Versement d’une prime à une catégorie de salariés : comment ne pas commettre d’erreur !
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Dans plusieurs affaires soumises devant la Cour de cassation, une entreprise relevant du secteur du BTP décide de verser une prime qu’elle intitule « prime de pouvoir d’achat » aux seuls salariés employés de catégorie A à E. Les salariés de la catégorie F et les salariés cadres, exclus de cette prime, décident de saisir le juge prud’homal en considérant faire l’objet d’une inégalité de rémunération. Dans un arrêt du 16 mars 2022, la Cour de cassation donne une nouvelle lecture à la mise en œuvre de ce principe.
« Travail égal, salaire égal » : les conditions de ce principe
Le principe d’égalité de traitement entre les salariés se traduit essentiellement par l’expression communément entendue de « travail égal, salaire égal ».
Il signifie qu’un employeur est tenu d’assurer l’égalité de rémunération entre tous les salariés, pour autant que les salariés en cause soient placés dans une situation identique. Autrement formulé, les situations comparées doivent être identiques.
Par ailleurs, les différences de traitement doivent être justifiées « par des raisons objectives et pertinentes » et les règles déterminant les conditions d’exigibilité doivent être « préalablement définies et contrôlables ».
A titre d’illustration, l’exclusion d’une catégorie de salariés fondée sur un critère jugé discriminatoire pourrait entrainer une rupture d’égalité de rémunération.
S’agissant de la charge de la preuve, celle-ci fait l’objet d’un aménagement : le salarié soumet au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération. L’employeur doit par la suite rapporter la preuve d’éléments objectifs justifiant cette différence.
Ce principe d’aménagement de la preuve est confirmé par la Cour de cassation en date du 16 mars 2022. Elle ajoute par ailleurs que le juge est tenu de contrôler concrètement la réalité et la pertinence des faits apportés par le salarié.
« Travail égal, salaire égal » : mise en œuvre du principe
Dans l’affaire soumise devant la Cour de cassation, un centre de formation du BTP décide de verser une prime qu’elle intitule « de pouvoir d’achat » aux seuls salariés employés relevant de la catégorie A à E. Les autres salariés employés de la catégorie F et les salariés cadres sont exclus de ce dispositif.
Considérant faire l’objet d’une rupture d’égalité, les salariés exclus décident de saisir le juge prud’homal.
La cour d’appel décide de donner gain de cause aux salariés employés F et de débouter les salariés cadres sur la base des arguments suivants :
- pour les salariés cadres, la cour d’appel considère qu’il n’y a pas d’identité de situation « en raison des salaires probablement plus élevés qu’ils percevaient » ;
- pour les salariés employés de la catégorie F, la cour d’appel condamne l’entreprise en reconnaissant l’existence d’une situation identique entre les salariés de la catégorie A à F. Pour ce faire, elle s’appuie sur une négociation salariale antérieure et relative à la mise en place de la « prime de pouvoir d’achat » dans laquelle les salariés de la catégorie A à F étaient concernés, mais qui n’a pas abouti à un accord.
La Cour de cassation rejette partiellement ce raisonnement.
Elle considère que l’échec d’une négociation collective ne permet pas de caractériser une « situation identique » entre les salariés employés de la catégorie A à E et ceux de la catégorie F.
Elle semble au contraire considérer qu’un employeur peut appliquer une différence de traitement sur la base d’une grille de rémunération afin de verser une prime « de pouvoir d’achat » aux seuls salariés dont la rémunération est la moins élevée.
Cette position va dans le sens de plusieurs arrêts de la Cour de cassation.
En effet, si à l’origine la différence de traitement entre la catégorie cadre/non cadre n’était pas possible, la Cour de cassation a progressivement assoupli sa position afin de permettre une différence de traitement lorsque celle-ci a pour objet ou pour effet de prendre en compte les spécificités d’une de ces catégories (pour exemple : Cass. soc., 8 juin 2011, n° 10-11.933).
En application de cette règle, c’est en toute logique que la Cour de cassation, dans l’arrêt rendu le 16 mars 2022, a considéré que l’exclusion de la catégorie cadre ne constituait pas un manquement au principe d’égalité de traitement.
Dans l’arrêt du 16 mars 2022, la Cour de cassation semble également aller plus loin en considérant qu’une différence de traitement est également possible au sein même d’une catégorie, en fonction de la sous-catégorie, dès lors que la différence de traitement au sein de ces sous-catégories se justifie en raison de spécificités.
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Cour de cassation, chambre sociale, 16 mars 2022, n° 20-22.688 (un avantage peut être réservé à certains salariés à condition que tous les salariés placés dans une situation identique, au regard de l'avantage, puissent en bénéficier, à moins que la différence de traitement soit justifiée par des raisons objectives et pertinentes et que les règles déterminant les conditions d'éligibilité soient préalablement définies et contrôlables)
Responsable RH dans une entreprise du secteur du BTP
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