Manquement aux règles de sécurité : peut-on licencier un salarié titulaire d’une délégation de pouvoirs ?

Publié le 15/07/2016 à 07:27, modifié le 11/07/2017 à 18:28 dans Sécurité et santé au travail BTP.

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L’employeur, titulaire d’une obligation de veiller à la santé et la sécurité de ses salariés, peut déléguer cette responsabilité à un ou plusieurs membres de son personnel. Toutefois, lorsque le salarié, en charge de la sécurité et titulaire d’une délégation de pouvoirs, est défaillant dans ses missions, quels sont les moyens dont dispose l’employeur ? La Cour de cassation vient d’apporter la réponse.

Délégation de pouvoirs : possibilité de licencier pour faute grave en cas de non-respect des règles de sécurité

Dans le cas soumis à la Cour de cassation, un responsable d’affaire avait la responsabilité de plusieurs salariés et bénéficiait à ce titre d’une délégation de pouvoirs.
Dans ce cadre, il avait affecté un salarié à des travaux en hauteur sans appliquer les mesures de protection nécessaires pour assurer sa sécurité. Or, ce dernier a été victime d’un accident du travail en chutant d’une échelle.
De ce fait, l’employeur a décidé de procéder au licenciement pour faute grave du responsable d’affaire.

En désaccord avec cette décision, le salarié a saisi la juridiction prud’homale en invoquant 2 arguments principaux :

  • tout d’abord, la reconnaissance d’une faute grave suppose que l’employeur intervienne dans un délai restreint à compter de la connaissance des faits fautifs, or en l’espèce il avait attendu un mois ;
  • par ailleurs, la faute grave s’apprécie en fonction de l’ancienneté (40 ans en l’espèce), de la qualité de son travail, et de son attitude tout au long de sa collaboration dans l’entreprise.

La Cour de cassation rejette ces arguments. Selon elle, lorsqu’un salarié titulaire d’une délégation de pouvoirs manque aux règles de sécurité, son maintien dans l’entreprise devient impossible. Le salarié n’a aucune possibilité de s’exonérer de sa responsabilité et il est donc possible de procéder à son licenciement pour faute grave.

Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, 11 mai 2016, n° 14–26.285 (pdf | 6 p. | 64 Ko)

Cette analyse suppose néanmoins que la délégation de pouvoirs attribuée au salarié soit parfaitement conforme à la règlementation. Il est donc important de veiller les conditions de validité de la délégation de pouvoir.

Délégation de pouvoirs : conditions de validité

La délégation de pouvoirs permet à un employeur de déléguer à un salarié tout ou partie de son obligation de sécurité.

Notez-le
La délégation de pouvoir doit être acceptée par le salarié et, à titre probatoire, peut être insérée dans le contrat de travail ou dans un avenant à celui-ci.

Pour être valable, plusieurs conditions doivent être remplies :

  • le délégataire doit tout d’abord avoir la compétence, c’est-à-dire les connaissances techniques pour analyser une situation de travail, évaluer les risques et connaitre la règlementation relative à la santé, sécurité et aux conditions de travail ;
  • le délégataire doit également avoir l’autorité, ce qui implique une position dans l’entreprise lui permettant de faire respecter les règles de sécurité, et en cas de manquement, de sanctionner les salariés concernés ;
  • enfin, le délégataire doit avoir les moyens matériels et financiers, ce qui signifie qu’il doit pouvoir engager des dépenses afin d’assurer le respect de la règlementation en vigueur et qui entre dans le champ de sa délégation.

Pour vous tout savoir sur la portée d’une clause de délégation de pouvoirs, les Editions Tissot vous conseillent leur documentation « Sécurité des chantiers du BTP illustrée ».

Cour de cassation, chambre sociale, 11 mai 2016, n° 14–26.285 (constitue une faute grave le fait d’affecter un salarié placé sous sa responsabilité à des travaux en hauteur sans appliquer les mesures de protection nécessaires pour assurer sa sécurité)