Prise d’acte : elle peut être justifiée par votre immixtion dans l’exécution d’une délégation de pouvoirs
Temps de lecture : 5 min
Contenu ancien
Il se peut que les informations contenues dans cet article et les liens ne soient plus à jour.
La suite du contenu est réservée aux abonnés à l'Actualité Premium
Essayez l'Actualité Premium
À partir de 9,90€ / mois- Déblocage de tous les articles premium
- Accès illimité à tous les téléchargements
Prise d’acte : une rupture du contrat à vos torts
Vos salariés peuvent prendre acte de la rupture de leur contrat de travail s’ils vous reprochent de manquer à vos obligations. Leur contrat est alors immédiatement rompu, sans préavis. Vous devez leur remettre leurs documents de fin de contrat dans les meilleurs délais.
Ils devront par la suite saisir le conseil de prud’hommes. Et rapporter la preuve des manquements invoqués. Le doute sur la réalité des faits allégués vous est profitable. Le bureau de jugement statuera sur les effets de la prise d’acte dans un délai d’un mois.
Celle-ci pourra produire les effets d’une démission. Tel est le cas si les manquements qui vous sont imputés ne sont pas établis ou ne sont pas suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail.
Aucune indemnité de rupture n’est alors due. Votre salarié pourra même être condamné à vous verser une indemnité compensatrice de préavis, sauf si vous l’avez dispensé d’effectuer son préavis ou s’il était en arrêt maladie pendant la période de préavis inexécutée.
Pour en savoir plus à ce sujet, nous vous recommandons de consulter notre article « Prise d’acte injustifiée : le salarié malade n’est pas redevable de l’indemnité compensatrice de préavis ».
La prise d’acte peut à contrario produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, voire nul dans certaines situations (par ex. en cas de harcèlement ou de discrimination, ou si le salarié est protégé). Ce sera le cas si les juges considèrent que vous avez commis des manquements suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat des salariés concernés. Le salarié a alors droit :
- aux indemnités de rupture : indemnité de licenciement, indemnité compensatrice de préavis (y compris en cas de dispense à sa demande, de maladie ou d’embauche par un autre employeur pendant le préavis non exécuté) et de congés payés y afférents ;
- à l’indemnité prévue par les barèmes Macron, que vous pouvez télécharger ci-dessous (ou à une indemnité au moins égale à 6 mois de salaire dans les cas visés par la nullité) ;
- à des dommages et intérêts si la rupture s’est effectuée dans des circonstances brusques et vexatoires ;
- à l’inapplicabilité de la clause de dédit-formation figurant éventuellement dans son contrat.
Prise d’acte : l’impact de votre immixtion dans l’exécution d’une délégation de pouvoirs
La prise d’acte est-elle justifiée lorsque vous vous immiscez dans l’exécution de la délégation de pouvoirs accordée à un de vos salariés ? La Cour de cassation a été récemment amenée à se prononcer sur cette question.
En l’espèce, le directeur d’une résidence pour personnes âgées bénéficiait d’une délégation de pouvoirs lui permettant de sanctionner les salariés. Il entendait licencier un salarié pour des faits commis à l’occasion de la toilette d’un résident. Mais son employeur s’y est opposé.
Il n’estimait pas le licenciement proportionné au manquement dénoncé. Le salarié en cause n’était pas aide-soignant mais chargé du ménage. Il ne disposait pas des qualifications pour être affecté aux soins. L’employeur avait donc préféré prononcer une mise à pied disciplinaire à son encontre.
La Cour de cassation a considéré que l’employeur avait ainsi manqué à ses obligations. Et que ses manquements étaient suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail du directeur.
En effet, l’employeur n’avait pas mis fin à la délégation de pouvoirs dont disposait le directeur. Il s’était donc immiscé dans son exécution et avait ainsi privé le salarié d’une partie de ses prérogatives contractuelles. Cela l’avait empêché de mener à bien ses missions, relatives notamment à la qualité des soins des résidents et des relations avec ces derniers et leur famille.
La rupture du contrat de travail du directeur de la résidence s’analyse donc en une prise d’acte aux torts de l’employeur. Elle produit ainsi les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Pour en savoir plus sur vos manquements susceptibles de justifier une prise d’acte de la rupture de leur contrat par vos salariés, nous vous recommandons notre documentation « Tissot Social Entreprise ACTIV » qui inclut la procédure interactive Lumio « Réagir face à une prise d'acte de rupture du contrat de travail ».
Cour de cassation, chambre sociale, 1 décembre 2021, n° 20-16.851 (l’employeur qui ne met pas fin à la délégation de pouvoirs dont dispose un salarié s’immisce dans son exécution. Cela prive le salarié d’une partie de ses prérogatives contractuelles et l’empêche de mener à bien ses missions. L’employeur manque ainsi à ses obligations de façon suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail)
Juriste en droit social
- Ai-je le droit de conclure une rupture conventionnelle alors qu’il existe un litige avec le salarié ?Publié le 16/01/2025
- Contrat de sécurisation professionnelle (CSP) : prolongé jusqu’au 31 décembre 2025Publié le 24/12/2024
- Rupture conventionnelle : les principales erreurs à éviterPublié le 23/12/2024
- Abandon de poste : la présomption de démission est validée par le Conseil d’EtatPublié le 19/12/2024
- Ai-je le droit d'exiger le paiement d'une indemnité de dédit-formation en cas de rupture conventionnelle ?Publié le 19/12/2024