Covid-19 et exercice du droit de retrait par les salariés : le rôle d’un CSE avisé !

Publié le 26/03/2020 à 12:52 dans Comité social et économique (CSE).

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Il se peut que les informations contenues dans cet article et les liens ne soient plus à jour.

Tout salarié peut exercer son droit de retrait en présence d’une situation dont il a un motif légitime de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé. Dans le contexte actuel, quel peut être votre rôle en matière de droit de retrait ?

Exercice du droit de retrait par les salariés : rappels en bref

Le travailleur alerte immédiatement l'employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu'elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu'il constate dans les systèmes de protection (Code du travail, art. L. 4131-1). Dans de tels cas, le salarié concerné peut se retirer de sa situation de travail. Son employeur ne pourra lui demander de reprendre son activité, tant que persistera le danger.

Ce « droit de retrait », ne requiert le suivi d’aucune procédure spécifique pour sa mise en œuvre. Néanmoins et en pratique, il apparaît logique que le salarié informe ouvertement de l’usage de ce droit et ce, ne serait-ce que pour que la situation de danger supposée soit connue et révélée. Le salarié pourra directement manifester son retrait auprès de sa hiérarchie, et/ou a minima des membres de son CSE directement impactés par ces situations, ces derniers pouvant, à leur tour, déclencher un mécanisme d’alerte qui leur est propre (Code du travail, art., L. 4132-2).

Si la saisine du CSE, par un ou des salariés exerçant leur droit de retrait est importante, tant dans la phase ultérieure d’accompagnement du ou des salariés « retirés » que du suivi immédiat de la situation considérée comme à risque, ne pouvons-nous pas considérer que, l’accompagnement des salariés, dans l’évaluation du risque susceptible ou non de donner lieu au retrait, est tout aussi capital ?

Ainsi et bien qu’il suffise au salarié de disposer d’un motif raisonnable l’amenant à penser qu’il se trouvait exposé à un danger grave et imminent pour sa santé et sa sécurité, la « tentation » de l’invoquer parfois sans analyse éclairée préalable, risque de le conduire à l’abus de droit… Votre accompagnement reste donc indispensable !

Mais qu’en est-il, plus spécifiquement, de la crise sanitaire traversée actuellement ?

Exercice du droit de retrait par les salariés : comment réagir face au Covid-19 ?

La légitimité de l’exercice du droit de retrait va étroitement dépendre des spécificités de la situation de chaque salarié (degré d’exposition au risque de contamination, gravité du risque en cas de contamination effective, etc.). Il convient de souligner néanmoins que le droit de retrait vise une situation particulière de travail et non une situation de pandémie.

Droit de retrait en cas de déplacement professionnel à l’étranger ou sur le territoire national

Se déplacer ne conduit pas en soi à s’exposer à un « danger grave et imminent ». Néanmoins et au regard des consignes actuelles ayant évoluées vers un principe plus général de « confinement », un salarié pourrait s’interroger sur son droit de retrait.

Le ministère du Travail considère qu’« un salarié serait […] fondé à exercer son droit de retrait pour la seule situation où, en violation des recommandations du Gouvernement, son employeur lui demanderait de se déplacer et de séjourner […] en l’absence d’impératif ». C’est donc bien la notion d’impératif qui désormais fait loi !

Pour toutes les autres situations, le respect par le salarié des mesures dites « barrières » et la vérification par l’employeur de leur mise en œuvre effective constituent une précaution suffisante pour limiter la contamination. « Ainsi et dans la mesure où, l’employeur a mis en œuvre les dispositions prévues par le Code du travail et les recommandations nationales visant à protéger la santé et à assurer la sécurité de son personnel, qu’il a informé et préparé son personnel, notamment dans le cadre des institutions représentatives du personnel, le droit individuel de retrait ne peut pas, en principe, trouver à s’exercer ».

Droit de retrait des salariés en contact avec du public

Le ministère du Travail distingue deux situations :

  • lorsque les contacts sont brefs, pour lesquels les mesures « barrières », notamment celles ayant trait au lavage très régulier des mains, permettent de préserver la santé des salariés et celle de l’entourage ;
  • lorsque les contacts sont prolongés et proches, pour lesquels il y a lieu de compléter les mesures « barrières », par exemple par l’installation d’une zone de courtoisie d’un mètre, par le nettoyage des surfaces avec un produit approprié, ainsi que par le lavage des mains.

Le ministère considère que dans ces deux situations, dès lors que sont mises en œuvre, tant par l’employeur que par les salariés, les recommandations du Gouvernement, la seule circonstance que le salarié soit affecté à l’accueil du public ne suffit pas pour exercer son droit de retrait.

Droit de retrait vis-à-vis d’un de ses collègues contaminés

En cas de contamination avérée, les mesures suivantes devront être prises par l’employeur :

  • renvoyer immédiatement le salarié testé positif à son domicile avec un masque et lui demander explicitement de contacter son médecin traitant ;
  • informer les autres salariés d’un cas d’infection, afin que ces derniers soient vigilants quant à l’apparition éventuelle de symptômes et qu’ils restent à leur tour à domicile, si tel était le cas.

L’employeur se devra de veiller dans le même temps à :

  • l’équipement des personnes en charge du nettoyage des sols et surfaces avec port d’une blouse à usage unique et gants de ménage ;
  • l’entretien des sols, en privilégiant une stratégie de lavage-désinfection humide ;
  • le suivi de la filière d’élimination des déchets produits par la personne contaminée.

Dès lors que ces mesures sont mises en œuvre par l’employeur, la seule circonstance qu’un collègue de travail ait été contaminé ne suffit pas à considérer que le salarié justifie d’un motif raisonnable pour exercer mon droit de retrait.

Le contexte actuel démontre l’importance de prendre et de respecter les mesures les plus opportunes qui soient en fonction de son organisation propre. Un travail commun se doit d’être amorcé et suivi entre employeurs et représentants du personnel, dans la droite ligne des consignes édictées par le Gouvernement.

Afin d’accompagner les salariés dans l’exercice de leur droit de retrait, les Editions Tissot vous conseillent leur fiche « J’informe les salariés de leur droit de retrait » issue de leur documentation « CSE : agir en instance unique ».

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Stéphanie Roujon-Paris

De formation supérieure en droit social éprouvée, sur le terrain, par des années d'application quotidienne du droit du travail, des relations sociales et de la négociation collective, j’ai toujours …