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Une convention collective qui prévoit des avantages salariaux de façon rétroactive s'applique-t-elle au salarié licencié avant sa signature ?

Publié le 01/02/2021 à 09:59 dans Conventions collectives.

Temps de lecture : 4 min

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Certains accords collectifs prévoient des avantages pour les salariés, qui ont la particularité d'être applicables de façon rétroactive. Dans ce cas, leur bénéfice est-il réservé aux seuls contrats de travail en cours au jour de la date d’entrée en vigueur de l’accord ?

Conventions collectives : une augmentation de salaire et une prime créées de façon rétroactive

Un salarié, conducteur-receveur au sein d'une société de transports publics, avait été licencié pour faute le 28 janvier 2015. Il avait saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes.

Il réclamait notamment le bénéfice d'une augmentation du salaire de base, ainsi que d'une prime, qu'un protocole d’accord pour les NAO 2015, signé le 8 octobre 2015 prévoyait pour les conducteurs-receveurs. Sa particularité : la prime présentait un caractère rétroactif.

Dans le détail, l'accord indiquait :

  • (dans son article 1er intitulé « Augmentation des salaires de l’ensemble du personnel ouvrier conducteurs-receveurs et service technique) » : « Augmentation, rétroactive au 1er janvier 2015, de 0,6 % du salaire de base » ;
  • (dans son article 8 intitulé « Création d’une prime de samedi pour les conducteurs receveurs ») : « Rétroactivement au 1er janvier 2015, il est créé une prime de service du samedi d’un montant de 2 euros. Cette prime est attribuée au conducteur effectuant un service un samedi ouvré ».

L'employeur refusait d'appliquer au salarié ces dispositions conventionnelles. Il faisait valoir qu'un nouvel accord collectif n’est applicable qu’aux contrats de travail en cours au moment de sa date d’entrée en vigueur. Par conséquent, le salarié ne faisant plus partie des effectifs à cette date, ne pouvait pas revendiquer le bénéfice des dispositions d’un accord conclu plusieurs mois après son licenciement.

Mais les premiers juges n'avaient pas suivi le raisonnement de l'employeur. Pour eux, dans la mesure où aucune mention de l’accord n’excluait de son application les salariés ayant quitté l’entreprise avant sa conclusion, c'est en toute logique que l'intéressé y avait droit. Ils avaient donc condamné l’employeur à payer à l'intéressé des sommes à ce titre, pour la période de janvier à mars 2015 (période au cours de laquelle le salarié se trouvait en préavis).

Conventions collectives : le salarié licencié avant la date de conclusion de l’accord bénéficie-t-il de des avantages rétroactifs ?

Saisie à son tour, la Cour de cassation a validé la décision des premiers juges.

La Cour rappelle d'abord que les conventions et accords sont applicables, sauf stipulations contraires, à partir du jour qui suit leur dépôt auprès du service compétent (art. L. 2261-1 du Code du travail). Il en résulte qu’un accord collectif peut prévoir l’octroi d’avantages salariaux pour une période antérieure à son entrée en vigueur.

La Cour souligne ensuite qu'une convention ou un accord collectif, même dérogatoire, ne peut pas priver un salarié des droits qu’il tient du principe d’égalité de traitement pour la période antérieure à l’entrée en vigueur de l’accord (Code civil, art. 2).

Dès lors, la seule circonstance que le contrat de travail d’un salarié ait été rompu avant la date de signature de l’accord collectif ne peut justifier que ce salarié ne bénéficie pas, à la différence des salariés placés dans une situation identique ou similaire et dont le contrat de travail n’était pas rompu à la date de signature de l’accord, des avantages salariaux institués de façon rétroactive, pour la période antérieure à la cessation du contrat de travail.

Par conséquent, c'est à juste titre que les premiers juges ont décidé que le salarié, bien que ne faisant plus partie du personnel à la date de signature de l’accord, devait bénéficier des avantages que cet accord prévoyait de façon rétroactive.


Cour de cassation, chambre sociale, 13 janvier 2021, n° 19-20.736 (la seule circonstance que le contrat de travail d'un salarié ait été rompu avant la date de signature de l'accord collectif ne saurait justifier que ce salarié ne bénéficie pas, à la différence des salariés placés dans une situation identique ou similaire et dont le contrat de travail n'était pas rompu à la date de signature de l'accord, des avantages salariaux institués par celui-ci, de façon rétroactive, pour la période antérieure à la cessation du contrat de travail)