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Une altercation éclate entre vos salariés : les clés pour bien gérer le conflit

Publié le 17/07/2017 à 07:00 dans Sanction et discipline.

Temps de lecture : 7 min

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Il se peut que les informations contenues dans cet article et les liens ne soient plus à jour.

Une violente dispute éclate entre deux salariés. Elle dégénère. Un échange de coups a lieu, provoquant des blessures plus ou moins graves. Vous venez d’être alerté. Quels sont les bons réflexes à avoir et les erreurs à éviter ?

Prenez immédiatement les mesures nécessaires

Si l’altercation n’est pas terminée, il faut la faire cesser sur-le-champ. Mais en général, quand vous en êtes informé, la situation est redevenue calme.

Deux actions essentielles sont aussitôt à effectuer.

Vérifiez si l’un de vos salariés concernés a été blessé

Dans ce cas, il s’agit d’un accident du travail. Il est alors obligatoire de faire accompagner le salarié chez son médecin traitant ou aux urgences afin qu’il puisse recevoir des soins, puis d’établir une déclaration d’accident de travail.

Ne prenez jamais le risque de laisser le salarié quitter seul l’entreprise en état de faiblesse. Un accident pourrait survenir sur le trajet et votre responsabilité pourrait être mise en jeu.

Mettez immédiatement à pied les responsables à titre conservatoire

Un trouble comme celui-ci ne doit pas se reproduire. Il est préférable que le ou les fautifs quittent l’entreprise dans l’attente d’une sanction disciplinaire ou d’un licenciement pour faute grave.

Dans ce cas, indiquez aux salariés qu’ils sont placés en mise à pied à titre conservatoire pour une durée indéterminée (le temps pour vous de prendre une décision sur les suites à donner) et qu’ils doivent quitter l’entreprise sur-le-champ.

Attention
Pensez bien à préciser, sur le courrier de convocation à un entretien préalable, qu’ils ont été placés, depuis la date des faits, en mise à pied à titre conservatoire.
Notez-le
En tant qu'employeur, vous êtes tenu à une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs. Traditionnellement, la Cour de cassation considérait que vous manquez à cette obligation lorsqu'un salarié est victime sur le lieu de travail de violences physiques ou morales, exercées par un autre salarié, quand bien même vous aurez pris des mesures pour faire cesser ces agissements. Toutefois des décisions récentes laissent à penser que cette jurisprudence s’atténue (voir notre article « Violences au travail : la jurisprudence évolue ».

Effectuez des recherches pour savoir ce qui s’est réellement passé

Une altercation constitue une faute et peut entraîner une sanction pouvant aller jusqu’au licenciement. Mais il est important de ne pas agir dans la précipitation, de rechercher ce qui s’est exactement passé et de réunir les preuves nécessaires pour constituer un dossier.

Vous devez absolument déterminer quel est le salarié qui a déclenché la bagarre. En effet, les juges ont sanctionné un employeur qui avait licencié un salarié pour faute grave sans avoir préalablement recherché si ce dernier avait été l'instigateur de la rixe.

Notez-le
Suite à une bagarre, vous n'avez pas l'obligation de sanctionner de la même manière les salariés concernés.

Comment procéder ?

Recherchez des témoins

Les salariés sont souvent réticents à l’idée de témoigner contre leurs collègues. Cependant, les faits sont graves et il faudra vous montrer persuasif. Mettez en avant l’intérêt de l’entreprise et le fait que ce type de comportement nuit à l’ensemble des salariés et à leur sécurité.

Il est nécessaire de faire rédiger des attestations par écrit.

Constituez un dossier disciplinaire

Dans l’optique d’une probable sanction, il est important de disposer d’éléments tangibles à opposer aux salariés concernés, tels que les attestations de témoins mentionnées ci-dessus.

