Transaction : évitez toute contestation !
Publié le 12/11/2007 à 00:00, modifié le 11/07/2017 à 18:20 dans Rupture du contrat de travail.
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Vous avez licencié un de vos salariés et celui-ci veut vous attaquer en justice sur le montant des indemnités ou le motif de la rupture. Sachez que, plutôt que d’aller au procès, vous avez la possibilité de régler votre différend par une transaction. Mais soyez vigilant quant aux modalités de sa conclusion !
La transaction est un contrat par lequel vous et votre salarié avez la possibilité de mettre fin à un litige ou de prévenir un litige à naîtrelié à la rupture du contrat de travail du salarié (licenciement, démission, départ ou mise en retraite).
Elle permet non seulement d’éviter les aléas, les frais et les longueurs d’un procès, mais aussi de régler le litige dans la confidentialité. En effet, seuls le salarié et vous-même allez signer la transaction, personne d’autre ne sera au courant de la nature et du montant de vos arrangements.
Ne pas confondre transaction et rupture amiable ou départ négocié. La rupture amiable permet de régler, en amont, le départ du salarié, alors que la transaction suppose que le contrat de travail a déjà été rompu et règle, en aval, les conséquences de la rupture.
Motif de la transaction. Tout d’abord, il est important de préciser le motif de la contestation que les parties souhaitent régler, avec le point de vue de chacune d’elles.
Exemple :
Un employeur licencie un salarié pour faute grave, alors que ce dernier considère que ce licenciement est abusif et veut engager une procédure aux prud’hommes. Tous deux peuvent décider de conclure une transaction ayant pour objet le caractère grave de la faute, motif du licenciement.
Objet de la transaction. Une transaction n’est valable que si son objet est valable. Elle ne peut porter que sur les conséquences pécuniaires de la rupture ou sur la nature de celle-ci. Par exemple, les parties peuvent se mettre d’accord sur le montant d’une indemnité transactionnelle. L’employeur peut par ailleurs accepter de rompre le contrat pour faute simple et non pour faute grave du salarié.
La transaction ne peut, en aucun cas, porter sur l’imputabilité de la rupture du contrat, c’est-à-dire s’accuser réciproquement l’un l’autre d’être à l’origine de la rupture du contrat, ou être contraire à la loi.
Cas de transactions possibles |
Le salarié renonce à demander des dommages et intérêts pour licenciement injustifié, si l’employeur lui verse une somme en plus de l’indemnité de licenciement.
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Un employeur renonce à licencier un salarié pour faute grave si le salarié accepte, en contrepartie, une clause de non-concurrence.
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Cas de transactions illicites |
Suite à un refus de modification de ses conditions de travail, un salarié considère que la rupture est du fait de l’employeur, alors que ce dernier estime qu’il s’agit d’une démission.
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Un salarié souhaite que la rupture soit requalifiée en licenciement économique pour bénéficier de l’allocation FNE, alors que les conditions d’un tel licenciement ne sont pas réunies.
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Concessions réciproques. Par la transaction, les parties doivent renoncer à tout ou partie de leurs prétentions. L’absence de concessions de la part d’une des deux parties entraîne la nullité de la transaction.
Date de la transaction. Pour être valable, la transaction doit être conclue :
- après la notification au salarié de son licenciement ;
- après la réception de la lettre de démission du salarié ;
- après la notification au salarié de sa mise à la retraite ;
- après la notification par le salarié de son départ en retraite.
D’où l’importance d’utiliser un envoi par recommandé avec accusé de réception, cela évitant tout litige sur la date de la rupture du contrat.
Attention, la date de prise en compte de la rupture du contrat n’est pas la date d’envoi de la lettre recommandée, mais la date de réception de cette lettre par l’autre partie.
En pratique, il est possible que le salarié et vous-même sachiez à l’avance que vous allez établir une transaction, et cela avant même la notification du licenciement ou de la démission. Mais soyez particulièrement vigilant sur cette éventualité : refusez d’aborder toute discussion relative à un projet de transaction. Si des négociations débutent ou si un projet de transaction est rédigé avant la réception de cette lettre, les juges annuleront systématiquement la transaction.
