Salarié licencié du fait d’une action en justice : ses revenus de remplacement ne réduisent pas son indemnisation
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Licenciement motivé par l’action en justice du salarié : nullité du licenciement
Un salarié peut être licencié pour un motif économique ou pour un motif inhérent à sa personne. On parle alors de licenciement pour motif personnel. Ce type de licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse (Code du travail, art. L. 1232-1).
Cela signifie que le licenciement doit reposer sur un motif existant, exact et objectif.
Le motif invoqué doit en outre être licite et légal. Il ne doit donc pas violer des libertés garanties par la loi ou la Constitution, ni contrevenir à la réglementation en vigueur.
Un licenciement qui serait prononcé en violation d’une liberté fondamentale serait nul (C. trav., art. L. 1235-3-1). Tel est le cas du licenciement prononcé en raison d’une action en justice intentée par un salarié (Cass. soc., 21 nov. 2018, n° 17-11.122), ce que la Cour de cassation vient de rappeler très récemment.
Dans l’affaire qui lui était soumise, un salarié avait été licencié par son employeur après avoir saisi le conseil de prud’hommes d’une demande tendant à annuler un avertissement qui avait été prononcé à son encontre.
La Cour a confirmé au regard du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen (DDHC) du 26 août 1789 que la liberté d’ester en justice est une liberté fondamentale constitutionnellement garantie.
Les salariés sont donc libres d’intenter des actions en justice à l’encontre de leur employeur.
Est donc nul le licenciement intervenu en raison d'une action en justice introduite ou susceptible d'être introduite par le salarié à l'encontre de son employeur.
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Licenciement motivé par l’action en justice du salarié : indemnisation forfaitaire en cas de réintégration
Lorsque le licenciement d’un salarié est annulé, il a droit à une indemnité qui ne peut être inférieure aux 6 derniers mois de salaire (C. trav., art. L. 1235-3-1). Il peut toutefois préférer être réintégré dans son emploi.
Le salarié réintégré a droit à une indemnisation réparant la totalité du préjudice subi entre son licenciement et sa réintégration. S’il présente une demande de réintégration tardivement et ce, de manière abusive, l’indemnisation ne courra toutefois qu’à compter de sa demande de réintégration.
Si l’employeur le demande, l’indemnisation s’effectue dans la limite du montant des salaires dont le salarié licencié a été privé.
Il y a alors lieu de déduire les revenus de remplacement perçus par le salarié entre son licenciement (ou sa demande de réintégration) et sa réintégration, notamment les sommes perçues au titre d’une autre activité ou les allocations chômage.
Cette déduction n’est pas applicable dans certains cas. Il en est ainsi lorsque le licenciement a été prononcé en violation d’une liberté fondamentale constitutionnellement garantie, comme c’est le cas lorsqu’il est motivé par l’action en justice intentée par le salarié.
La Cour de cassation confirme cela dans sa décision du 29 septembre 2021.
L’employeur est en effet condamné à indemniser le salarié sans déduction des indemnités journalières de Sécurité sociale et des indemnités de prévoyance qu’il a perçues entre son licenciement et sa réintégration.
Ses arguments n’y changeront rien. Il soutenait que la sanction n’était pas proportionnée au manquement de l’employeur et au préjudice subi par le salarié. Il indiquait par ailleurs que celui-ci retirait un enrichissement de l’absence de déduction des revenus de remplacement perçus.
Cour de cassation, chambre sociale, 29 septembre 2021, 19-24.956 (le licenciement prononcé en raison d’une action en justice introduite par un salarié à l’encontre de son employeur est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale. En cas de réintégration dans son emploi, le salarié a droit au paiement d’une indemnité égale au montant de la rémunération qu'il aurait dû percevoir entre son éviction de l'entreprise et sa réintégration, sans déduction des éventuels revenus de remplacement)
Juriste en droit social
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