Procédure de licenciement : un DRH peut-il licencier le salarié d’une autre société filiale d’un même groupe ?
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Procédure de licenciement : la possible gestion déléguée au sein de l’entreprise
Il appartient en principe à l’employeur de mener l’entretien préalable au licenciement et de notifier son licenciement au salarié (Code du travail, art. L. 1232-3 et L. 1232-6).
Il lui est toutefois possible de déléguer la gestion des procédures de licenciement aux personnels habilités à mener de telles procédures.
L’entretien peut ainsi être mené par un membre du personnel ayant qualité dans l'entreprise pour embaucher ou licencier le salarié. La Cour de cassation a même admis que la faculté de représenter l’employeur ne soit pas réservée au seul délégataire du pouvoir de licencier.
En cas de contentieux, les juges sont toutefois tenus de rechercher les fonctions exercées par la personne qui a conduit l’entretien pour permettre de contrôler la validité de la délégation de pouvoirs.
La lettre de licenciement peut être signée par un représentant de l’employeur appartenant à l'entreprise. Il s’agit en principe de la personne qui a mené l’entretien préalable, mais il peut également s’agir d’une personne différente, notamment si celle qui a mené l’entretien n’a pas qualité pour procéder au licenciement du salarié.
La délégation de pouvoirs n’a pas nécessairement besoin d’être écrite, notamment si la personne assurant la conduite des procédures de licenciement a le droit d’agir au nom de l’entreprise ou si elle est la seule à assurer ces fonctions dans l’entreprise.
Elle peut également découler des fonctions du salarié, ce qui est notamment le cas pour les DRH, les directeurs régionaux ou encore les supérieurs hiérarchiques des salariés.
La Cour de cassation considère de longue date que la finalité même de l'entretien préalable et les règles relatives à la notification du licenciement interdisent à l'employeur de donner mandat à une personne étrangère à l'entreprise pour procéder à cet entretien et notifier le licenciement.
Elle vient de rappeler ce principe récemment dans une affaire au sein de laquelle un directeur général a été licencié par la directrice des ressources humaines d’une autre société, filiale du même groupe.
La Cour de cassation a considéré que la lettre de licenciement avait été signée par une personne étrangère à l’entreprise qui ne pouvait recevoir délégation de pouvoir pour procéder au licenciement. Elle a donc donné raison à la cour d’appel d’avoir jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse, sanction traditionnellement applicable en pareille situation.
Procédure de licenciement : les critères de délégation au sein d’un groupe de sociétés
Au sein d’un groupe de sociétés, l’application des règles de délégation des procédures de licenciement conduit la Cour de cassation à autoriser une partie du personnel de la société mère à mener des procédures de licenciement au sein des filiales.
Y sont notamment autorisés le président, le directeur général, le DRH, ou encore le directeur financier titulaire d'une délégation de pouvoir en matière de gestion du personnel ou le directeur des affaires sociales engagé par la société mère pour exercer ses fonctions au sein de ses filiales.
Dans l’affaire soumise à la Cour de cassation, la DRH qui avait prononcé le licenciement d’un DG d’une société appartenant au même groupe n’était pas salariée de la société mère mais d’une autre filiale.
La Cour de cassation ne s’appuie toutefois pas sur ce motif pour valider l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement.
Elle considère que cela résulte du fait qu’il n’a pas été démontré que la gestion des ressources humaines de la société qui employait le salarié relevait des fonctions de la DRH d’une autre société, ni que celle-ci exerçait un pouvoir sur la direction de la société qui employait le salarié.
La société n’a en effet pas produit le contrat de travail de la DRH, ne permettant pas de démontrer que ses fonctions lui permettaient de licencier un salarié d’une autre société, et qui plus est le DG. D’autre part, un directeur administratif, financier et des ressources humaines venait d’être embauché au sein de la société employant le salarié licencié. C’est donc à ce dernier que revenait logiquement la capacité de licencier le salarié.
L’argumentation de la société qui employait le salarié n’y changera rien. Le fait que la société employant la DRH soit spécialement chargée d’accompagner les missions des filiales ne pallie pas l’absence de preuve que les fonctions de la DRH lui permettaient de licencier le DG d’une autre société filiale du groupe, et qu’elle n’était donc pas étrangère à cette société.
La Cour de cassation confirme ainsi la possibilité de confier la gestion d’une procédure de licenciement à un salarié appartenant à une autre société filiale d’un même groupe, sous réserve que :
- cela fasse partie de ses fonctions ;
- et qu’elle exerce un pouvoir sur la direction de la société dans l’hypothèse où, comme en l’espèce, c’est un membre de la Direction de la société qui est licencié.
Il faudra en tout état de cause être en mesure de pouvoir le démontrer.
Cour de cassation, chambre sociale, 20 octobre 2021, n° 20-11.485 (l'employeur ne peut donner mandat à une personne étrangère à l'entreprise pour procéder à l’entretien préalable et à la notification d’un licenciement. Tel est le cas du licenciement d’un DG prononcé par le DRH d’une autre société filiale d’un même groupe lorsqu’il n’est pas démontré que la gestion des ressources humaines de la société employant le salarié licencié relevait des fonctions du DRH, ni que celui-ci exerçait un pouvoir sur la direction de la société employant le salarié licencié)
Juriste en droit social
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