Un syndicat peut-il réclamer des dommages et intérêts à l'employeur qui met en œuvre une convention collective irrégulière ?
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Conventions collectives : des syndicats qui contestent la validité d'une convention de forfait
En 2012, plusieurs syndicats avaient saisi les juges pour contester la mise en œuvre de l'accord collectif du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail, attaché à la convention collective SYNTEC-CINOV.
Cet accord instaurait pour les salariés relevant du régime « réalisation de missions » une convention de forfait en heures sur une base hebdomadaire assortie d'une rémunération forfaitaire, que les syndicats estimaient irrégulière. Ils demandaient donc aux juges de déclarer ce forfait inopposable aux salariés, et sollicitaient également le paiement de dommages et intérêts en réparation de l'atteinte portée à l'intérêt collectif de la profession.
Cette affaire arrivait devant la Cour de cassation pour la deuxième fois. En effet, dans un arrêt du 14 décembre 2016, la Haute juridiction avait jugé recevable l'action des syndicats. Mais les juges devant lesquels l'affaire avait été renvoyée avaient rejeté la demande des syndicats liée à l’attribution de dommages et intérêts. Ceux-ci avaient donc saisi la Cour de cassation pour obtenir gain de cause sur ce point.
Pour refuser d'attribuer des dommages et intérêts aux syndicats, les juges du fond avaient estimé qu'ils ne démontraient pas que l'application irrégulière des dispositions de l'accord de branche relatives à la rémunération d'une catégorie de salariés avait entraîné un préjudice au détriment de la collectivité des salariés ayant bénéficié du dispositif en cause.
Conventions collectives : le syndicat a droit à des dommages et intérêts en cas de mise en œuvre d'une convention de forfait irrégulière
L'interprétation des juges du fond n'a pas été validée par la Cour de cassation.
La Cour rappelle d'abord que d'après la loi, les syndicats peuvent exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent (article L. 2132-3 du Code du travail).
La Cour souligne ensuite que les juges avaient constaté qu'il avait été définitivement jugé que la convention de forfait en heures contestée avait été mise en œuvre par les sociétés en cause de manière irrégulière à l'égard des salariés relevant des modalités « réalisation de missions ».
Par conséquent, il en résultait un préjudice causé à l'intérêt collectif de la profession, que les juges auraient dû évaluer.
L'affaire devra donc, à nouveau, être jugée...
Cour de cassation, chambre sociale, 2 février 2022, n° 20-18.713 (les syndicats peuvent exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent)
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