L’exercice par le CSE du droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes et aux libertés individuelles

Publié le 17/02/2022 à 08:53 dans Fonctionnement des RP.

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Le comité social et économique dispose de plusieurs droits d’alerte, dont celui qu'il lui est possible d’exercer en cas d’atteinte aux droits des personnes et aux libertés individuelles. Souvent méconnue dans la pratique, cette procédure d’alerte peut pourtant s’avérer utile dans bien des situations.

Le droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes et aux libertés individuelles : de quoi s’agit-il ?

Selon l’article L.2312-59 du Code du travail, si un membre de la délégation du personnel au comité social et économique constate, notamment par l'intermédiaire d'un travailleur, qu'il existe une atteinte :

  • aux droits des personnes ;
  • à leur santé physique et mentale ;
  • ou aux libertés individuelles dans l'entreprise ;

il doit s’assurer que cette atteinte est justifiée par la nature de la tâche à accomplir, et proportionnée au but recherché.

Si tel n’est pas le cas, il en saisit immédiatement l'employeur.

Attention
Le Code du travail précise que cette atteinte peut notamment résulter de faits de harcèlement sexuel lien1 ou moral ou de toute mesure discriminatoire en matière d'embauche, de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de classification, de qualification, de promotion professionnelle, de mutation, de renouvellement de contrat, de sanction ou de licenciement.
Selon la jurisprudence, il est possible d’exercer ce droit d’alerte dans les cas où ces atteintes sont possibles, sans être nécessairement avérées.

Par exemple un salarié travaillant dans le rayon poissonnerie d’un supermarché se plaint auprès des élus de se voir imposer par l’employeur le port d’un tablier blanc sur un ensemble bleu ainsi que des bottes.

Il s’agit effectivement d’une atteinte à sa liberté de se vêtir, mais est-elle justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché par l’employeur ?

La réponse est positive car le port de cette tenue répond à plusieurs objectifs, notamment :

  • l’identification du salarié au rayon au sein duquel il travaille ;
  • renvoyer aux clients une image de professionnalisme du domaine dans lequel il exerce ;
  • des raisons d’hygiène.

C’est donc une mesure justifiée par la nature de la tâche à accomplir et qui n’est pas disproportionnée par rapport au but recherché par l’employeur.

Tel n’est pas le cas pour une employée de banque à qui sa direction impose le port d’une jupe dans le cadre professionnel : cet élément vestimentaire n’est pas nécessaire à la vente de produits bancaires et cette obligation peut être mal perçue par les salariées concernées.

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L’exercice de ce droit d’alerte doit également s’opérer à la lecture de l’article L.1121-1 du Code du travail qui dispose que « nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ».

Le droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes et aux libertés individuelles : quelle procédure applicable ?

L’article L.2312-59 du Code du travail prévoit que dès que l'employeur est alerté par un membre du CSE, il procède alors sans délai à une enquête avec le membre de la délégation du personnel du comité et prend les dispositions nécessaires pour remédier à cette situation.

En cas de carence de l'employeur ou de divergence sur la réalité de cette atteinte, et à défaut de solution trouvée avec l'employeur, le salarié, ou le membre du CSE (si le salarié intéressé averti par écrit ne s'y oppose pas), saisit le conseil de prud'hommes qui statue selon la procédure accélérée au fond.

Le juge peut ordonner toutes mesures propres à faire cesser cette atteinte et assortir sa décision d'une astreinte qui sera liquidée au profit du Trésor. Voir en ce sens la circulaire DRT n° 93-10 du 15 mars 1993 : « le juge peut ordonner le retrait de demandes contenues dans des questionnaires de candidature qui ne présenteraient pas de liens directs et nécessaires avec les emplois susceptibles d’être proposés dans l’entreprise ou avec l’évaluation des aptitudes professionnelles des candidats ».

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Attention, la responsabilité de la résolution de la situation litigieuse repose sur l’employeur. Les élus ont un rôle d’alerte mais ils n’ont aucunement une obligation de moyens ou de résultat.

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Marc Kustner

Gérant de la société FOKUS dédiée à la formation et à l'accompagnement des représentants du personnel (www.fokus-cse.com)

https://www.fokus-cse.com
Juriste et formateur en droit social
Spécialiste des relations sociales