Propos raciste pendant un repas de Noël : est-ce un comportement qui peut être sanctionné par l’employeur ?
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Les propos racistes ou discriminants, tenus lors d’une soirée entre collègues organisée par le CSE en dehors des horaires de travail, peuvent-ils être considérés comme relevant de la vie professionnelle ? Le salarié concerné peut-il être sanctionné ?
Lors du repas de fin d’année organisé par le CSE, la responsable hiérarchique d’une salariée a tenu des propos relatifs à la couleur de peau de celle-ci. Les propos racistes prononcés s’apparentent-ils à la vie professionnelle de la salariée alors même qu’ils n’ont pas été tenus sur le lieu et au temps de travail ?
Rappelons tout d’abord qu’aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, en raison notamment de son origine, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race.
Lorsque le salarié présente plusieurs éléments de fait constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'une telle discrimination. Dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
Des propos racistes prononcés lors d’un repas festif organisé en dehors de l’entreprise par le CSE relèvent-ils de la vie professionnelle ou de la vie privée ?
Dans une affaire soumise à l’appréciation de la Cour de cassation, une manager avait prononcé des propos à caractère raciste, tenant à la couleur de peau de l’une de ses collaboratrices au cours d’un repas de Noël avec des collègues de travail. Le repas était organisé par le CSE de l’entreprise.
La salariée avait dénoncé auprès de son employeur les propos racistes dont elle avait fait l’objet de la part de sa supérieure hiérarchique. Celle-ci était alors en CDD au sein de l’entreprise. Le lendemain, elle bénéficiait d’un arrêt maladie, et ce jusqu'à la fin de son CDD.
Par la suite, elle a saisi la juridiction prud’homale afin d’obtenir la requalification de son CDD en CDI ainsi que le prononcé d’une résiliation judiciaire produisant les effets d’un licenciement nul en raison d’un harcèlement moral discriminatoire.
La question posée à la Cour de cassation était alors de savoir si les propos tenus par la responsable hiérarchique relevaient de la vie professionnelle de la salariée ou s’ils relevaient de sa vie privée.
Il faut savoir que, dans un premier temps, la cour d'appel avait retenu que les propos évoquant la couleur de peau de la salariée avaient été tenus lors d’un évènement organisé par le CSE et non par l’employeur, qui plus est en dehors de l’entreprise et du temps de travail. Elle en déduisait que ces faits, indépendants de la vie professionnelle de la salariée, ne laissaient pas supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte.
A tort, selon la Cour de cassation qui a jugé quant à elle que de tels propos relevaient bien de la vie professionnelle de la salariée et laissaient supposer l’existence d’une discrimination en raison de ses origines.
Cour de cassation, chambre sociale, 15 mai 2024, n° 22-16.287 (les propos à caractère raciste, tenus au cours d'un repas de Noël avec des collègues de travail, organisé par le CSE, relevaient de la vie professionnelle de la personne concernée)
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