L’importance d’une transaction écrite
La transaction doit être rédigée par écrit et signée des deux parties, non pour une question de validité mais pour une question de preuve. Elle peut aussi prendre la forme d’un échange de courriers.
Il est important que la transaction mentionne :
- un rappel des faits à l’origine du litige ;
- les étapes de la procédure de licenciementou d’autre mode de rupture du contrat (démission, retraite…) ;
- l’existence et la nature du litige, tout en précisant les points sur lesquels porte ce litige ;
- l’objet : mettre fin au litige ou prévenir un litige à naître ;
- le point de vue de chaque partie, leurs prétentions et leurs divergences ;
- le contenu précis des concessions réciproques consenties, en termes d’indemnités notamment, et la renonciation à toute action judiciaire.
L’indemnité transactionnelle
L’indemnité transactionnelle est une somme d’argent versée au salarié, pour le dédommager de la rupture, qu’il estime abusive, de son contrat.
Elle doit être distinguée des sommes qui reviennent « normalement » au salarié dans le cadre de la rupture de son contrat de travail et du paiement de son solde de tout compte (indemnités de congés payés, de préavis, etc.).
Calcul. L’indemnité transactionnelle ne doit pas être inférieure aux indemnités qu’aurait attribué le juge au salarié pour un licenciement sans cause réelle et sérieuse. A défaut, les concessions consenties par vous ne sont pas suffisantes et la transaction est nulle.
Régime social et fiscal des indemnités transactionnelles. Les indemnités transactionnelles sont soumises à un régime social et fiscal différent des indemnités « normales » liées à la rupture du contrat.
Impôt sur le revenu | Cotisations de Sécurité sociale | CSG et CRDS | |
Indemnités de licenciement
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Non imposable
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Non assujettie
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Indemnités liées à la rupture du contrat (indemnités de licenciement, de préavis, de congés payés…)
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Imposables en totalité | Assujetties en totalité | Assujetties en totalité |
Indemnité transactionnelle
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Non assujetties dans la limite de l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement.
Exonérées pour la fraction excédentaire, dans la limite la plus élevée suivante :
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Assujetties pour la fraction excédant l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement
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Le droit à indemnisation chômage pour le salarié
La transaction n’étant pas un mode de rupture mais un mode de règlement des suites d’une rupture déjà intervenue, elle n’a aucun effet sur le droit à indemnisation du salarié :
- si elle vous est imputable (licenciement par exemple), le salarié se retrouve privé involontairement d’emploi et bénéficie des prestations du régime d’assurance chômage ;
- si la rupture est imputable au salarié (démission par exemple), il est, en principe, privé des allocations chômage, sauf si la démission est considérée comme légitime (en cas de mutation du conjoint, par exemple).
Dans le cas d’un licenciement, vous devez mentionner l’existence de la transaction sur l’attestation à remettre aux ASSEDIC. En effet, l’indemnité transactionnelle peut avoir un impact sur la prise d’effet de la couverture chômage et augmenter le délai de carence.
Le non-respect de la transaction
Dès lors que la transaction respecte les conditions requises, elle ne peut être remise en cause ni par les parties, ni par les juges.
Lorsque l’une des parties ne respecte pas les conditions ou obligations fixées par la transaction, l’autre partie peut saisir le juge afin qu’il prononce :
- l’exécution forcée de la transaction et le versement de dommages et intérêts ;
- la nullité de la transaction.
Vous pouvez inclure dans la transaction une clause fixant une peine à l’encontre du salarié qui n’en respecterait pas les termes. Attention, pour être valable, cette clause doit être réciproque et s’appliquer également à votre encontre en cas de non-respect de votre part.
Le juge a toute liberté pour se prononcer sur la légitimité de cette rupture et, éventuellement, vous condamner à des dommages et intérêts s’il considère la rupture abusive ou non fondée.
L’annulation de la transaction entraîne la restitution de l’indemnité transactionnelle par le salarié.
M. Sonnerat
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