Pour recourir au forfait jours, s’appuyer sur sa convention collective n’est pas toujours suffisant !

Publié le 11/06/2018 à 09:05 dans Conventions collectives.

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Recourir à une convention de forfait en jours suppose que cette possibilité soit prévue par un texte conventionnel. A cet égard, l’employeur ne peut pas se contenter de se référer à sa convention collective, si celle-ci renvoie à un accord d’entreprise pour la mise en place du forfait jours.

Recourir au forfait jours en respectant sa convention collective

Si vous souhaitez faire signer à un salarié une convention de forfait, deux types de forfaits s’offrent à vous : le forfait en heures (hebdomadaire, mensuel ou bien annuel) et le forfait en jours (nécessairement annuel).

L’intérêt principal du forfait jours est de rémunérer le salarié sur la base d’un nombre de jours travaillés annuellement, en dehors de tout décompte du temps de travail. Ce dispositif s’adresse à certains salariés qui disposent d’une grande liberté pour organiser leur emploi du temps.

Les forfaits annuels en jours sont mis en place par un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, par une convention collective ou un accord de branche.

Attention
Faute d’un tel accord, vous ne pouvez absolument pas conclure de convention de forfait annuel en jours, même avec l’accord exprès du salarié.

L’accord prévoyant le recours au forfait jours contient un certain nombre de clauses obligatoires :

  • les catégories de salariés concernées ;
  • la période de référence du forfait ;
  • le nombre de jours compris dans le forfait, dans la limite de 218 jours ;
  • les conditions de prise en compte, pour la rémunération des salariés, des absences ainsi que des arrivées et départs en cours de période ;
  • les caractéristiques principales des conventions individuelles ;
  • les modalités selon lesquelles l’employeur assure l’évaluation et le suivi régulier de la charge de travail du salarié ;
  • les modalités selon lesquelles l’employeur et le salarié communiquent périodiquement, notamment sur la charge de travail du salarié ;
  • les modalités selon lesquelles le salarié peut exercer son droit à la déconnexion.

Il vous faut respecter scrupuleusement les conditions d’application du forfait jours prévues par l’accord, faute de quoi vous risquez d’être condamné à payer des heures supplémentaires au salarié. C’est ce que montre une affaire récente.

Conventions collectives : lorsque le recours au forfait jours suppose un accord d’entreprise

Le contrat de travail d’un directeur des ressources humaines (DRH) incluait une convention individuelle de forfait en jours. Celle-ci avait été réitérée par un avenant du 1er juillet 2015, suite à la conclusion, le 23 mai 2014, d'un accord d'entreprise prévoyant de telles conventions.

Après son licenciement, le salarié avait saisi la formation de référé des prud’hommes d’une demande en paiement d’heures supplémentaires. Il estimait que sa convention de forfait jours n’était pas valable.

L’employeur faisait valoir que la convention collective de l'hospitalisation privée à but lucratif, ultérieurement complétée par un accord d'entreprise du 23 mai 2014, permettait l'insertion d'une clause de forfait en jours pour les salariés qui, comme l'intéressé, avait une réelle indépendance dans l'organisation de leur travail. Cette clause avait été expressément acceptée par le salarié au moment de son embauche et, de nouveau, par un avenant à son contrat de travail du 20 juillet 2015.

L’employeur faisait également valoir que dès lors que le salarié a accepté au moment de son embauche le principe d'une convention de forfait en jours, la conclusion ultérieure d'un accord d'entreprise autorisant un tel dispositif rend celui-ci immédiatement opposable au salarié, peu important l'insuffisance éventuelle des dispositions conventionnelles antérieures.

Mais les juges ont déclaré inopposable au salarié, jusqu'à la signature de l'avenant à son contrat de travail du 20 juillet 2015, la convention de forfait en jours prévue par l'accord d'entreprise intervenu le 23 mai 2014. Ils ont estimé qu'ayant signé son contrat de travail, le 21 janvier 2013, le salarié ne pouvait avoir connaissance de cet accord d'entreprise.

L’employeur a été condamné à payer au salarié des heures supplémentaires pour les années 2013, 2014 et 2015.


Cour de cassation, chambre sociale, 9 mai 2018, n° 16-26.910 (lorsqu’une convention collective renvoie à un accord d’entreprise pour la mise en place d’une convention de forfait en jours, en l’absence d’un tel accord, la présence de la convention de forfait dans le contrat de travail n’est pas suffisante)