Licenciement d’un salarié en arrêt maladie : justifié par la désorganisation de l’entreprise
Temps de lecture : 4 min
Contrairement aux idées reçues, vous pouvez procéder au licenciement de votre salarié en arrêt maladie, non du fait de son état de santé, mais par la situation objective de l’entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l’absence prolongée ou les absences répétées du salarié. Attention toutefois à la garantie d’emploi conventionnelle pour les ouvriers.
Ce contenu est réservé aux abonnés à l'Actualité Premium
À partir de 9,90€ / moisProfitez pleinement de l'ensemble de l'actualité des Éditions Tissot : tous les articles payants, le déblocage des dossiers de synthèses à télécharger et les archives des newsletters.
Essayer gratuitement pendant 30 joursJe me connecteAbsence prolongée pour maladie : un motif de licenciement confirmé à plusieurs reprises
Vous ne pouvez pas licencier un salarié en raison de son état de santé sous peine de commettre une discrimination (Code du travail, art. L. 1132-1).
En revanche, si la maladie d’un de vos salariés entraîne des absences répétées ou une absence prolongée, les tribunaux admettent qu’il est possible de le licencier à une double condition :
- son absence perturbe le bon fonctionnement de l’entreprise (par exemple, par une surcharge de travail qui pèse sur les autres salariés, par des erreurs ou retards qui ont pu survenir, etc.) ;
- cette perturbation entraîne la nécessité de pourvoir à son remplacement définitif.
Dans une décision récente, la Cour de cassation vient confirmer qu’un salarié peut être licencié pendant son arrêt maladie si et seulement si son absence vient désorganiser le fonctionnement de l’entreprise et pas seulement celui du service auquel était affecté ledit salarié.
Or, en l’espèce la lettre de licenciement visait uniquement la désorganisation, non de l’entreprise, mais du service auquel appartenait le salarié.
Cette justification n’est donc pas suffisante pour que le licenciement ait une cause réelle et sérieuse.
Vous devez donc dans une telle hypothèse démontrer dans la lettre de licenciement que cette absence désorganise l’entreprise et invoquer ensuite les conséquences sur le service. Si le service qui connaît des troubles importants est essentiel au fonctionnement de l'entreprise, le licenciement pourra se justifier.
Une exception dans le BTP : la garantie d’emploi pendant 90 jours pour les ouvriers
Cette garantie d’emploi prévue dans les conventions collectives du BTP des ouvriers vous interdit de licencier votre salarié ouvrier pendant cette période de 90 jours.
Vous devez donc être très vigilant.
Vous pouvez procéder au licenciement de votre salarié en arrêt maladie si vous êtes contraint de le remplacer avant la date présumée de son retour. Mais ce licenciement ne pourra intervenir que si la durée totale de l'absence est supérieure à 90 jours au cours de la même année civile.
Votre salarié bénéficiera alors d'une priorité de réembauche pendant un délai qui ne peut pas dépasser :
- soit 3 mois après la fin de l'incapacité résultant de la maladie ou de l'accident ;
- soit la fin du chantier pour lequel il a été embauché, si celle-ci survient avant l'expiration de ces 3 mois.
Pour en bénéficier, votre salarié devra vous informer par écrit de cette volonté de bénéficier de cette priorité de réembauche.
De votre côté, vous avez l’obligation de l’avertir dès qu'un emploi correspondant à ses aptitudes sera disponible.
Notez le
Des règles particulières sont prévues concernant l’indemnité de préavis (pour les ETAM) et la période d’indemnisation de la maladie (pour les cadres). Les cadres bénéficient d'une période de mise en disponibilité pendant laquelle le licenciement n'est pas possible.
Pour vous aider à réaliser votre licenciement sans embûche, nous vous proposons un modèle extrait de notre documentation « Modèles commentés pour la gestion du personnel du BTP » :
Le cas de la faute grave
Vous pouvez également licencier votre salarié en arrêt maladie s'il a commis une faute caractérisée de grave (absence non justifiée dans les délais, abandon de poste etc.) ou bien s’il ne respecte pas ses obligations pendant son arrêt maladie tel que l’envoi d'un arrêt de travail tardif malgré les mises en demeure de justifier de l'absence ou s’il travaille pour un autre employeur durant son arrêt, c’est-à-dire le cas d’un manquement de loyauté.
Le licenciement est possible également s’il a commis une faute grave avant son arrêt maladie et si la procédure disciplinaire a été engagée avant l'arrêt maladie.
Important
Le licenciement pendant l’arrêt maladie doit donc être utilisé avec précaution. Les juges interprètent très strictement cette possibilité. Ils vérifient l’absence de discrimination du fait de l’état de santé du salarié et font une fine lecture et analyse de la lettre de licenciement.
Cour de cassation, chambre sociale, 6 juillet 2022, n° 21-10.261 (la perturbation du seul fonctionnement du service auquel appartient un salarié en raison de son absence prolongée ou répétée, ne peut justifier son licenciement)
Juriste en droit social pour une entreprise du Bâtiment
- Salarié en état d’ivresse sur un chantier : une faute grave ?Publié le 21/03/2023
- Détournement de carburant : une cause de licenciement !Publié le 08/11/2022
- Abandon de poste : bientôt assimilé à une démission ?Publié le 04/10/2022
- Licenciement disciplinaire : attention au délai pour agir !Publié le 05/07/2022
- Lettre de licenciement : fixe-t-elle réellement les limites du litige ?Publié le 15/06/2022