Il est par ailleurs souhaitable d’obtenir la copie de l’éventuel arrêt de travail du ou des blessés et d’en vérifier la durée. Ce sera un élément permettant d’apprécier la gravité des faits.

Vous pouvez rappeler à la victime la possibilité de porter plainte contre son agresseur. Elle sera versée au dossier et pourra s’avérer utile en cas de contentieux ultérieur devant le conseil de prud’hommes.

Prenez les sanctions nécessaires dans le respect de la procédure

En fonction de la gravité de la situation, vous serez face à un triple choix :

  • ne pas sanctionner ;
  • prendre une sanction légère ;
  • ou licencier.

Ne pas sanctionner serait certainement la solution la moins adaptée. En effet, de tels comportements sont très graves ! Ne prendre aucune sanction pourrait laisser penser aux autres salariés que des incidents de cette sorte pourraient être répétés sans crainte.

Mais c’est bien sûr à vous qu’il revient de juger de l’opportunité et du choix de la sanction.

Attention
Si vous envisagez de sanctionner un salarié ayant eu un comportement violent, il faut vérifier au préalable que son comportement n’était pas lié à son état de santé sous peine de discrimination.

Les sanctions moins lourdes qu’un licenciement

Vous pouvez opter pour un simple avertissement, une mise à pied disciplinaire, une mutation disciplinaire ou une rétrogradation.

Pour toutes les sanctions autres qu’un avertissement, vous avez l’obligation de convoquer le salarié à un entretien préalable, par lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR) ou remise en main propre contre décharge, dans un délai maximum de 2 mois suivant les faits.

Pour être certain de ne rien omettre dans ce courrier, vous pouvez utiliser le modèle de convocation à un entretien préalable à une sanction disciplinaire autre qu’un licenciement que nous mettons à votre disposition. Il ne vous reste plus qu’à le personnaliser.

Convocation à un entretien préalable à une sanction disciplinaire autre qu’un licenciement

Aucun délai minimum n’est prévu par la loi entre la date de la convocation et celle de l’entretien. Toutefois, il semble raisonnable de laisser au salarié un délai de 3 ou 4 jours pour se préparer.

Une fois que l’entretien a eu lieu, vous serez mieux à même de choisir la sanction adaptée. Cette dernière devra être notifiée au salarié par LRAR ou remise en mains propres contre décharge.

La notification ne peut intervenir moins de 2 jours ouvrables, ni plus d’1 mois après le jour fixé pour l'entretien (Code du travail, art. L. 1332-2).

Pour ne commettre aucune erreur, n’hésitez pas à vos référer aux chapitres dédiés à cette matière au sein de la publication « Gérer le personnel ».

Conseil
Même si vous souhaitez ne prononcer qu’un simple avertissement, convoquez les salariés à un entretien préalable afin de recueillir leurs explications dans un contexte apaisé. Il serait regrettable qu’ils n’aient pas pu s’exprimer et que vous n’ayez pas abordé oralement la situation avec eux.

Le licenciement pour faute grave

C’est la sanction la plus lourde. Avant de prendre une telle décision, il est important de tenir compte de l’âge du salarié, de son ancienneté et de l’existence d’un éventuel dossier disciplinaire.

Encore une fois, vous avez tout intérêt à préparer un dossier comprenant, dans la mesure du possible, attestations de témoins et autres preuves. Dès lors que si le salarié décide de contester le motif de son licenciement devant le conseil des prud’hommes et que celui-ci considère que la faute n’est pas suffisamment grave, vous devrez payer le préavis et l’indemnité de licenciement.

Si les conseillers prud’homaux estiment que le licenciement est sans cause, vous pourrez être condamné à verser, en plus des frais de justice, des dommages et intérêts.

Attention
Si le responsable de la bagarre est en arrêt de travail, il bénéficie de la protection des accidentés du travail jusqu’à sa visite de reprise. Vous pourrez malgré tout le licencier pour faute grave, à condition d’avoir un dossier solide.