Poursuite d’un comportement fautif : peut-on sanctionner un salarié pour des faits datant de plus de 2 mois ?

Publié le 06/02/2017 à 07:25, modifié le 31/10/2019 à 16:54 dans Sanction et discipline.

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Normalement, si vous désirez sanctionner pour faute un salarié, vous devez agir dans un délai de 2 mois sous peine de prescription. Mais comment apprécier ce délai lorsque le comportement du salarié s’est poursuivi dans le temps ou s’est reproduit ?

Sanction disciplinaire : délai de 2 mois pour agir

Lorsqu’un salarié commet une faute professionnelle, vous pouvez le sanctionner.

Vous ne disposez toutefois que d’un délai de 2 mois pour engager une procédure disciplinaire à compter du jour où vous avez eu connaissance du fait fautif, sauf si des poursuites pénales sont engagées dans le même délai (Code du travail, art. L. 1332–4).

Passé ce délai, les faits sont prescrits et vous ne pouvez en principe plus prendre de sanction.

Toutefois, il peut arriver que vous soyez obligé de diligenter une enquête afin de vérifier la véracité des faits reprochés. Dans cette situation, le délai de 2 mois court à compter des résultats de l’enquête, c’est-à-dire à partir du moment où vous avez eu une pleine connaissance des faits reprochés.

Autre cas de figure : les faits reprochés ont commencé il y a plus de 2 mois mais ils se sont poursuivis dans le temps. Que se passe-t-il alors ?

Sanction disciplinaire : cas où le comportement fautif a persisté

Lorsque le comportement fautif du salarié se poursuit ou se reproduit, le délai de prescription ne s’impose pas.

Vous pouvez donc exercer votre pouvoir disciplinaire et sanctionner le salarié en tenant compte de faits de même nature vieux de plus de 2 mois s’ils ont continués ou se sont reproduits.

Il est toutefois important que vous ayez des éléments de preuve précis et pertinents que les faits se sont renouvelés ou reproduits. Il peut par exemple s’agir d’attestation de salariés ou de clients.

Illustration : La directrice d’une maison de retraite est licenciée pour faute grave au motif d’agissements humiliants à l’égard de personnel de l’EHPAD pouvant s’assimiler à un véritable harcèlement. La salariée conteste son licenciement estimant que l’employeur a agi trop tard ; en effet elle a été licenciée en novembre 2011. Or, dès le mois d’avril 2011, l’employeur avait connaissance de ces agissements puisqu’il lui avait adressé une lettre concernant ses relations avec le personnel. Pour elle il y a donc prescription.

La Cour de cassation ne lui donne pas raison. Certes l’employeur connaissait les faits en avril 2011. Mais il a aussi été saisi en novembre 2011 de plusieurs lettres de salariées se plaignant du comportement de la directrice à l’égard du personnel. Il y a donc eu poursuite des agissements ayant conduit au licenciement et ce moins de 2 mois avant l’engagement des poursuites.

En matière disciplinaire, il n’est pas toujours simple de faire le bon choix et de déjouer les pièges. Pour vous aider à y voir plus clair, les Editions Tissot vous conseillent leur dossier « La discipline et la procédure disciplinaire ».


Anne-Lise Castell

Cour de cassation, chambre sociale, 19 janvier 2017, 15–24.404 (des faits antérieurs à 2 mois peuvent être pris en compte en matière disciplinaire dès lors que le comportement du salarié s’est poursuivi ou s’est réitéré dans ce délai)