n’êtes pas d’accord avec la décision de l’inspecteur du travail, vous pouvez la contester.

Pour cela, plusieurs types de recours sont possibles :
  • le recours gracieux, par lequel vous avez la possibilité de demander à l’inspecteur du travail de revoir sa position ;
  • le recours hiérarchique, fait auprès du ministre du Travail, qui dispose alors d’un délai de 4 mois pour vous répondre (une absence de réponse dans ce délai équivaut à une confirmation de la décision de l’inspecteur) ;
  • le recours contentieux, auprès du tribunal administratif.

Il est possible d’engager un recours gracieux en même temps qu’un recours hiérarchique, voire contentieux.

Chacun de ces recours doit être fait dans un délai de 2 mois après réception de la décision que vous souhaitez contester.


Quelles sanctions ?

Si vous ne respectez pas la procédure ou si l’autorisation de l’inspecteur du travail est annulée à la suite d’un recours, le salarié pourra :
  • imposer sa réintégration dans l’entreprise (avec rappel de salaires pour la période couverte par la nullité) ;
  • ou demander des indemnités de rupture (indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, de préavis, etc.).
De plus, vous seriez passible du délit d’entrave, puni d’une amende de 3.750 euros pouvant aller jusqu’à 1 an d’emprisonnement.