Permis de conduire : sa perte peut-elle conduire au licenciement ?

Publié le 28/09/2020 à 09:10 dans Licenciement.

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Votre salarié s’est vu retirer son permis de conduire et cela a des répercussions sur son activité car il était amené à utiliser souvent, voire quotidiennement son véhicule. Vous envisagez donc de rompre son contrat de travail du fait de ce retrait de permis. En avez-vous le droit ?

Mon salarié, amené à utiliser quotidiennement un véhicule dans le cadre de ses missions, vient de perdre son permis de conduire. Puis-je engager à son encontre une procédure de licenciement car il n’a plus le droit de conduire et de ce fait, d’accomplir les missions qui sont les siennes ?

Si votre salarié a perdu son permis de conduire, vous pouvez envisager de le licencier mais sous certaines conditions seulement.

Permis suspendu ou retiré pendant le temps de travail

Si la suspension ou le retrait du permis de conduire ont eu lieu pendant le temps de travail, le salarié peut faire l’objet d’une mesure disciplinaire, laquelle doit être proportionnée.

Les fonctions exercés par votre salarié doivent nécessiter l’utilisation d’un véhicule soumis à la détention d’un permis de conduire (exemples : certains commerciaux, VRP, chauffeur routier, livreur, ambulancier, etc.). De surcroît, la perte de la possibilité de conduire doit constituer un trouble objectif au bon fonctionnement de votre entreprise. Vous devez donc nécessairement justifier que vous subissez un préjudice du fait de la suspension ou du retrait du permis du salarié concerné.

Selon les circonstances qui entourent ce retrait ou cette suspension, vous pouvez envisager un licenciement pour cause réelle et sérieuse ou faute grave.

Vous pouvez, par exemple, retenir la faute grave si le permis de conduire d'un chauffeur routier a été retiré ou suspendu pour cause de conduite en état d'ivresse pendant les heures de travail. Cette infraction l’ayant privé de son droit de conduire pour 15 mois (Cour de cassation, chambre sociale, 15 novembre 1994, n° 93-41.897).

Notez-le
Vous pouvez, si vous estimez que votre salarié ne mérite pas un congédiement pur et simple, suspendre simplement son contrat de travail le temps que l’intéressé récupère son permis de conduire.

Vérifiez les dispositions de votre convention collective. Elles peuvent être plus favorables pour le salarié et prévoir par exemple, une obligation de reclassement (tel est notamment le cas de la CCN des transports routiers).

Permis suspendu ou retiré en dehors du temps de travail

Le fait que votre salarié ait fait l'objet d'une suspension ou d'un retrait de son permis de conduire en dehors de l'exécution du contrat de travail, dans le cadre de sa vie personnelle donc, ne peut constituer une faute.

En effet, selon la Cour de cassation, le fait pour un salarié qui utilise un véhicule dans l'exercice de ses fonctions de commettre, dans le cadre de sa vie personnelle, une infraction entraînant la suspension ou le retrait de son permis de conduire ne saurait être regardé comme une méconnaissance de ses obligations découlant de son contrat de travail et ce, même si ses fonctions impliquent la conduite d’un véhicule (Cour de cassation, chambre sociale, 10 juillet 2013, n°12-16.878).

Vous ne pouvez dès lors envisager de rompre le contrat de travail du salarié que dans le cas où la possession du permis de conduire est nécessaire à l’exercice de ses fonctions. Le licenciement envisagé ne pourra être qu’un licenciement pour cause réelle et sérieuse en raison du trouble objectif au fonctionnement de votre entreprise, que vous devrez bien sûr expliciter précisément dans la lettre de notification du licenciement. Vous devez en effet démontrer que la perte du permis de conduire du salarié, amené à effectuer des déplacements, l'empêche d'effectuer son travail et que vous subissez de ce fait un préjudice.

Conseil
Si les fonctions de votre salarié impliquent nécessairement la conduite d’un véhicule, prévoyez une clause dans son contrat de travail selon laquelle :
- la détention du permis de conduire est indispensable ;
- votre salarié s’engage à vous informer en cas de retrait ou de suspension de son permis de conduire.

Les juges de la Cour de cassation ont déjà eu l’occasion de considérer que constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement, la suspension du permis de conduire, pour une durée de 6 mois, d’un salarié engagé en qualité d’agent service commercial (Cour de cassation, chambre sociale. 24 janvier 2007, n°05-41.598)

A contrario, vous ne pouvez donc pas envisager un licenciement lorsque le permis de conduire n'est pas nécessaire à l'exercice des fonctions et que le salarié a la possibilité de se rendre au travail par d'autres moyens (Cour de cassation, chambre sociale, 4 mai 2011, n°09-43.192).

Enfin, si la suspension ou le retrait du permis de conduire résulte de raisons médicales et que le salarié est reconnu inapte à conduire par le médecin du travail, vous devrez d'abord essayer de le reclasser. Si le reclassement s’avère impossible, vous pourrez alors licencier le salarié pour inaptitude.