Manquement à l’obligation de sécurité de résultat : l’attitude du salarié victime peut-elle amoindrir la responsabilité de l’employeur ?
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J’ai embauché une salariée en tant que consultante au sein de mon entreprise située dans le Sud de la France. Quelques années après son embauche, je lui ai proposé de partager son temps de travail pour moitié en région parisienne et pour moitié dans le Sud de notre pays avec des déplacements ponctuels, ce que la salariée a accepté. Quelques mois plus tard, elle m’a informé des conséquences des trajets sur sa vie personnelle et sa santé qui n’étaient plus supportables et avait exprimé l’urgence de trouver une solution. Faute de réaction de ma part et après plusieurs arrêts de travail successifs, la salariée a sollicité la résiliation judiciaire de son contrat de travail (rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur) devant les juges. |
En tant qu’employeur, vous devez impérativement prendre toutes les mesures nécessaires permettant d’assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de vos salariés (Code du travail, art. L. 4121–1). Il s’agit d’une obligation de sécurité de résultat. Si vous manquez à cette obligation, votre responsabilité peut alors être engagée.
Votre salariée a également des obligations en matière de sécurité et de santé : il lui incombe de prendre soin, en fonction de sa formation et selon ses possibilités, de sa santé et de sa sécurité ainsi que de celles des autres personnes concernées par ses actes ou ses omissions au travail (Code du travail, art. L. 4122–1).
Mais, lorsqu’un dommage survient, le comportement du salarié ne peut pas amoindrir votre responsabilité et par conséquent limiter l’indemnisation financière de la victime.
Cela est sans incidence sur le principe même de votre responsabilité d’employeur si vous manquez à votre obligation de sécurité.
Dans une récente affaire, les juges ont pu reconnaître la responsabilité de l’employeur en relevant que des certificats médicaux attestaient des conséquences des conditions de travail d’une salarié sur sa santé, son employeur étant manifestement fautif pour n’avoir pas pris en compte les risques d’une situation qu’il connaissait car dénoncée par la salariée.
L’employeur souhaitait voir sa responsabilité limitée du fait de l’attitude de la salariée qui avait concouru au dommage en acceptant un risque qu’elle dénonçait dans le même temps.
Or, pour la Cour de cassation, les obligations des travailleurs dans le domaine de la sécurité et de la santé au travail n’affectent pas le principe de responsabilité d’un employeur.
Ainsi, dès lors qu’il est avéré que vous avez manqué à votre obligation de sécurité, l’éventuel comportement ou faute de la victime, ne peut en aucun cas être invoqué pour limiter votre responsabilité et atténuer l’indemnisation financière.
Carole Anzil, juriste en droit social
Cour de cassation, chambre sociale, 10 février 2016, n° 14–24.350 (les obligations des travailleurs dans le domaine de la sécurité et de la santé au travail n’affectent pas le principe de responsabilité de l’employeur)
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