Contestation des élections professionnelles : attention aux salariés réintégrés
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Contestation des élections professionnelles : par qui et comment ?
En cas d’irrégularités lors des élections professionnelles, peuvent saisir le tribunal judiciaire :
- les syndicats : représentatifs, non représentatifs, avec ou sans candidats, avec ou sans adhérents au sein de l’entreprise (si le syndicat a vocation à participer au processus électoral), ayant participé ou non à la négociation du protocole d’accord préélectoral (PAP) ;
- les candidats aux élections : ces derniers peuvent contester l’élection mais que pour le collège électoral auquel ils appartiennent ;
- les électeurs : ils peuvent contester l’élection mais que pour le collège électoral auquel ils appartiennent ;
- l’employeur ou son représentant : celui qui organise les élections professionnelles peut saisir le tribunal judiciaire en cas d’irrégularités.
Selon l’article R. 2314-24 du Code du travail, « le tribunal judiciaire est saisi des contestations par voie de requête.
Lorsque la contestation porte sur l'électorat, la requête n'est recevable que si elle est remise ou adressée dans les trois jours suivant la publication de la liste électorale. (…)
Lorsque la contestation porte sur la régularité de l'élection ou sur la désignation de représentants syndicaux, la requête n'est recevable que si elle est remise ou adressée dans les quinze jours suivant cette élection ou cette désignation ».
Pour les contestations ne touchant pas au 1er tour des élections professionnelles, le délai de 15 jours court à compter de la proclamation des résultats du second tour.
Contestation des élections professionnelles : quid des salariés réintégrés ?
La Haute juridiction est venue apporter des précisions sur cette thématique dans une nouvelle décision datant du 19 janvier 2022.
En l’espèce, un salarié délégué syndical a été licencié pour faute grave le 28 septembre 2017 après autorisation de l’inspection du travail du 20 septembre 2017.
Suite à cela, il a saisi la juridiction administrative d’un recours contre l’autorisation de licenciement ainsi que la juridiction prud’homale en nullité de son licenciement.
Le tribunal administratif fait suite positivement à sa demande et annule l’autorisation de licenciement, décision confirmée par la suite en appel.
Par lettre du 8 avril 2019, le salarié a sollicité sa réintégration, laquelle a été refusée par l’entreprise le 18 avril 2019.
Dans le même temps, ladite société signait le même jour un accord préélectoral prévoyant notamment une publication des listes électorales le 13 mai 2019.
Les élections du comité social et économique (CSE) se sont déroulées du 4 au 11 juin par vote électronique. Tous les sièges ont été pourvus au 1er tour.
Le salarié ainsi que son syndicat saisissent le tribunal d’instance afin d’obtenir l’annulation des élections dans le 1er collège, au motif que le salarié avait été privé de la possibilité d’être électeur et de se présenter comme candidat dans ce collège.
Le juge donne raison aux requérants, la société et divers syndicats se pourvoient alors en cassation.
Pour la Cour de cassation, la réponse est sans appel. En effet, le refus illégal d'un employeur, tenu de réintégrer un salarié et de lui permettre d’être électeur et éligible aux élections professionnelles, constituait une irrégularité qui avait influencé le résultat du scrutin et justifiait à elle-seule l’annulation des élections.
Analyse Tissot
L’article L. 2422-1 du Code du travail prévoit que « lorsque le ministre compétent annule, sur recours hiérarchique, la décision de l'inspecteur du travail autorisant le licenciement d'un salarié investi d’un mandat de représentation, ou lorsque le juge administratif annule la décision d'autorisation de l'inspecteur du travail ou du ministre compétent, le salarié concerné a le droit, s'il le demande dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision, d'être réintégré dans son emploi ou dans un emploi équivalent ». Dans l’affaire analysée ici, le salarié ayant formulé sa demande de réintégration dans les délais impartis et l’employeur ayant refusé illégalement sa réintégration, le juge a considéré que le contrat de travail entre les deux parties continuait à s’appliquer. En conséquence de quoi, le salarié devait effectivement normalement pouvoir être électeur et éligible lors des élections professionnelles.
Cour de cassation, chambre sociale, 19 janvier 2022, n° 21-10.264 (le refus de réintégrer un salarié protégé et, par voie de conséquence, de lui permettre d'être électeur et éligible aux élections professionnelles, constitue une irrégularité qui avait influencé le résultat du scrutin et justifiait à elle-seule l'annulation des élections)
Gérant de la société FOKUS dédiée à la formation et à l'accompagnement des représentants du personnel (www.fokus-cse.com)
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Juriste et formateur en droit social
Spécialiste des relations sociales
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