La rupture conventionnelle appliquée aux salariés protégés : quel bilan depuis la mise en place de cette procédure ?

Publié le 20/04/2017 à 10:04, modifié le 11/07/2017 à 18:29 dans Protection des RP.

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La loi du 25 juin 2008 relative à la modernisation du marché du travail a mis en place un nouveau mode de rupture du CDI : la rupture conventionnelle. Neuf ans après son instauration, quels sont les impacts pour les salariés protégés et quels enseignements en tirer ?

Rupture conventionnelle : une procédure adaptée aux salariés protégés

En tant que salarié protégé, vous pouvez tout à fait bénéficier de la rupture conventionnelle. Cependant, de par votre statut particulier, la procédure applicable subit certains aménagements.

Première étape : entretien(s) et pourparlers

Il est prévu par le Code du travail au moins un entretien préalable entre l’employeur et le salarié. Il s’agit de la phase de négociation au cours de laquelle les deux parties vont s’accorder sur les modalités de la rupture du contrat (date de fin du contrat, indemnité de rupture, clôture des congés payés, etc.).

Ce qu’il faut savoir :

  • plusieurs entretiens peuvent être organisés ;
  • vous pouvez vous faire assister par un membre du personnel de l’entreprise ou par un représentant du personnel.

Deuxième étape : la signature de la convention de rupture

La convention revêt la forme d’un formulaire CERFA. Un formulaire spécifique existe pour les salariés protégés (CERFA n° 14599*01).

Demande d’autorisation d’une rupture conventionnelle pour un salarié protégé (Cerfa 14599*01) (pdf | 2 p. | 235 Ko)

Pour certains salariés protégés, l’employeur devra recueillir l’avis du CE avant la signature de la convention. Cette étape est impérative s’agissant d’un élu CE ou DP ou d’un membre du CHSCT : aucune dérogation n’est admise.

Notez-le
Même si les deux parties ne sont pas liées par l’avis rendu par le comité d’entreprise, cette étape supplémentaire fait office de garde-fou. Ici, le rôle du CE est de vérifier que la volonté de rompre n’est pas motivée par un motif lié à l’exercice du mandat de représentant du personnel.

Troisième étape : le délai de rétractation

L’employeur et vous-même disposez de 15 jours calendaires pour vous rétracter à compter du lendemain de la signature de la convention de rupture.

Cela signifie qu’il est possible de dénoncer la convention pour tout motif durant ce délai.

Attention, une fois l’avis du CE recueilli, l’employeur dispose de 15 jours calendaires pour transmettre sa demande d’homologation à l’administration.

L’avis rendu par le CE est joint à cette demande.

Analyse Tissot : deux délais se superposent : le délai de rétractation et celui de transmission à l’administration. Cependant, le délai de rétractation étant incompressible, il nous semble logique que l’employeur n’envoie la demande qu’à la fin de ce délai.

Le délai commence à courir le lendemain de la date de signature de la convention et prend fin le 15e jour à minuit.

Quatrième étape : l’autorisation de l’administration

A ce stade, l’administration ne procède pas à une simple homologation comme c’est le cas pour les salariés non protégés, mais va autoriser ou non la rupture. L’inspection du travail va ainsi contrôler la volonté libre et éclairée des parties. Il s’agit notamment de vérifier, par le biais d’une enquête contradictoire, que le consentement du salarié protégé n’a pas été altéré par de quelconques pressions, ou manœuvres de la part de l’employeur.

L’administration vérifie également que la procédure relative à la rupture conventionnelle a bien été respectée, et le CE consulté.

L’inspection du travail dispose d’un délai de 15 jours ouvrables à compter de la réception de la demande pour autoriser ou non la demande de rupture conventionnelle. Si elle ne répond pas, on considère, passé 2 mois, que la demande est rejetée.

Rupture conventionnelle des salariés protégés : un bilan en quelques chiffres

Entre 2010 et 2014 :

  • pour les salariés protégés, un tiers des ruptures de contrats de travail sont des ruptures conventionnelles ;
  • cette proportion est identique pour les salariés non protégés ;
  • l’inspection du travail a enregistré en 2014 environ 20 000 demandes de ruptures de contrats de travail de salariés protégés : 6800 étaient des demandes de ruptures conventionnelles.
Notez-le
L’inspection du travail refuse très rarement les ruptures conventionnelles des salariés protégés : près de 95 % d’entre elles sont homologuées.

Dans les petites structures, un plus grand nombre de ruptures conventionnelles sont conclues avec les salariés protégés. Ainsi, entre 2008 et 2010, 2,4 % des salariés protégés des établissements de moins de 50 salariés ont fait l’objet d’une demande d’autorisation de rupture conventionnelle.

De manière générale et constante, plus l’effectif de l’entreprise est important et plus le nombre de ruptures conventionnelles des salariés protégés baisse.

Notez-le
Le risque d’une rupture conventionnelle pour un salarié protégé varie également en fonction du secteur d’activité de l’entreprise.Entre 2008 et 2010 le taux de demandes de ruptures conventionnelles de salariés protégé était de : 1 % dans le domaine de l’industrie 1,4 % dans le domaine des services 1,5 % dans le domaine du commerce 1,6 % dans le domaine de la construction

Vous voulez en savoir plus sur les salariés protégés (qui est concerné ? Quelle est l’étendue de la protection ?) : Les Editions Tissot vous conseillent leur documentation « Guide pratique des représentants du personnel ».

Marc Kustner,
Juriste en droit social

Etude DARES, mars 2017 n° 018 : « Les licenciements et les ruptures conventionnelles des contrats des salariés protégés, principaux indicateurs »