Pas de diminution automatique du salaire en application d’une convention collective !

Publié le 07/03/2016 à 07:55, modifié le 11/07/2017 à 18:27 dans Conventions collectives.

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Dans une décision récente concernant le milieu du football professionnel, la Cour de cassation a estimé qu’une convention collective ne peut pas autoriser l’employeur à réduire la rémunération du salarié sans obtenir l’accord de l’intéressé.

Modifier le salaire nécessite l’accord du salarié et le respect de la convention collective

Le salaire est un élément essentiel du contrat de travail. En d’autres termes, l’employeur ne peut pas le modifier unilatéralement (dans sa structure ou son montant), c’est-à-dire de sa seule volonté, sans le consentement du salarié.

Partant de ce principe, toute diminution du salaire constitue une modification du contrat de travail qui doit être justifiée, par un motif économique ou non.

En pratique, si l’entreprise fait face à des difficultés (ex : baisse des commandes, diminution constante de l’activité), cette diminution de rémunération est justifiée. Mais attention, l’employeur doit respecter une procédure particulière en obtenant au préalable l’accord exprès du ou des salariés concernés.

Deux situations peuvent se présenter :

  • soit le salarié accepte la modification et l’employeur rédige un avenant qu’il fait signer au salarié ;
  • soit le salarié la refuse et l’employeur doit alors renoncer à modifier la rémunération ou envisager le licenciement du salarié pour motif économique.

Enfin, point important à vérifier pour l’employeur qui envisage une modification de la rémunération : celle-ci ne doit jamais devenir inférieure au minimum conventionnel.

Sur ce point, rappelons que lorsqu’un nouvel accord sur les salaires devient applicable dans son entreprise, l’employeur doit toujours vérifier qu’il respecte les nouveaux minima.

En revanche, les augmentations des minima ne s’appliquent pas aux salariés dont la rémunération réelle est déjà supérieure à ces minima. Un salarié qui se trouverait dans cette situation ne peut donc pas demander le maintien de la proportion existant en sa faveur entre le salaire minimum conventionnel et son salaire contractuel.

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La disposition d’une convention collective qui prévoit une diminution automatique du salaire est illégale

Si l’employeur ne peut pas diminuer la rémunération du salarié de son propre chef, peut-il le faire en application d’une convention collective ? C’est cette question que les juges ont été amenés à trancher récemment.

Dans cette affaire, un salarié, joueur de football professionnel, avait vu sa rémunération diminuer en raison de la relégation de son club en ligue 2.

Pour ce faire, le club appliquait l’article 761 de la charte du football professionnel (laquelle a valeur de convention collective sectorielle). L’article en question prévoit en effet qu’en cas de relégation en division inférieure, les clubs ont la faculté :

  • de diminuer la rémunération de leurs joueurs de 20 % ;
  • et au-delà de ce pourcentage, de proposer individuellement à leurs joueurs par écrit avant le 30 juin avec copie à la ligue du football professionnel (LFP), une diminution de la rémunération. Dans ce cas, la réponse du joueur doit intervenir dans un délai de 8 jours de la réception de la proposition écrite. L’absence de réponse écrite du joueur dans le délai indiqué vaut acceptation de la diminution proposée par le club.

Or ici, le courrier du club étant resté sans réponse de la part du joueur, la diminution de son salaire avait été actée ainsi que le prévoyait l’article 761. Le salarié avait ensuite attendu un an avant de saisir les juges. Pour la cour d’appel, l’affaire était entendue : la contestation du salarié était intervenue hors délai, sa demande n’était donc pas recevable.

Telle n’a pas été la position de la Cour de cassation, qui remet les pendules à l’heure en rappelant le principe de base : impossible de modifier la rémunération sans l’accord exprès du salarié. Ainsi, sauf disposition légale contraire, une convention collective ne peut pas permettre à un employeur de procéder à la modification du contrat de travail sans recueillir l’accord exprès du salarié.

Un arrêt qui a le mérite de rappeler que lorsque la convention ou l’accord collectif peut déroger à la loi, ce n’est que dans un sens plus favorable au salarié (Code du travail, art. L. 2251–1). Par conséquent, le salarié est en droit de se prévaloir des dispositions légales lorsque celles-ci lui sont plus favorables que les dispositions conventionnelles.


Marie Coste

Cour de cassation, chambre sociale, 10 février 2016, n° 14–26.147 (une convention collective ne peut pas permettre à l’employeur de réduire la rémunération d’un salarié sans son accord)