Résiliation judiciaire : les manquements de l’employeur doivent être établis

Publié le 16/11/2016 à 07:56, modifié le 09/12/2020 à 10:35 dans Rupture du contrat de travail BTP.

Temps de lecture : 4 min

Contenu ancien

Il se peut que les informations contenues dans cet article et les liens ne soient plus à jour.

La rupture du contrat de travail peut être prononcée par le juge à la suite d’une demande en résiliation judiciaire du salarié. Si les manquements de l’employeur ne sont pas prouvés, le salarié peut-il être considéré comme démissionnaire ?

Résiliation judiciaire : une rupture du contrat aux torts de l’employeur

Lorsque vous ne respectez pas vos obligations contractuelles, le salarié peut s’adresser au conseil des prud’hommes afin de demander une résiliation judiciaire du contrat. En effet, ce sont les conseillers prud’homaux qui apprécieront la réalité et la gravité des manquements invoqués par le salarié. Il s’agit donc d’une modalité de rupture particulière. La résiliation judiciaire est offerte au salarié. Le contrat est rompu à la date où le juge prononce sa résiliation et produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Notez-le
En tant qu’employeur, vous ne pouvez utiliser la procédure de résiliation judiciaire que dans le cas d’un contrat d’apprentissage.

La résiliation judiciaire se distingue de la prise d’acte de la rupture. Celle-ci est réservée au salarié en contrat à durée indéterminé, invoquant des manquements graves de son employeur, rendant impossible le maintien des relations contractuelles. La prise d’acte de la rupture du contrat par le salarié a pour effet de rompre automatiquement et définitivement le contrat de travail. Dès la réception de la notification d’une prise d’acte de rupture, vous devez remettre au salarié les documents relatifs à la rupture du contrat de travail.

Dans une affaire récente, à l’appui de sa demande aux fins de résiliation judiciaire de son contrat, le salarié invoquait un manquement à l’obligation de sécurité et de résultat, ainsi qu’une discrimination salariale. Le salarié occupait un poste de chauffeur poids lourds et prétendait avoir été contraint d’exercer son droit de retrait, au motif qu’il lui avait été demandé de conduire un camion grue de plus de 25 ans, avec une vétusté telle que sa manipulation impliquait une situation de danger pour lui, et l’ensemble du personnel. L’employeur avait pu justifier l’absence de danger, en démontrant que toute la flotte poids-lourd dont disposait la société était régulièrement entretenue, et soumise semestriellement à un contrôle technique. Le camion ayant subi un contrôle technique favorable moins de 6 mois avant, demeurait donc en parfait état de fonctionnement. Concernant la discrimination salariale, le salarié percevait une rémunération supérieure au minimum conventionnel, et la différence de salaire avec ses collègues s’expliquait par son ancienneté et sa qualification sur le poste.

La Cour de cassation, rappelle que la charge de la preuve incombe au salarié. Celui-ci doit apporter la preuve de « manquements suffisamment graves » de la part de l’employeur et rendant alors imputable la rupture du contrat de travail à ce dernier. En l’espèce, la réalité des manquements de l’employeur n’ont pu être établis, la résiliation judiciaire n’a pas été prononcée par le juge.

Arrêt de la Cour de cassation, civile, chambre sociale, 14 septembre 2016, n° 15–21.824 (pdf | 5 p. | 57 Ko)

Absence de preuve de manquements de l’employeur = rupture à l’initiative du salarié

La démission ne se présume pas, elle doit résulter d’une manifestation claire et non équivoque de la volonté de rompre le contrat de travail. Toutefois, en l’absence de « manquements suffisamment graves », aucune résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur ne peut être prononcée, et la relation contractuelle doit se poursuivre entre le salarié et son employeur. Si le salarié rompt le contrat alors que sa demande en résiliation judiciaire est rejetée, la rupture lui est alors imputable.

En l’espèce, le salarié avait cessé de se présenter sur son lieu de travail malgré de multiples relances et mises en demeure à reprendre son travail. Il avait refusé toute réintégration de son lieu de travail depuis le 2 août 2010.

La Cour de cassation a considéré que le moyen fondé sur l’absence de démission du salarié était inopérant. Elle retient que la rupture du contrat de travail lui était exclusivement imputable puisqu’il avait « pris seul et de son propre chef l’initiative de quitter son poste en persistant à ne plus se présenter à l’entreprise malgré les offres et invitations pressantes de son employeur d’avoir à reprendre son travail au plus vite ».

Pour vous aider à connaître les règles de gestion du personnel adaptées au BTP, les Editions Tissot vous conseillent leur documentation « Gestion pratique du personnel et des rémunérations du BTP ».

Ursula AKUE-GOEH

Cour de cassation, civile, chambre sociale, 14 septembre 2016, n° 15–21.824 (la rupture du contrat de travail est imputable au salarié dès lors que les manquements de l’employeur invoqués à l’appui de la demande de résiliation judiciaire ne sont pas établis)