Action syndicale : la recevabilité de l’action en substitution conditionnée par l’information préalable des salariés
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Dans certaines situations prévues par le Code du travail, les organisations syndicales représentatives peuvent agir en justice en faveur des salariés. Mais attention de respecter scrupuleusement les formalités d’information préalable des salariés. La recevabilité de l’action en dépend.
Action en substitution : des formalités substantielles à respecter
Une organisation syndicale représentative peut exercer une action en justice :
- pour la défense de ses intérêts propres ;
- ou pour la défense des intérêts de salariés.
Dans ce second cas, l’organisation exerce alors une action personnelle : elle agit seule, sans mandat, pour défendre un ou plusieurs salariés, adhérents ou non : c’est ce qu’on appelle l’action en substitution.
Le syndicat qui souhaite agir en substitution d'un ou plusieurs salariés doit respecter certaines formalités substantielles, protectrices des salariés.
A défaut de respecter scrupuleusement ces formalités, l’action intentée sera jugée irrecevable.
Attention
Les conditions pour mener une action en substitution varient :
- en fonction du droit en cause (travail dissimulé, harcèlement, égalité H/F, licenciement économique, discrimination etc.);
- et en fonction du type de contrat de travail (CDD, travail temporaire, travailleurs étrangers, travailleurs détachés etc.).
Les cas de recours sont limitativement énumérés par le Code du travail. Nous vous conseillons de bien vous y reporter avant d’engager une telle procédure.
S’agissant plus particulièrement des salariés intérimaires, les organisations syndicales représentatives peuvent exercer une action en substitution pour faire respecter les règles relatives au travail temporaire.
Dans ce cas, le syndicat doit, à peine d’irrecevabilité, alerter le salarié par LRAR, mentionnant obligatoirement :
- la nature et l'objet de l'action envisagée par l'organisation syndicale représentative ;
- que l'action est conduite par l'organisation syndicale qui peut exercer elle-même les voies de recours contre le jugement ;
- que le salarié peut, à tout moment, intervenir dans l'instance engagée par l'organisation syndicale ou mettre un terme à cette action ;
- que le salarié peut faire connaître à l'organisation syndicale son opposition à l'action envisagée dans un délai de quinze jours à compter de la date de réception (Code du travail, art. D. 1251-32).
Et le salarié ne doit pas s’y être opposé dans un délai de quinze jours à compter de la date à laquelle l'organisation syndicale lui a notifié son intention. Passé le délai de quinze jours, l’acceptation tacite du salarié est réputée acquise (Code du travail, art. L. 1251-59).
Action en substitution : une information préalable des salariés nécessaire
Le syndicat substituant un salarié temporaire dans son action judiciaire doit, à peine d'irrecevabilité de son action, avoir averti chaque salarié concerné, par lettre recommandée avec avis de réception adressée au plus tard le jour de l'introduction de l'instance.
Cette condition de temporalité permet de garantir la protection de la liberté personnelle de chaque salarié de conduire la défense de ses intérêts.
C’est ce qu’est venu préciser la Cour de cassation dans un arrêt du 23 octobre 2024.
Illustration
Dans cette affaire, un syndicat saisit le conseil de prud’hommes en faveur de 215 salariés d’une société de travail temporaire, en vue, notamment, d’obtenir la condamnation de cette entreprise et des sociétés utilisatrices à verser la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat à tous les salariés. Les entreprises utilisatrices opposent alors au syndicat de ne pas avoir informé les salariés de son action avant l’introduction de l’instance. En effet, les salariés concernés ont été informés de l’action du syndicat après l’introduction de l’instance, relevant ainsi une irrecevabilité du recours, une information ultérieure n’étant pas de nature à contrer cette irrecevabilité.
Ainsi, si vous envisagez de mener une action en substitution, soyez vigilants à informer les salariés concernés de l’action en substitution initiée en leur faveur au plus tard le jour de l’introduction de l’instance au moyen d’une LRAR précisant la nature et l’objet de l’action, outre les indications ci-dessus.
A défaut, votre action pourrait être jugée irrecevable, et ce même si vous informez les salariés postérieurement.
Vous souhaitez en savoir davantage quant au rôle des syndicats dans la défense des intérêts des salariés ? Les Editions Tissot vous proposent leur documentation « Les représentants du personnel et la défense des salariés».
Cour de cassation, chambre sociale, 23 octobre 2024, n° 23-11.087 (à peine d'irrecevabilité de son action en substitution, le syndicat doit avoir averti chaque salarié concerné par l’action, au moyen d’une lettre recommandée avec avis de réception adressée au plus tard le jour de l'introduction de l'instance).
Juriste en droit social et rédactrice au sein des Editions Tissot
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