Rupture de la période d’essai par l’employeur dans le BTP : les juges exigent une rupture explicite !

Publié le 23/09/2020 à 09:39, modifié le 28/09/2020 à 12:01 dans Rupture du contrat de travail BTP.

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Pendant la période d’essai, vous et votre salarié devez apprécier l’opportunité de poursuivre votre relation contractuelle sur le long terme. Si l’un d’entre vous souhaite arrêter le contrat, la loi comme les conventions collectives du BTP expliquent les obligations réciproques à respecter. Les juges viennent rajouter une nouvelle obligation en cas de rupture à l’initiative de l’employeur.

Période d’essai BTP : l’exigence d’une rupture explicite posée par les juges

La rupture en période d’essai est le mode de rupture du contrat de travail le plus simple ! Cette formule reflète une certaine réalité mais elle ne doit pas vous faire oublier que la loi et les conventions collectives imposent bien un cadre pour cette rupture.

Le cadre est toutefois réduit à sa plus petite expression dans le BTP en ce qui concerne la procédure à respecter pour informer le salarié de la rupture, les conventions collectives ne fournissant pas de méthode. La loi quant-à-elle se contente d’indiquer que vous n’êtes pas tenu de respecter les procédures prévues dans le cas des licenciements ou des mises à la retraite.

En conséquence, il semble que vous soyez totalement libre sur la procédure à mettre en œuvre pour rompre une période d’essai, sous réserve que cette rupture intervienne uniquement suite à une évaluation négative de l’adaptation du salarié à son nouveau poste.

En réalité, pour des soucis de preuve mais aussi pour calculer certains délais, vous devez formaliser de façon expresse la rupture de l’essai à votre salarié. Donc, en principe, pas question de se contenter de l’avertir oralement ! Les juges viennent logiquement de confirmer que l’employeur doit bien mettre fin aux relations contractuelles pendant la période d'essai de façon « explicite ». Et ce même si la loi ou les conventions collectives ne contiennent pas une telle exigence. A noter que les juges considèrent que le salarié venant à rompre la période d’essai doit lui-aussi se montrer « explicite » vis-à-vis de son employeur.

Conseil
Vous devez donc être en mesure de prouver que vous avez bien rompu la période d’essai de façon explicite. Vous êtes contraint de procéder à un écrit. Aucune forme n’étant imposée, vous êtes libre d’opter pour un courrier recommandé, un courriel avec accusé de réception ou un courrier remis en main propre. Pour des questions de délais, il reste déconseillé de procéder à un envoi d’un courrier sans recommandé. Autre possibilité envisageable, rompre la période d’essai de façon orale mais devant un témoin. Ce témoin pouvant alors attester du fait que vous ayez bien explicitement informé le salarié de la rupture de sa période d’essai et également attester de la date à laquelle cette information a été faite. Cette solution, qui n’est pas la plus simple mais à l’avantage de la rapidité, peut être utile lorsque vous vous retrouvez dans une situation d’urgence.

Les Editions Tissot vous proposent un modèle de lettre de rupture d’une période d’essai :

Rupture de la période d'essai par l'employeur (modèle de lettre)

Période d’essai BTP : une rupture par l’employeur à préparer en amont

Les juges imposent donc à l’employeur de formaliser de façon explicite sa décision de rompre la période d’essai de son salarié. Cela nécessite donc de préparer un document avant de pouvoir mettre un terme au contrat.

Mais cette décision doit être de toute façon réfléchie en amont. Une fois le salarié évalué et la décision d’arrêter le contrat prise, vous devez suivre plusieurs étapes.

Important
La première étape est de vérifier la durée du délai de prévenance à respecter. Entre le moment où vous prévenez le salarié de la rupture de son contrat et le moment où le salarié va quitter effectivement l’entreprise, une certaine durée minimale est à respecter.

Pour un CDI dans le BTP, vous devez respecter un délai de prévenance de :
- 24 heures si le salarié est présent dans l’entreprise depuis 7 jours au maximum ;
- 48 heures pour une présence entre 8 jours et 1 mois ;
- 2 semaines pour une présence entre 1 mois et 3 mois ;
- 1 mois pour une présence de plus de 3 mois.
Pour un CDD dans le BTP, il y a un délai de prévenance de 24 heures à respecter si le salarié est présent depuis 7 jours au maximum alors que sa période d’essai doit durer au moins 1 semaine et un délai de prévenance de 48 heures dès lors que le salarié est présent depuis au moins 8 jours dans l’entreprise.

Les Editions Tissot vous proposent de télécharger leur synthèse des délais de prévenance en cas de rupture de la période d’essai :

Rupture de la période d’essai : délai de prévenance dans le BTP

La seconde étape est de vérifier que la réalisation du délai de prévenance ne conduit pas à faire travailler le salarié au-delà du terme prévu pour sa période d’essai. Dans ce cas de figure, vous devez impérativement faire arrêter de travailler votre salarié au dernier jour de sa période d’essai. Les jours du délai de prévenance n’ayant pu être accomplis par le salarié donnent lieu à une indemnisation versée par l’employeur dans le solde de tout compte. Le salarié perçoit à titre d’indemnité la rémunération qu’il aurait dû toucher s’il avait travaillé sur ces jours. Cette indemnité étant soumise à cotisations et impôt sur le revenu selon les mêmes règles que le salaire de base.

La troisième étape est d’anticiper que les ETAM et cadres peuvent pendant ce délai de prévenance utiliser leurs heures pour recherche d’emploi telles qu’accordées par les conventions collectives du BTP.

Notez-le
Les heures de recherche d'emploi sont prises en une ou plusieurs fois. Les autorisations d'absence sont fixées moitié au gré du cadre ou de l'ETAM, moitié au gré de l'entreprise et moyennant information réciproque. C'est au salarié de demander à bénéficier de ces heures de recherche d'emploi. S'il ne les utilise pas, il ne peut en demander le paiement au terme du contrat de travail.


Cassation sociale, 24 juin 2020, n° 17-28.067 (si chacune des parties peut discrétionnairement mettre fin aux relations contractuelles pendant la période d'essai, la rupture doit être explicite)

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Olivier Castell

Expert en droit du travail et relations sociales, www.didrh.fr

Auteur des documentations SOCIAL BATIMENT, SOCIAL TRAVAUX PUBLICS et RESPONSABLE ET GESTIONNAIRE PAIE BTP pour les Editions Tissot. Formateur en droit du travail auprès des entreprises et des …