Quel type de contenu souhaitez-vous chercher ?

Lorsqu'un accord collectif est dénoncé et pas remplacé, les salariés doivent-ils conserver le bénéfice de pauses rémunérées ?

Publié le 07/11/2022 à 10:05 dans Conventions collectives.

Temps de lecture : 4 min

Le mécanisme de maintien des avantages individuels acquis, qui a, depuis août 2016, laissé place au principe du maintien de la rémunération, fait encore parler de lui devant les tribunaux. C'est ce que montre une affaire jugée récemment par la Cour de cassation au sujet de temps de pause rémunérés.

Conventions collectives : un temps de pause rémunéré qui passe de 40 à 30 minutes

Un accord d'entreprise sur la réduction du temps de travail avait été conclu au sein d'une société d’équipementier automobile en 2000. En application de cet accord, certaines catégories de salariés bénéficiaient d'une pause rémunérée de 40 minutes.

L'accord avait été dénoncé au mois de décembre 2013, sans être suivi par un accord de substitution. Il avait cessé de produire ses effets le 1er avril 2015. A compter de cette date, l'employeur avait unilatéralement instauré un temps de pause payé d'une durée de 30 minutes.

Notez le

Jusqu'au 8 août 2016, lorsqu'un texte conventionnel cessait d'être applicable (ex : en cas de dénonciation), les salariés conservaient certains droits (« avantages individuels acquis ») si aucun accord n’avait été conclu en remplacement dans un délai de 15 mois (préavis de 3 mois + délai de survie de 12 mois).

La loi travail du 8 août 2016 a supprimé cette notion d'avantages individuels acquis pour la remplacer par une logique de conservation de la rémunération versée. Désormais, en cas d’extinction du texte conventionnel et d’échec de la négociation de substitution ou d’adaptation, les salariés conservent, en application du texte conventionnel dénoncé, un certain niveau de rémunération.

Dans cette affaire, 12 salariés avaient saisi la juridiction prud'homale pour demander un rappel de salaire au titre des 10 minutes de pause rémunérées qui leur avaient été supprimées, les 40 minutes de pause constituant selon eux un avantage individuel acquis.

Pour justifier sa décision, l'employeur soulignait qu'à la suite de la dénonciation de l'accord de 2000, il avait défini l'horaire collectif de travail prévoyant un temps de pause rémunéré de 30 minutes par jour. Par conséquent, le principe de la rémunération du temps de pause avait été maintenu, seule la durée du temps de pause ayant été modifiée. Pour l'employeur, cette nouvelle organisation du temps de travail ne privait donc les salariés d'aucun avantage individuel acquis.

Conventions collectives : le temps de pause rémunéré constitue un avantage individuel acquis

Mais les premiers juges n'avaient pas été sensibles à l'argumentaire de l'employeur. Ils avaient donné gain de cause aux salariés et condamné l'employeur à leur verser un rappel de salaire au titre des temps de pause sur la période comprise entre le mois d'avril 2015 et le mois de mars 2020.

La décision des juges a été validée par la Cour de cassation, qui les approuve d'avoir rappelé que le niveau et la structure de la rémunération, tels qu'ils résultent d'une convention ou d'un accord collectif dénoncés, constituent, à l'expiration du délai de 15 mois, un avantage individuel acquis incorporé au contrat de travail des salariés. Il ne s'agit pas d'un avantage collectif dont le maintien serait incompatible avec le respect par l'ensemble des employés de l'organisation du temps de travail décidée par l'employeur.

Par conséquent, c'est à juste titre que les juges ont décidé que les salariés étaient fondés à revendiquer le bénéfice de la rémunération du temps de pause journalier de 40 minutes tel qu'il leur était reconnu jusqu'au mois de mars 2015, date à laquelle l'accord sur le temps de travail du 26 septembre 2000 avait cessé de produire ses effets. L'employeur ne pouvait pas leur opposer sa décision unilatérale ramenant à 30 minutes le temps de pause payé.


Cour de cassation, chambre sociale, 28 septembre 2022, n° 21-15.268 (est un avantage individuel acquis, un avantage qui, au jour de la dénonciation de la convention ou de l'accord collectif, procurait au salarié une rémunération ou un droit dont il bénéficiait à titre personnel et qui correspondait à un droit déjà ouvert et non simplement éventuel)