Non acquisition de congés payés durant un arrêt maladie : l’Etat condamné

Publié le 17/05/2016 à 08:00, modifié le 06/03/2020 à 12:32 dans Congé, absence et maladie.

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Le Code du travail ne permet pas d’acquérir de congés payés pendant un arrêt maladie non professionnelle. Cette disposition n’est pas conforme à une directive européenne. Le tribunal administratif de Clermont-Ferrand vient d’engager la responsabilité de l’Etat et le condamne à indemniser un salarié à hauteur du nombre de jours de congés payés perdus par rapport aux 4 semaines minimum prévues par la directive.

Acquisition des congés payés : définition

La durée du congé est de 2,5 jours ouvrables par mois de travail effectif, soit 30 jours ouvrables (5 semaines) pour une année de travail complète.

Le décompte des mois de travail s’opère en tenant compte de la durée de travail effectif. Une période de 4 semaines ou 24 jours de travail est assimilée à un mois de travail effectif pour la détermination de la durée des congés payés (Code du travail, art. L. 3141–4).

Sauf disposition conventionnelle plus favorable, les périodes d’absence doivent être décomptées. Toutefois, le Code du travail assimile certaines périodes à un temps de travail effectif. Il s’agit notamment des :

  • congés payés de l’année précédente ;
  • congé de maternité, de paternité et d’adoption ;
  • suspensions du contrat pour accident du travail ou maladie professionnelle dans la limite d’une durée ininterrompue d’un an (Code du travail, art. L. 3141–5).
Notez-le
La Cour de cassation reconnait que l’absence du travailleur pour cause d’accident de trajet est assimilée à une absence pour cause d’accident du travail.

Acquisition des congés payés : contradiction avec la directive européenne sur l’aménagement du temps de travail

Le Code du travail n’assimile pas les absences pour maladie à du temps de travail effectif pour l’acquisition de jours de congés payés.

Le problème est que la Directive européenne sur l’aménagement du temps de travail (art. 7) pose le principe que les travailleurs ont droit à un congé annuel d’au moins égal à 4 semaines. Elle ne distingue pas les travailleurs absents en raison d’un arrêt maladie pendant la période de référence et ceux qui ont effectivement travaillé.

Seulement la directive n’a pas d’effet direct en droit français. Elle ne peut pas être invoquée par un salarié contre un employeur afin de bénéficier de l’acquisition de congés payés pendant un arrêt maladie. Pour cela, la directive doit être transposée en droit français.

C’est dans ce but qu’un salarié a engagé une action en responsabilité contre l’Etat pour non-transposition de la directive.

Ce salarié a été en arrêt maladie pendant 7 mois. En application de disposition conventionnelle, 2 mois d’arrêt ont été pris en compte pour le calcul de ses droits à congés payés. 5 mois n’ont pas été pris en compte. Il saisit le tribunal administratif afin que l’Etat français soit condamné à indemniser son préjudice subi en raison de l’absence de transposition de la directive.

Le salarié a obtenu gain de cause. Le tribunal a condamné l’Etat à réparer le préjudice subi équivalent à la perte de jours de congés payés correspondant à la différence entre la période minimale de congé annuel prévue par la directive, soit 4 semaines, et le nombre de jours de congé annuel que son employeur lui a accordés.

Notez-le
Rendue en 1re instance, cette décision est susceptible de faire l’objet d’un recours. De plus, à l’heure actuelle, aucune modification du Code du travail n’est envisagée sur le sujet. Y aura-il d’autres salariés qui engageront la responsabilité de l’Etat ? Affaire à suivre !

Pour plus de précision sur les congés payés (calcul, période de référence, travail effectif, fractionnement, etc.), les Editions Tissot vous conseillent leur documentation « Gestion du personnel simplifiée ».

Note de service sur l’ordre des départs en congés payés et les plannings


Tribunal administratif de Clermont-Ferrand, 6 avril 2016, n° 1500608

Directive européenne 2003/88/CE du 4 novembre 2003 sur l’aménagement du temps de travail

Isabelle Vénuat

Juriste en droit social et rédactrice au sein des Editions Tissot