Repas au restaurant lors de petits déplacements du BTP : le point sur les obligations des entreprises en matière de prise en charge et de régime social pour 2023
Temps de lecture : 5 min
Peut-on aller manger au restaurant à la pause déjeuner lorsqu’on travaille sur un chantier du BTP ? Bien entendu. L’employeur doit-il participer aux frais engagés ? La réponse est plutôt simple juridiquement. Cette prise en charge est-elle à intégrer dans l’assiette des charges sociales et du prélèvement à la source ? Alors là, la réponse est beaucoup plus complexe. Une évolution récente du BOSS donne des arguments intéressants en faveur de l’exonération.
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Essayer gratuitement pendant 30 joursJe me connecteSalariés de chantier et repas au restaurant : l’obligation de prise en charge incombant à l’entreprise
Par principe, le salarié du BTP travaillant sur chantier en situation de petits déplacements doit se voir verser une indemnité journalière forfaitaire de panier dès lors qu’il ne rentre pas son domicile pour le repas du midi. En application du régime des petits déplacements institués par les conventions collectives des ouvriers du Bâtiment et des Travaux publics.
Rien n’est dit par contre dans les conventions collectives sur le cas d’un salarié de chantier venant prendre son repas au siège de l’entreprise. Doit-on verser quand même une indemnité de panier ? Oui, à notre sens.
Et si le salarié fait le choix de prendre son repas au restaurant, doit-on prendre en charge les frais engagés ? Dans la limite du montant de l’indemnité conventionnelle de panier. En gardant à l’esprit que rien n’empêche juridiquement l’employeur de fixer un plafond de prise en charge supérieur à celui prévu pour le panier conventionnel, voire de prendre en charge l’intégralité du coût du repas au restaurant.
Salariés de chantier et repas au restaurant : la qualification d’avantage en nature
Si l’entreprise prend en charge les frais de restaurant engagés par le salarié, que cela soit par le versement d’une indemnité forfaitaire, un remboursement sur facture ou un paiement direct au restaurateur, se pose la question de la qualification de cette prise en charge en matière de charges sociales.
Doit-elle être intégralement soumise à charges sociales en étant qualifiée d’avantage en nature ? Le fait que le salarié ne puisse rentrer déjeuner chez lui démontre bien que des frais supplémentaires sont engagés dans le cadre de son déplacement sur chantier, et donc que la qualification d’avantage en nature ne saurait être retenue.
Toutefois, certaines URSSAF ont pu redresser des entreprises en qualifiant bien d’avantage en nature la prise en charge des frais de restaurant des salariés sous forme de remboursement de notes de frais ou de prise en charge directe. Pour quelle raison ? Car elles considéraient que la localisation de certains chantiers, situés à moins de 10 kilomètres du siège de l’entreprise ou de l’établissement de rattachement administratif de l’entreprise, ne pouvaient conduire à justifier d’un déplacement professionnel. En assimilant la situation des salariés de chantier du BTP avec celle, par exemple, d’un comptable se rendant chez un client à trois kilomètres du siège de son cabinet comptable.
Important
Faute pour l’employeur de pouvoir démontrer que ses salariés de chantier étaient contraints de prendre leurs repas au restaurant, la prise en charge conduisait alors les URSSAF à prononcer un redressement. Heureusement, de nouveaux arguments juridiques pour contester un tel redressement viennent d’être fournis par le Bulletin officiel de la Sécurité sociale (BOSS).
Salariés de chantier et repas au restaurant : la qualification de frais professionnels
Les redressements prononcés par les URSSAF fondés sur le respect de la limite des 10 kilomètres étaient déjà contestables, cette limite n’étant prévue dans aucun texte officiel.
Toutefois, le raisonnement juridique conduisant au redressement reposait sur d’autres fondements plus solides qui pouvaient conduire les juges à rejeter les contestations des entreprises.
Le BOSS a fait l’objet sur ce sujet d’une récente mise à jour, en date du 21 décembre 2022. Il introduit à cette occasion la notion « d’usages de la profession » sur la question de la qualification des prises en charge des frais de repas.
Il est ainsi écrit que « si les usages de la profession obligent le salarié à prendre son repas au restaurant et que l’employeur prend directement en charge auprès du restaurateur les frais de repas de ses salariés en déplacement, dans la limite de 20,20 euros par repas en 2023, il est admis que cette prise en charge de frais professionnels est utilisée conformément à son objet ».
Lorsque l’employeur opte pour une indemnité forfaitaire ou un remboursement sur factures, cette prise en charge est considérée comme une prise en charge de frais professionnels et non un avantage en nature si « les usages de la profession obligent le salarié à prendre son repas au restaurant ». Sous réserve que la prise en charge ne dépasse pas le plafond de 20,20 euros par repas en 2023.
Conseil
L’intérêt de la notion d’« usages de la profession » est qu’elle dispense l’employeur de devoir prouver en cas de contrôle URSSAF l’existence de circonstances de fait ayant contraint le salarié à manger au restaurant. Reste une question : manger au restaurant lorsqu’on travaille sur des chantiers du BTP relève-t-il d’un usage de la profession ? Ce seront les juges qui seront amenés à donner une réponse en cas de futurs contentieux !
En fournissant un exemple particulier, le BOSS donne également un autre argument permettant de qualifier les frais de repas au restaurant des salariés sur chantiers en frais professionnels plutôt qu’en avantage en nature. Le BOSS explique que lorsque les salariés utilisent ensemble le véhicule de l’entreprise pour se rendre sur le lieu de leur mission, cela peut démontrer l’impossibilité pour le salarié de choisir son lieu de repas. Et donc le repas au restaurant relève bien d’une contrainte professionnelle et non d’un choix personnel. Une prise en charge par l’employeur relevant ici du champ des frais professionnels. Cet exemple colle en pratique parfaitement avec la situation de la plupart des entreprises du BTP pour lesquelles les salariés utilisent un véhicule utilitaire de l’entreprise pour se rendre à plusieurs sur le chantier.
Vous vous posez des questions sur les frais professionnels ou les avantages en nature ? Les Editions Tissot vous conseillent leur documentation « Responsable et gestionnaire paie BTP ».
Mise à jour du Bulletin officiel de la Sécurité sociale en date du 21 décembre 2022
Expert en droit du travail et relations sociales, www.didrh.fr
Auteur des documentations SOCIAL BATIMENT, SOCIAL TRAVAUX PUBLICS et RESPONSABLE ET GESTIONNAIRE PAIE BTP pour les Editions Tissot. Formateur en droit du travail auprès des entreprises et des …
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